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Comprendre, vivre et approfondir la foi chrétienne

Saint Esprit et don des langues à la Pentecôte

La Pentecôte, une fête mal connue aujourd’hui

La Pentecôte est fêtée un dimanche et un lundi  de mai ou  juin. Cependant peu de gens savent vraiment ce qui est commémoré ce jour-là.
L’événement lui-même, avec le don des langues a été vécu par les apôtres du Christ

Lire Actes 2.1-13 ; 32-36.

I. Ce qui s’est passé à la Pentecôte

Deux semaines plus tôt Jésus leur avait dit :

Ainsi il est écrit que le Christ souffrirait, et qu’il ressusciterait des morts le troisième jour, et que la repentance et le pardon des péchés seraient prêchés en son nom à toutes les nations, à commencer par Jérusalem. Vous êtes témoins de ces choses. 

Et voici, j ‘enverrai sur vous ce que mon Père a promis; mais vous, restez dans la ville jusqu’à ce que vous soyez revêtus de la puissance d ‘en haut. Luc 24.46-49

Il avait  précisé cette promesse juste avant de les quitter :

Car Jean a baptisé d’eau, mais vous, dans peu de jours, vous serez baptisés du Saint -Esprit. Alors les apôtres réunis lui demandèrent: Seigneur, est-ce en ce temps que tu rétabliras le royaume d’Israël ? 

Il leur répondit: Ce n’est pas à vous de connaître les temps ou les moments que le Père a fixés de sa propre autorité. Mais vous recevrez une puissance, le Saint -Esprit survenant sur vous. Et vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée, dans la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre. Actes 1.5-8.

Ils restent donc à Jérusalem pour attendre cette venue du Saint-Esprit.

L’occasion

La Pentecôte est la deuxième  des trois fêtes majeures où les Juifs du monde entier viennent en masse à Jérusalem. Elle s’appelle aussi fête des Prémices ou des Moissons, parce qu’elle marque la fin de la récolte des grains, la fête des Semaines parce qu’elle tombe 7 semaines = 50 jours. (pentê= 50 en grec) après Pâques.

A cette époque les Juifs y fêtent aussi le don de la Loi au Sinaï, 50 jours après la sortie d’Égypte. Tout va se passer en présence d’une foule énorme.

L’événement

Les disciples sont sans doute réunis dans la chambre haute où ils avaient pris le repas de la Pâque avec leur Maître. C’est alors que

Tout à coup il vint du ciel un bruit comme celui d’un vent impétueux, et il remplit toute la maison où ils étaient assis. Des langues, semblables à des langues de feu, leur apparurent, séparées les unes des autres, et se posèrent sur chacun d’eux.

Et ils furent tous remplis du Saint -Esprit, et se mirent à parler en d’autres langues, selon que l’Esprit leur donnait de s’exprimer.

Or, il y avait en séjour à Jérusalem des Juifs, hommes pieux, de toutes les nations qui sont sous le ciel. Actes 2.2 -5.

La puissance de Dieu s’empare de l’esprit de ces hommes. Elle leur donne la capacité de parler de l’action magnifique de Jésus pour l’humanité. En même temps ils quittent peut-être la maison et se rendent dans la cour du Temple, où ils ont pris l’habitude de se retrouver.

Ils étaient chaque jour tous ensemble assidus au temple. Actes 2.46.

La foule les entend parler de l’œuvre de Dieu et  est doublement stupéfaite par

– ceux qui parlent ainsi sont des Galiléens, réputés incultes et surtout incapables de prononcer correctement les mots : ils avalent des syllabes, ne savent pas prononcer les gutturales.

Voilà les gens que Dieu a choisis pour interpeller le monde entier : l’énumération des v 9-11 contient tous les pays du bassin méditerranéen et même au-delà, vers l’Est : Sem, Cham et Japhet sont tous là ! C’est une préfiguration du futur travail missionnaire mondial !

Le don des langues

Dans les Actes il y a trois occasions où il est ainsi question de langues

– ici, le jour de la Pentecôte,
– quand les païens de chez Corneille se convertissent : ils parlent en langues et célèbrent la grandeur de Dieu ;
– à Éphèse quand quelques disciples de Jean reçoivent le baptême au nom de Jésus puis l’imposition des mains par Paul

Avez-vous reçu le Saint -Esprit, quand vous avez cru ? Ils lui répondirent: Nous n’avons pas même entendu dire qu’il y ait un Saint -Esprit. Il dit: De quel baptême avez-vous donc été baptisés ? Et ils répondirent: Du baptême de Jean. 

Alors Paul dit: Jean a baptisé du baptême de repentance, disant au peuple de croire en celui qui venait après lui, c’est -à-dire, en Jésus.

Sur ces paroles, ils furent baptisés au nom du Seigneur Jésus. Lorsque Paul leur eut imposé les mains, le Saint -Esprit vint sur eux, et ils parlaient en langues et prophétisaient. Actes 19.2-6.

Chaque fois on trouve les mêmes mots, mais le phénomène n’est expliqué qu’une fois en Actes 2.

En quoi consiste le miracle du don des langues ?

– Pas simplement le fait que les disciples louent Dieu  de façon parfaitement compréhensible dans des langues qu’ils ne connaissent même pas.
– Pas seulement le fait que le miracle se situe plus au niveau de la réception (ce qui est entendu) que  de l’émission  (ce qui est dit) : les locuteurs de très nombreuses langues ont pu entendre des louanges prononcées  en quelques langues seulement, ce qui cause d’ailleurs des différences de réception

Ils étaient tous dans l’étonnement, et, ne sachant que penser, ils se disaient les uns aux autres: Que veut dire ceci ?

Mais d’autres se moquaient, et disaient: Ils sont pleins de vin doux. Actes 2.12-13.

On lit deux fois  entendre parler dans sa propre langue, sa langue maternelle Actes 2.8,11

Le message est très clair. Ce qui est mystérieux est la manière dont les auditeurs le perçoivent

Ce n’est même pas le fait que le Saint-Esprit ait été répandu, alors que c’est pourtant nouveau.

II. Pourquoi Dieu procède ainsi ?

C’est dans le but visé par Dieu que se situe le cœur du miracle.

Mais il faut d’abord une importante mise au point : ce parler en langue n’est pas le même que celui de  1 Corinthiens  12-14.

A Jérusalem tous ont parlé en langues et ils ont été compris sans problème par les foules.
A Corinthe seuls quelques uns  parlent en langues et personne ne comprend s’il n’y a pas d’interprète.
A Jérusalem les auditeurs s’émerveillent, alors qu’à Corinthe ils risquent de prendre les chrétiens pour des fous.
A Jérusalem tout se passe dans l’harmonie. A Corinthe il y a grave risque de confusion et un seul est édifié, s’il n’y a pas d’interprète.

Dans l’Ancien-Testament, le vent et le feu sont souvent des signes de la présence et de l’action de Dieu. Jean-Baptiste avait prédit

Moi, je vous baptise d’eau; mais il vient, celui qui est plus puissant que moi, et je ne suis pas digne de délier la courroie de ses souliers.

Lui, il vous baptisera du Saint -Esprit et de feu. Il a son van à la main; il nettoiera son aire, et il amassera le blé dans son grenier, mais il brûlera la paille dans un feu qui ne s’éteint point.Luc 3.16-17.

Ajoutez à cette prophétie la promesse que Jésus avait faite pour ce jour-là et vous sentirez que cet évènement a une envergure unique.

Et c’est là que se situe le vrai miracle de ce jour :

Ce jour-là, à la suite de la prédication de Pierre,  il y eut 3000 conversions d’un tout nouveau genre, ce jour-là est née l’Église de Jésus-Christ, ce jour-là a été annulée la malédiction de Babel divisant l’humanité.

A Babel les hommes avaient rejeté l’ordre de Dieu de remplir la terre et choisi une orientation opposée à la volonté de Dieu  : rester groupés dans une ville et laisser sur terre une trace de leur grandeur

Allons ! bâtissons -nous une ville et une tour dont le sommet touche au ciel, et faisons -nous un nom, afin que nous ne soyons pas dispersés sur la face de toute la terre. Genèse 11.4.

Ils veulent s’élever jusqu’au ciel et remplacer Dieu.

Une unité créée par le Saint Esprit

A Jérusalem

A Jérusalem c’est Dieu qui s’abaisse encore un fois parmi les hommes en la personne du Saint-Esprit : il dépasse les divisions linguistiques et crée un nouveau peuple uni d’une nouvelle façon, autour de Jésus. Des gens que tout sépare, sont unis par un même Sauveur divin, accueilli comme Seigneur.

Et si la diversité des langues subsiste, elle est surmontée dans une unité profonde créée par le Saint-Esprit. Celui-ci tourne nos regards vers le Père, vers le Fils et jamais sur autre chose, jamais sur lui-même.

Chez Corneille, le païen

C’est exactement la même chose qui se produit chez Corneille, le païen (Actes 10). Stupéfait de cette similitude, Pierre pose alors une question décisive : Peut-on refuser de baptiser ceux qui ont reçu le Saint-Esprit aussi bien nous, les juifs ? Actes 10.47

Si Dieu ne fait pas de différence, comment des hommes oseraient-ils en faire ? Les païens croyants sont accueillis par Dieu dans son Église au même titre que les juifs qui croient en Jésus, et cela au mépris de toutes les distinctions habituellement faites par les juifs. Païens et juifs vont former une seule Église de Jésus-Christ.

Au concile de Jérusalem (Actes 15.8-9) Pierre exige cet accueil envers les païens et Jacques, le président, sanctionne officiellement cette décision d’unité.

A Ephèse

La même chose  se produit aussi à Éphèse (Actes 19). Des croyants restés attachés à Jean-Baptiste, faute d’en savoir plus, découvrent l’œuvre de Jésus. Ils l’accueillent, sont investis du Saint-Esprit et unis à l’Église comme Corneille et les Juifs de Jérusalem. Comme il n’y a pas d’Église des païens, il n’y aura pas non plus d’Église selon Jean-Baptiste.

A Samarie

C’est enfin ce qui s’est passé à Samarie, suite à l’évangélisation menée par Philippe (Actes 8). Apprenant que beaucoup de Samaritains ont cru, Pierre et Jean viennent de Jérusalem, leur imposent les mains et alors, mais alors seulement, les Samaritains reçoivent le Saint-Esprit.

Il n’y aura donc pas non plus d’Église samaritaine différente, séparée d’une Église juive, mais une seule Église de Jésus-Christ où toute séparation entre juifs et païens, entre esclaves et libres, entre hommes et femmes disparaît. Sans aucun égard pour tous les préjugés séculaires si bien ancrés dans les esprits !

Il n’y a donc qu’une seule Église dont tous les membres reçoivent dès le départ, au moment même de leur nouvelle naissance, le Saint-Esprit. Ils l’ont reçu, ils en ont été remplis. Le Saint-Esprit a été répandu sur eux : les descriptions varient pour une seule et même expérience fondatrice

Mais à tous ceux qui l ‘ont reçue, à ceux qui croient en son nom, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, lesquels sont nés, non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu.  Jean 1.12-13.

Le Saint Esprit dans la sanctification

Il importe dès lors que ce Saint-Esprit reçoive toute la place, puisse jouer entièrement son rôle de sanctification, qu’on lui donne les pleins pouvoirs de propriétaire, qu’il puisse nous remplir et toujours à nouveau. C’est l’évènement central dans le plan général de Dieu résumé par ces  citations d’Ephésiens

C’est pourquoi, vous autrefois païens dans la chair, appelés incirconcis par ceux qu’on appelle circoncis et qui le sont en la chair par la main de l’homme, souvenez -vous que vous étiez en ce temps -là sans Christ, privés du droit de cité en Israël, étrangers aux alliances de la promesse, sans espérance et sans Dieu dans le monde.

Mais maintenant, en Jésus -Christ, vous qui étiez jadis éloignés, vous avez été rapprochés par le sang de Christ. Car il est notre paix, lui qui des deux n’en a fait qu’un, et qui a renversé le mur de séparation, l’inimitié, Ephésiens  2.11-14

et

selon le bienveillant dessein qu’il avait formé en lui-même, pour le mettre à exécution lorsque les temps seraient accomplis, de réunir toutes choses en Christ, celles qui sont dans les cieux et celles qui sont sur la terre…

En lui vous aussi, après avoir entendu la parole de la vérité, l’Évangile de votre salut, en lui vous avez cru et vous avez été scellés du Saint -Esprit qui avait été promis, lequel est un gage de notre héritage, pour la rédemption de ceux que Dieu s’est acquis, pour célébrer sa gloire. Ephésiens 1.9b-10 ; 13-14.

C’est ainsi que le Nouveau-Testament présente les choses, sans amplifier ou minimiser un aspect particulier, ce qui entraîne des divergences confessionnelles.

III. L’impact de la Pentecôte sur l’histoire du monde

Unité réalisée par le Saint Esprit

Les politiques et les religions rêvent d’unité, ils y aspirent comme à un but lointain, courant de congrès en commissions. Fatigue bien inutile : Dieu l’a déjà réalisée, tout comme la paix. Elle aussi ne se trouve qu’en lui, mais réellement. A nous de prendre conscience de ce fait, d’en prendre possession pour la préserver, en rejetant tout ce qui la détruit dans nos préjugés et notre mentalité qui a besoin de sanctification.

Un peuple unique avec une nouvelle identité

Le Seigneur a vaincu ce qui crée les barrières : le péché. Il a établi un lien intime et éternel : l’action du Saint-Esprit dans une mentalité en chantier de reconstruction sur la base de l’amour.

La Pentecôte est l’anniversaire d’un peuple d’un genre unique, tiré de toutes les nations du monde,. Ce peuple est doté d’une identité nouvelle que chaque membre a choisie personnellement. Il l’a reçue en réponse à la repentance et à l’accueil confiant du Seigneur Jésus. Ce peuple est une société d’un genre tout nouveau. Elle est engendrée, nourrie, guidée par Dieu lui-même à travers sa Parole. Revenons donc sans cesse à cette Parole, au moins chaque jour.

A la Pentecôte le Seigneur est revenu habiter en permanence parmi les hommes, dans l’Église. Il lui donne l’équipement, le plan d’action, les indications nécessaires pour son service de témoin et d’enseignante de sa pensée.

Sainteté de Dieu et salut gratuit

Et le message chrétien est nouveau, lui aussi. La sainteté de Dieu ne badine pas avec le péché. Mais un salut gratuit, déjà accompli par lui-même en Jésus Christ est proposé à quiconque sans discrimination. Ce message est centré, non sur un système, un homme, mais sur Jésus, Fils de Dieu fait homme, confirmé comme Sauveur par sa résurrection et magnifié comme Dieu par son ascension.

L’Eglise, nouveau peuple de Dieu

Par le phénomène des langues Dieu avait encore un autre objectif en vue. Les Pharisiens et les Sadducéens se croyaient les seuls destinataires et dépositaires de la révélation et des bienfaits de Dieu. Leur système s’est totalement discrédité car ils ont assassiné Celui qui était sa raison d’être. Dieu y met fin en lançant l’Église. Ce sera le nouveau peuple de Dieu jusqu’au jour où les Juifs accueilleront aussi Jésus comme leur Messie.

Et remarquons-le bien. En ce jour de Pentecôte c’est en plein Temple de Jérusalem, au cours d’une des fêtes juives majeures que Dieu lance aux juifs un démenti cinglant.

Hommes Israélites, écoutez ces paroles !

Jésus de Nazareth, cet homme à qui Dieu a rendu témoignage devant vous par les miracles, les prodiges et les signes qu’il a opérés par lui au milieu de vous, comme vous le savez vous-mêmes.

Cet homme, livré selon le dessein arrêté et selon la prescience de Dieu, vous l’avez crucifié, vous l’avez fait mourir par la main des impies. 

Dieu l ‘a ressuscité, en le délivrant des liens de la mort, parce qu’il n’était pas possible qu’il soit retenu par elle. Actes 2. 22-24.

Devant les juifs venus du monde entier, Dieu glorifie comme son Envoyé et comme Dieu le Christ qu’ils avaient misérablement assassiné sans vraie raison.

La Pentecôte, victorieuse sur Babel

Babel avait concrétisé l’impossibilité de s’entendre et de vivre ensemble, si c’est contre Dieu. La dispersion fut l’aboutissement normal des entreprises de l’homme. Il était fier de sa prétendue indépendance, centré sur lui-même et sur ses aspirations excluant Dieu. Il prétendait mettre Dieu de côté et n’a fait que détruire un cadre de vie déjà compromis par le péché.
A la Pentecôte des hommes que tant de choses séparent, sont unis pour l’éternité par Dieu. C’est grâce au sacrifice d’un Sauveur qu’ils accueillent aussi comme le Seigneur de leur quotidien.

Babel ou Pentecôte : voilà le choix qui s’offre toujours encore à l’humanité. Mais il faut bien noter que Pentecôte vaincra toujours Babel qui n’a aucun avenir. Pentecôte ouvre sur une vie terrestre qui vaut d’être vécue. Elle débouchera sur une éternité dans l’union directe avec le Seigneur et tous les frères et sœurs du monde entier et de toute l’histoire.

J-J. Streng

Dans les jours sombres, croire en la résurrection ?

Croire en la résurrection alors que tout pousse au désespoir

En lisant les Evangiles à propos du jour de Pâques, le jour de la résurrection du Christ, on est frappé de l’atmosphère qui règne parmi les disciples ce jour-là : une profonde tristesse qui va peut-être jusqu’au désespoir.

D’abord ils ont perdu leur Maître, crapuleusement assassiné par les autorités. Avec lui sont morts tous les espoirs qu’ils avaient fondés sur lui. Et voilà maintenant que même son corps a disparu. Ils avaient à peine commencé à faire leur deuil et déjà tout se complique et s’aggrave encore. On est à mille lieues du triomphe qu’un examen superficiel aurait attendu.

Et pourtant la journée si sombre finira brusquement dans une joie débordante : celle qui fait croire en la résurrection

Qu’est-ce qui a provoqué ce complet retournement de la situation ?

 Luc 24 : 13-35.

Et voici, ce même jour, deux disciples allaient à un village nommé Emmaüs, éloigné de Jérusalem de soixante stades; et ils s ‘entretenaient de tout ce qui s’était passé.Pendant qu’ils parlaient et discutaient, Jésus s’approcha, et fit route avec eux.Mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître.

Il leur dit: De quoi vous entretenez -vous en marchant ?

Et ils s’arrêtèrent, l’air attristé. L’un d’eux, nommé Cléopas, lui répondit: Es -tu le seul qui, séjournant à Jérusalem ne sache pas ce qui y est arrivé ces jours ? -ci-

Quoi ? leur dit -il.

-Et ils lui répondirent: Ce qui est arrivé au sujet de Jésus de Nazareth, qui était un prophète puissant en oeuvres et en paroles devant Dieu et devant tout le peuple, et comment les principaux sacrificateurs et nos magistrats l’on livré pour le faire condamner à mort et l ‘ont crucifié. Nous espérions que ce serait lui qui délivrerait Israël; mais avec tout cela, voici le troisième jour que ces choses se sont passées.

Il est vrai que quelques femmes d’entre nous nous ont fort étonnés; s’étant rendues de grand matin au sépulcre et n’ayant pas trouvé son corps, elles sont venues dire que des anges leurs sont apparus et ont annoncé qu’il est vivant. Quelques-uns de ceux qui étaient avec nous sont allés au sépulcre, et ils ont trouvé les choses comme les femmes l’avaient dit; mais lui, ils ne l’ont point vu.

Alors Jésus leur dit:

O hommes sans intelligence, et dont le coeur est lent à croire tout ce qu’ont dit les prophètes ! Ne fallait -il pas que le Christ souffre ces choses, et qu’il entre dans sa gloire. Et, commençant par Moïse et par tous les prophètes, il leur expliqua dans toutes les Écritures ce qui le concernait.

Lorsqu’ils furent près du village où ils allaient, il parut vouloir aller plus loin. Mais ils le pressèrent, en disant: Reste avec nous, car le soir
approche, le jour est sur son déclin.

Et il entra, pour rester avec eux. Pendant qu’il était à table avec eux, il prit le pain; et, après avoir rendu grâces, il le rompit, et le leur donna. Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent; mais il disparut de devant eux.

Et ils se dirent l’un à l’autre: Notre coeur ne brûlait -il pas au-dedans de nous, lorsqu’il nous parlait en chemin et nous expliquait les Écritures ?
Se levant à l’heure même, ils retournèrent à Jérusalem, et ils trouvèrent les onze, et ceux qui étaient avec eux, assemblés et disant: Le Seigneur est
réellement ressuscité, et il est apparu à Simon. Et ils racontèrent ce qui leur était arrivé en chemin, et comment ils l ‘avaient reconnu au moment où il rompit le pain.

Les événements du dimanche de la résurrection

De sombres jours

C’était déjà le 3e jour sans le Maître, avec qui ils avaient partagé le quotidien pendant plus de trois ans. Désemparés, ils ne savaient plus que faire de leur temps, ni d’eux-mêmes. La matinée s’annonçait aussi sombre que la veille et dans la chambre haute il devait régner un silence lourd, malgré le nombre des personnes réunies là.

Ils restaient enfermés par peur des autorités. Celles-ci, après avoir éliminé le Maître, devaient certainement chercher à faire de même des disciples, pour mettre fin à ce mouvement si gênant qui les avait tant exaspérées.

Des faits déconcertants

Très tôt Marie de Magdala était partie avec deux autres femmes rendre les honneurs funéraires au corps du Seigneur. Mais elles étaient rentrées prématurément, avec encore une nouvelle accablante : on a enlevé le corps du Seigneur !

Bien sûr, Marie avait ajouté d’importants détails (v.23), mais ça, on l’avait à peine entendu ; de toute façon on n’a pas l’habitude d’accorder grand crédit à ce que dit une femme.

Résultat : ces femmes les ont déconcertés (v.22). Ils entendent la nouvelle la plus formidable qui soit, mais par une femme, alors elle tombe à plat. Pire, elle ajoute au désarroi ! La nouvelle la plus libératrice qui soit, reçue sans foi, laisse indifférent et peut même augmenter le trouble.

Curieux, comme nos oreilles peuvent être sélectives quand un fait biblique leur parvient ! Et pourtant Marie, il y a longtemps qu’ils la connaissaient comme une personne sérieuse, fiable.

Au cours de la journée deux de ces disciples s’en retournent tout tristes (v.17) chez eux, à Emmaüs, à 12 km de Jérusalem. En effet leur espoir que ce serait Lui qui restaurerait Israël (v. 21) est désormais anéanti et ils n’ont donc plus rien à faire en ville.

En chemin ils rencontrent un étrange rabbin inconnu qui leur donne un cours d’instruction biblique comme ils n’en avaient entendu qu’avec leur Seigneur. Leur cœur en devient tout brûlant en eux. Mais ça ne va pas plus loin, sauf que pour en apprendre encore plus, ils l’invitent à passer la nuit chez eux. C’est la fin de cette triste journée !

Convaincus de la résurrection

Pas du tout : peu après, alors que la nuit est tombée, voilà que les deux ressortent, tout joyeux, complètement transformés et pressés d’avaler en sens inverse les 12 km vers Jérusalem. Or un juif normal évitait de voyager à pied de nuit.

Eux n’ont qu’un souci : retrouver leurs amis dans la chambre haute (v. 33). Ceux-ci aussi n’étaient plus du tout les mêmes. Plus de tristesse, ils étaient tout excités et disaient tous : « Le Seigneur est réellement ressuscité et il s’est montré à Simon » (v.34.)

Tous, à présent, sont convaincus que le Seigneur est ressuscité ! Mais comment sont-ils donc parvenus à cette certitude ? Qu’est-ce qui a été décisif pour les convaincre ?

Qu’est ce qui convainc ?

D’abord deux affirmations fondamentales : la 1re nous est familière, mais a besoin d’être approfondie ; la 2e peut surprendre à première vue.

1. Les miracles ne convainquent pas à eux tout seuls.

Ils étonnent, remplissent d’admiration ou d’enthousiasme, mais ne font pas changer de position spirituelle. Les amis de Jésus dans la chambre haute ont entendu les trois femmes annoncer la résurrection et ça n’a rien changé.

Pierre, lui, est allé au tombeau, il l’a vu déserté par les gardes romains et vide. Il y est entré (Jean 20) et il a surtout vu la disposition très particulière des bandelettes de Jésus puis il est reparti, consterné, mais il n’a pas cru.

Les ennemis de Jésus avaient vu Lazare sortir de son tombeau, empêtré dans ses bandelettes. Tout ce que cela leur a inspiré, c’est l’urgence d’éliminer à la fois Lazare le ressuscité et Jésus qui l’a ramené à la vie, comme des preuves vraiment trop gênantes.

Au mont Carmel tout Israël a vu l’intervention sensationnelle de Dieu lui-même sur la demande d’Elie. C’était tellement évident qu’ils ont alors tous proclamé : « C’est l’Eternel qui est Dieu ! » Une démonstration absolument unique et exaltante ! Mais le lendemain chacun est retourné à ses pratiques païennes habituelles (1 Rois 18).

2. Ce qui est beaucoup plus inattendu, c’est que la Parole de Dieu ne convainc pas non plus à elle seule.

Quel meilleur professeur de théologie peut-on souhaiter que Jésus lui-même ? Pendant peut-être une heure et demie sur la route d’Emmaüs les deux disciples ont écouté un cours fondamental par le Seigneur. Du sérieux et leur cœur en était tout transporté, mais ce n’est pas allé plus loin.

Plus étonnant encore : aux v. 19-24 les deux hommes expliquent à leur mystérieux compagnon ce qui les rend si tristes : en quelques mots ils exposent l’essentiel de l’Évangile, la résurrection y comprise ! Voilà ce qui les désespère tant ! Même le Sermon sur la Montagne n’a pas seulement été entendu par les disciples, mais par tous ceux qui étaient là, y compris ceux qui allaient devenir, quand même, ses ennemis. Ils en ont été frappés, impressionnés, sans plus. Aujourd’hui certains diraient : « C’était un beau sermon » ; « Il a bien parlé ».

Bien loin de se laisser séduire par ce genre d’enthousiasme, Jésus s’en méfiait et le fuyait.

Un miracle ne trouve tout son sens que mis en correspondance par la foi avec la Parole : voyez la réflexion de Jean devant le tombeau : Jean 20.8-9.

Alors l’autre disciple, qui était arrivé le premier au sépulcre, entra aussi; et il vit, et il crut. Car ils ne comprenaient pas encore que, selon l’Écriture, Jésus devait ressusciter des morts.

Et cette Parole doit être centrée sur Jésus : les yeux des deux hommes se sont ouverts (v. 31) quand ils ont réalisé que tout ce que le mystérieux rabbin leur avait expliqué non seulement concernait Jésus, mais se concentrait sur la mort et la résurrection de Jésus-Messie de Dieu, une résurrection prouvée sous leurs yeux par la manière si caractéristique et si personnelle de leur Maître de rompre le pain. Honnêtes devant Dieu et avec eux-mêmes, ils ont cru, ils ont accueilli le don de la foi et en ont été transformés en profondeur.

Retenons donc ceci : l’aspect décisif de l’évènement de Pâques, c’est cette mise en correspondance par la foi des annonces prophétiques par l’Ancien-Testament et par Jésus lui-même avec sa mort et sa résurrection.

Voilà ce qui convainc et libère de leur désarroi les deux disciples à Emmaüs et les 120 à Jérusalem , voilà ce qui provoque leur témoignage courageux. Si l’Écriture ne nous donne pas le sens de la mort et de la résurrection de Jésus, la mort et la résurrection de Jésus ne nous donnent pas le sens de l’Écriture. Mais les deux mises ensemble, l’une comme explication de l’autre, forment le message de la Bonne Nouvelle qui a révolutionné le monde et qui garde toute sa puissance pour le faire encore.

Insistons sur ce point : ce qui dans l’œuvre de Jésus doit être particulièrement mis en relation avec l’Écriture, c’est sa mort et sa résurrection. C’est le scandale intolérable du christianisme : Dieu a accepté de mourir et en mourant il a fait éclater la réalité et l’horreur du péché. Et ceux qui se scandalisent ainsi, ne veulent pas voir/ croire que ce même Messie mort est aussi ressuscité, qu’il est vivant aujourd’hui, le vrai Maître du monde et son prochain juge.

Les foules aiment un Messie qui multiplie le pain, guérit des malades et ressuscite des morts. Elles seraient enchantées de pouvoir faire d’un tel homme leur roi. Or Jésus a refusé une telle carrière parce qu’au-delà des besoins matériels, bien légitimes des hommes, il visait le problème spirituel fondamental du péché que lui seul pouvait régler et dont la solution peut seule changer l’existence humaine.

Et quand Jésus est arrivé tout près du but de tout son ministère, quand il est accusé par les autorités devant Pilate, les mêmes foules n’ont apparemment pas de mal à crier : « Crucifie, crucifie ! »

Le christianisme, la vraie religion ?

N’est-ce pas la conclusion logique de tout ce qui précède ? Eh bien, quitte à vous surprendre encore : pas du tout et surtout pas ! Non parce que son enseignement serait faux, mais parce qu’il n’y a qu’une vérité, la Bible et que la Bible condamne comme menteuses ou trompeuses toutes les religions, y compris et surtout les formes religieuses du christianisme.

Et qu’est-ce donc qu’une religion ? C’est un mot sur la définition duquel les spécialistes se battent depuis toujours. Pour être simple, quitte à manquer de nuances, on peut dire que c’est un système de spiritualité intellectuelle et pratique dans lequel la révélation biblique a entre 0 et 99 % de place. 0 %, c’est la multitude des religions, dont certaines passent pour très respectables, mais d’où la vérité biblique est totalement absente. 99 % ou moins, ça peut être ma propre foi si je laisse à la pensée humaine un tant soit peu d’autorité à côté ou au-dessus de celle de Dieu. A titre d’exemple voici une définition de la grâce : la grâce est le couronnement des efforts que l’homme fait pour être sauvé ! C’est subtil, mais un poison violent.

Dans l’esprit des gens qui pratiquent une religion, il y a un nombre de choses à faire et quantité de choses à éviter de faire et alors Dieu leur est favorable il les bénit et ils peuvent obtenir de lui ce qu’ils désirent.

C’est ainsi que fonctionnent les amis de Job : Job 11.13-18. Dans un tel système marchand l’homme accepte de payer le prix qui lui est demandé, en argent, en efforts ou en sacrifices et il se croit alors en droit d’attendre de Dieu ce qu’il lui demande. C’est ce que signifie, par la négative, une exclamation telle que : « Qu’est-ce que j’ai fait au bon Dieu pour qu’il me traite ainsi ? »

Au Carmel les prêtres de Baal ont fait tous les rites, les danses sacrées nécessaires pour que Baal fasse pleuvoir, lui, le dieu des orages. Ils ont même ajouté des incisions sur leur corps pour être sûrs de le convaincre et voilà qu’il ose ne rien faire ! Face au Dieu véritable le système religieux se bloque. Elie, lui, ne pratique aucun sport religieux, aucun rite, aucune formule magique. Il compte sincèrement sur son Dieu, il l’appelle et reçoit un exaucement qui dépasse sa propre attente.

Normalement le dieu d’une religion fait ce que l’homme attend de lui. Autrement dit l’homme sait comment son dieu pense ; le mode de pensée de l’un est le même que celui de l’autre.

Esaïe dit exactement le contraire à propos du Dieu véritable :

Esaïe 55.8-9

Car mes pensées ne sont pas vos pensées, Et vos voies ne sont pas mes voies, Dit l’Éternel. Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, Autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies, Et mes pensées au-dessus de vos pensées.

Paul tient le même langage :

1 Corinthiens 2.9-10

Mais, comme il est écrit, ce sont des choses que l’oeil n’a point vues, que l’oreille n’a point entendues, et qui ne sont point montées au coeur de l’homme, des choses que Dieu a préparées pour ceux qui l ‘aiment. Dieu nous les a révélées par l’Esprit. Car l’Esprit sonde tout, même les profondeurs
de Dieu.

On peut citer des prêtres païens, mais les autorités religieuses juives qui méprisent souverainement les adorateurs d’idoles, ont pourtant la même mentalité. Selon leurs conceptions le Messie viendra revêtu de la puissance de Dieu restaurer la gloire ancienne du royaume de David et expulser l’occupant romain.

Or Jésus a refusé tout au long de son ministère tout ce que les conceptions religieuses juives voulaient qu’il devienne ou fasse comme Messie humain . Et c’est pour ce refus qu’on l’a assassiné.

Le diable lui-même fonctionne de cette façon. « Si tu es le Fils de Dieu, ordonne que ces pierres… » Le Fils de Dieu n’a pas de raison d’être limité par la condition humaine générale ; il a des avantages dont il peut librement profiter.

Les promoteurs de la théologie de la prospérité vivent dans un luxe choquant sur le dos des adeptes qu’ils exploitent sous prétexte qu’un enfant de Dieu ne doit pas être pauvre. Le Vatican a toujours considéré que le vicaire du Christ sur terre devait vivre dans un faste digne de Dieu.

Dans une religion il y a des miracles, des apparitions célestes, des signes extraordinaires, considérés comme autant de preuves. Inutile de s’attarder à la foule de miracles qu’on peut appeler absurdes, parce qu’ils ne sont faits que pour épater les naïfs : du sang coagulé qui redevient liquide, le soleil qui fait des pirouettes, une prétendue vierge qui apparaît à des enfants.

Parlons plutôt des miracles religieux centrés sur Jésus : « Maître, nous voudrions te voir faire un miracle » = organise nous un beau spectacle religieux. « Si tu es le Fils de Dieu, lance-toi dans le vide » du haut du Temple = tu auras pour
toi la confirmation éclatante que tu es bien le Fils de Dieu et surtout les gens seront bien obligés de croire en toi. Obligés de croire ! Ou encore plus incontournable : « Si tu es le Fils de Dieu, descends de la croix…

C’est là qu’on touche à la différence la plus définitive entre les religions, même chrétiennes, et la révélation biblique. C’est là que se révèle le caractère bassement humain de toute religion, même si elle se prétend révélée. Tôt ou tard, et souvent très vite, la religion, comme les idéologies politiques, tombent dans la tentation de forcer les gens à croire et donc de persécuter et même de martyriser ceux qui n’ont pas choisi librement de croire en elle.

Il faut oser faire cette double affirmation : Tout système qui se permet d’utiliser la force, la violence, la persécution pour se faire des adeptes, prouve par là qu’il n’est qu’humain, misérablement humain, quels que soient les oripeaux sacrés sous lesquels il déguise cette origine.

Ensuite un système qui a besoin de la violence pour s’imposer, prouve par là qu’il ne croit pas en lui-même, en sa pertinence, en sa solidité, et surtout qu’il a peur, consciemment ou non, peur de s’écrouler, s’il n’a pas recours à la force pour se maintenir.

A tout cela s’opposent deux autres faits centraux de la Bible. D’abord Jésus n’a jamais utilisé, ni permis ou recommandé d’employer la force pour répandre ou sauvegarder l’Évangile. Dans son histoire l’Église dite chrétienne a osé le faire et certaines confessions s’y lancent allègrement de nos jours. Que Dieu en ait pitié ! Ensuite Dieu aime l’homme, sa créature ; il respecte ses choix, quels qu’ils soient et il ne veut de relation que volontaire, librement choisie et cultivée par l’homme.

Toutes ces suggestions, tentations soufflées à Jésus par l’esprit religieux pour obliger les hommes à croire en lui, il les a rejetées. A cause de cela la religion déçue, exaspérée l’a assassiné. Mais la croix sur laquelle la religion s’est vengée de lui, cette croix a scellé la mort de la religion.

La merveille de Pâques, ce n’est pas le miracle de ceux qui prétendent que le Fils de Dieu aurait au dernier moment été remplacé par un autre et aurait ainsi échappé à la mort. Le miracle de Pâques, c’est que Jésus a affronté franchement Satan et la mort et la religion et le péché. Il les a vaincus et l’a prouvé par sa résurrection.

Et pour quiconque croit en la résurrection, cette victoire le libère du visage terrifiant de la mort en lui ouvrant la vie éternelle, elle le libère du péché pour lequel le pardon est offert et qui n’est plus une fatalité incontournable. Elle le libère de la religion où l’homme reste seul dans son légalisme, face à une divinité silencieuse.

Désormais il est aimé comme son enfant par Dieu et son Fils qui viennent faire leur demeure en lui et qui l’accueillent dans la famille de l’Église. Le chrétien n’est pas un « esclave » mais un enfant de Dieu libre, parce que si le Fils affranchit quelqu’un, celui-ci est réellement libre. Libre et aimé, libre parce qu’aimé, ce qui le conduit naturellement à vouloir servir Dieu, par choix et non par obligation.

Ce respect du Créateur pour sa créature, son refus de toute autre relation avec elle qu’une relation fondée sur l’amour et cultivée dans la confiance, c’est aussi ce que la foi biblique a de plus noble et de plus contraire à la religion.

C’est la résurrection qui ouvre et garantit à l’homme cette nouvelle perspective de vie avec son Créateur, dès ici-bas sur terre et dans l’éternité, auprès de lui. Le tentateur offre à l’homme la religion avec le légalisme, l’incertitude quant à l’avenir et l’angoisse de la mort. Le Ressuscité apporte et garantit au pécheur repentant le pardon, la paix intérieure, la liberté, la joie d’être aimé et d’aimer en retour. Tout cela sans fin.

J.J.Streng

Psaume 133 : un hymne à l’amour fraternel

Ah qu’il est doux pour des frères : un hymne à l’amour fraternel avec des images inattendues

C’est un tout petit psaume, mis en musique et chanté avec enthousiasme pendant les cultes et les rassemblements, surtout le v. 1, car à première lecture les deux versets suivants peuvent sembler un peu bizarres

Voici, qu’il est bon et qu’il est agréable que des frères habitent unis ensemble! 

C’est comme l’huile précieuse, répandue sur la tête, qui descendait sur la barbe, la barbe d’Aaron, qui descendait sur le bord de ses vêtements; comme la rosée de l’Hermon, qui descend sur les montagnes de Sion.

Car c’est là que l’Eternel a commandé la bénédiction, la vie pour l’éternité.

Un hymne à l’amour fraternel. Alors on peut se demander ce que vient y faire la barbe d’Aaron, trempée par l’huile qui dégouline sur ses habits et la montagne de l’Hermon que peu  peuvent se vanter de connaître.

Ces images un peu inattendues ont à  dire quelque chose sur la « communion fraternelle ».

Les versets  2 et 3 commencent chacun avec « C’est comme » ils  expliquent ce que voulait dire David, l’auteur, à propos de la « douceur » ou du « délice » d’être ou d’habiter unis ensemble.

1. Le texte : Cantique des montées ou des degrés (Ps.120-134)

Vue sur Jérusalem

Montée vers Jérusalem en procession ou cantiques chantés sur les degrés (marches) du Temple ?

Ils font alors partie du rituel du pèlerin qui arrive au Temple.

A. Les frères ?

Qui sont ces frères rassemblés ?

Dans l’Ancien Testament  le mot frère désignait

a) les enfants issus des mêmes père et mère  (Gn. 4.8),  également le demi-frère ou la demi-soeur  (Gn 20.16; 37.4)

b) les membres d’une même famille (cousin, neveu, par exemple Abraham et Lot, etc.)
c) les membres d’une même tribu (Gn 31.32)ou d’un même peuple  (Ex 2.11; Lv 25.25; Nu 25.18; Ro 9.3)

Le mot frère désignait également un ami intime (David et Jonathan (2Sa 1.26), un allié (formule de respect, Nb. 20.14)ou son prochain.(De 15.12.)
La notion de fraternité comporte toujours un accent de solidarité et de responsabilité mutuelles. Nul n’a le droit de dire comme Caïn: « Suis-je le gardien de mon frère« .(Ge 4.9)

Les frères sont les membres du peuple de Dieu

Le peuple hébreu est une grande famille de frères. Dans ce psaume, on peut comprendre que les frères dont il est question ce sont les membres du peuple hébreu rassemblés pour l’une des trois grandes fêtes dites « de pèlerinage » au temple de Jérusalem.

Ils sont réunis avec les habitants de Jérusalem pour une grande célébration. Ces frères sont assemblés, assis, ils cohabitent, demeurent ensemble.Que c’est beau ! Oubliées les querelles et les divergences

B. L’huile

Que signifie l’huile ?

Moulin à huile dans un jardin biblique en Israël

 

Quel rapport entre l’huile versée sur la tête, la barbe d’Aaron, les franges du manteau, la rosée d’une montagne qui coule jusque sur une autre. Qu’est-ce que cela veut dire ?

Cela fait penser à l’onction d’huile que recevaient les rois, les prophètes et les sacrificateurs.Cette onction est d’abord le signe de la présence de Dieu sur celui qui la reçoit.Elle est aussi le signe d’une mission qui leur est confiée par Dieu dans le monde. La présence de Dieu dans son amour, et le service des autres sont associés.

L’huile, symbole d’une juste relation avec Dieu

Ainsi la juste relation avec Dieu c’est de beaucoup recevoir de lui, et de beaucoup donner aux autres.

Celui qui recevait cette huile était appelé en hébreu le « Messie », ce qui s’est traduit en grec par « Christ ». « Christ » n’est donc pas le nom de famille de Jésus  ni un titre réservé ! Il désigne celui qui est reconnu comme ayant une autorité particulière venant du fait qu’il avait la présence de Dieu sur lui, pour régner, ou pour prophétiser. Ce symbole de l’huile pour représenter la présence de Dieu n’a pas été pris au hasard, il suffit de penser à tous les usages de l’huile dans la civilisation méditerranéenne

L’huile dans la civilisation méditerranéenne

  • L’huile est un des éléments de base de la nourriture, on  fait des galettes avec de l’huile d’olive et de la farine (par exemple dans l’histoire d’Élie et de la veuve de Sarepta).
  • L’huile servait également pour alimenter les lampes, elle est donc source de lumière (cette image de l’huile comme combustible se retrouve au sens symbolique dans une parabole de Jésus).
  • L’huile était aussi employée pour soigner les blessures, et calmer la douleur, comme un onguent. Le bon Samaritain verse de l’huile et du vin sur les plaies du blessé

L’huile : une image de ce que Dieu nous donne par sa présence en nous

  • Comme notre corps a besoin d’être nourri, notre vie spirituelle est alimentée par l’Esprit que Dieu nous communique, c’est ainsi que notre vie spirituelle pourra se développer.
  • « L’homme ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (Matt 4:4), et l’on sait que c’est le Christ Jésus qui est notre « pain de vie ».
  • La Parole de Dieu nous éclaire, elle donne un sens à notre vie, elle dissipe nos peurs comme une lampe nous aide dans la nuit, et là encore, pour nous c’est le Christ Jésus qui est « la lumière du monde ».
  • Et enfin, la présence de Dieu est comme un baume dans notre cœur nous donnant consolation et douceur.

L’huile, une image de la relation fraternelle

Le Psaume 133 va très loin, nous disant que tout cela se trouve aussi dans la relation fraternelle avec l’autre. L’union fraternelle est source de lumière, de nourriture et de vie dans nos existences. Quand nous vivons ainsi c’est comme si Dieu lui-même venait renouveler notre vie.

C’est dans l’amour vécu les uns avec les autres que nous recevons les dons de Dieu, sa bénédiction, sa vie, son Esprit, sa Parole. En s’ouvrant aux autres, nous nous ouvrons aussi à Dieu.De la même manière, le Christ va résumer toute la loi en toutes circonstances par « Tu aimeras ton prochain comme toi-même », commandement dit « semblable » à l’autre: « Tu aimeras Dieu de tout ton cœur… ».

– La tête et la barbe

Cette huile de bénédiction, cette « bonne huile » ruisselle, nous dit le Psaume, de la tête jusqu’à la barbe. En hébreu le mot tête signifie également le commencement ou la jeunesse. Et le mot barbe signifie également la vieillesse.

Nous pouvons donc dire que c’est toute la vie qui est illuminée par l’amour fraternel et par la bénédiction de Dieu. C’est la vie de chacun de nous, de notre naissance jusqu’à notre mort que Dieu nourrit, éclaire et soigne dans l’union de ceux qui savent vivre comme des frères. On peut le vivre et en bénéficier à tout âge, de la plus petite enfance à la vieillesse la plus avancée, c’est là que se trouve le secret universel du bien, du bonheur, de la bénédiction et de l’Eternité.

-La barbe d’Aaron

En regardant de plus près le texte, on se rend compte qu’il y a en fait deux barbes, et la seconde c’est la barbe d’Aaron. Aaron était le frère et le porte-parole de Moïse, le grand prêtre d’Israël, il est le symbole même de la relation avec Dieu… et le mot « barbe » désigne aussi en hébreu la puissance ou l’autorité. Ce qui est en jeu, c’est donc la force de notre relation à Dieu.

Et la puissance de notre relation à Dieu est irriguée, nourrie, illuminée, renforcée par ce baume précieux de l’amour fraternel.L’amour est ce qui renouvelle, illumine toute une vie, jusque dans notre vie spirituelle ou religieuse. Sans amour, notre vie religieuse serait privée de lumière de nourriture et de vie (cf. 1 Cor 13).

– Le bord du vêtement – Les tsitsith

Ensuite, l’huile nous est dite descendre jusqu’au « bord du vêtement » d’Aaron. C’est une référence aux franges rituelles que les juifs faisaient sur le bord de leurs vêtements, appelées tsitsith :Nombres 15:38-40

Parle aux fils d’Israël, dis-leur de se faire une frange sur les bords de leurs vêtements-ceci pour les générations à venir – et de mettre un fil pourpre dans la frange qui borde le vêtement.Il vous servira à former la frange.

En le voyant vous vous souviendrez de tous les commandements du SEIGNEUR, vous les accomplirez et vous ne vous laisserez pas entraîner par vos coeurs et par vos yeux qui vous mèneraient à l’infidélité.

Ainsi vous penserez à accomplir tous mes commandements et vous serez saints pour votre Dieu.

Les franges, un appel à l’obéissance à la volonté de Dieu

Les franges sont là pour rappeler au croyant les commandements de Dieu auxquels il doit obéir. Ce qui est en jeu maintenant, c’est donc l’obéissance à la volonté de Dieu, la fidélité à Dieu. On voit, en passant que cette obéissance à une règle n’est pas ce qui vient en  premier pour le psalmiste, mais cela passe après la relation personnelle à Dieu, après la foi du cœur.

De toute façon, l’obéissance aux commandements finalement se résume à ce seul commandement : et c’est le message de l’Evangile : aimer son prochain. Vivre uni avec son frère, c’est ce qui donne la plénitude à toute notre vie, à notre relation à Dieu, et à notre obéissance à sa Parole.

– La rosée qui descend de l’Hermon. 2° image

La rosée de l’Hermon, source de vie

Après l’huile, c’est la rosée qui décrit l’amour fraternel. Dans les pays semi-désertiques, la rosée est une véritable source de vie. Quand les prophètes rêvent du temps messianique, il y a toujours de l’eau en abondance, des fleuves, des torrents d’eau. En période de sécheresse, la rosée du matin permet aux plantes de survivre.

Ce qui est surprenant ici, c’est que cette rosée nous vient de l’Hermon, c’est-à-dire d’une montagne, haute de 2 800 m. et très souvent recouverte de neige. Le Jourdain y prend sa source : l’eau venant du Mont Hermon irrigue toute la Palestine.

Le Mont Hermon se trouve à la frontière nord d’Israël, avec le Liban, des voisins parfois peu fraternels. Or, c’est de là, nous dit le Psaume, que peut venir la vraie bénédiction.L’eau descend du Mt Hermon pour couler sur les montagnes de Sion – Jérusalem au sud de la Palestine.

Une foi vivante, en relation avec les autres

Notre foi ne peut vivre que du fait que nous soyons en relation avec l’extérieur, que nous acceptions de dialoguer avec les autres, avec ceux qui ne sont pas nos frères ou nos semblables. Si nous nous replions sur nous-mêmes, nous mourons. Il nous faut nous ouvrir, vivre unis avec nos frères, certes, mais aussi accueillir l’autre, voire son ennemi.

Le Mont Sion, c’est le lieu du temple de Jérusalem, symbole de la demeure de Dieu. Or, il est vrai que notre foi risque toujours de se dessécher. Il lui faut une source d’eau vive pour rester comme un jardin verdoyant et fécond, et non pas devenir un désert aride et stérile.

L’eau est ainsi, de même que l’huile une image de la présence de Dieu.Cette source de vie et de fraîcheur vient finalement encore du fait de se savoir vivre unis en frères. C’est cela qui peut venir irriguer notre propre relation à Dieu, notre foi.

Dans ce Psaume, plusieurs procédés littéraires mettent en évidence que l’expérience des frères au verset 1 et la bénédiction au verset 3 sont étroitement liées l’une à l’autre. Nous pouvons  lire ces deux lignes parallèles comme se faisant écho l’une à l’autre.

L’unité des frères a trait à la grâce de la vie pour toujours. L’insistance sur la « descente » des symboles souligne le fait que l’unité des frères dans la bénédiction de la vie à jamais, vient toujours d’en haut. C’est une grâce et non pas un dû.

Ce mouvement descendant conduit à la conclusion. Ce qui unit ces frères est une bénédiction commune. Ils sont frères, dans un premier temps, parce qu’ils sont bénéficiaires du même héritage: la vie à jamais. Le plaisir qui leur est réservé ne relève pas simplement du fait qu’ils sont frères, ni frères ensemble, mais qu’ils se trouvent unis dans l’adoration du Seigneur miséricordieux qui leur a accordé la vie pour toujours. C’est l’adoration collective du Seigneur, source de la vie, qui est « ô combien bonne et ô combien agréable ».

Ce salut, cette vie est une grâce, une bénédiction, au cœur de l’alliance entre Dieu et son peuple. Les deux comparaisons, huile de consécration et rosée mettent en évidence la bénédiction de Dieu. Chacune est un symbole de cette grâce divine.Là se joue la plénitude de la relation à Dieu : dans l’amour fraternel et dans l’ouverture à nos moins proches.

Et c’est là aussi que la bénédiction de Dieu « descend » sur nous et même que la vie « descend » vers nous depuis l’Hermon, depuis l’extérieur. Et c’est là, oui, que se trouve la bénédiction, et la Vie Eternelle

Conclusion

La véritable unité des frères n’est possible que grâce à la bénédiction de la vie éternelle en Jésus-Christ. La vie éternelle ne se trouve qu’en lui. Il dit: « Je suis la résurrection et la vie. » (Jean 11:25).Elle est donnée plutôt que fabriquée. C’est bien plus qu’un tour de force ou qu’une réalisation humaine. Malgré les traditions et les origines différentes au sein de l’Eglise, quiconque croit en Jésus-Christ a la vie éternelle (Jn 3:15). La personne qui croit en Christ est en lui et elle est en rapport fraternel avec tous ceux qui sont en Christ. Cette unité en Christ est déjà établie. Elle existe. A nous de la nourrir et de la préserver.

Jésus, dans sa prière sacerdotale, prie pour ceux qui croiront en lui par la parole des apôtres: « Je vis en eux et tu vis en moi; c’est ainsi qu’ils parviennent à l’unité parfaite… » (Jn 17:23)

Paul, dans sa lettre aux Éphésiens, dit: « Efforcez-vous de maintenir l’unité que donne l’Esprit Saint par la paix qui vous lie les uns aux autres. » (4:3) Plus loin, dans le même chapitre, il parle de notre croissance en Christ et de l’édification du corps entier, « jusqu’à ce que nous parvenions tous ensemble à l’unité dans la foi et dans la connaissance du Fils de Dieu » (v. 13).

Le même apôtre nous exhorte: « Et par-dessus tout, mettez l’amour, ce lien qui vous permettra d’être parfaitement unis. » (Colossiens 3:14) La communion fraternelle ne fonctionne pas comme ça, par hasard. Elle est fécondée et stimulée par l’huile et par la rosée, deux images de la présence de Dieu  parmi nous. Gardons ces images pour rechercher et faire vivre, encore et toujours la communion fraternelle qui nous est proposée dans la Parole !

Voici, qu’il est bon et qu’il est agréable que des frères habitent unis ensemble!

Car c’est là que l’Eternel a commandé la bénédiction, la vie pour l’éternité.

L. Nussbaumer