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Le repas chez Simon ou la pécheresse repentante – Luc 7

Le repas chez Simon

Dans cet épisode de l’Evangile de Luc (7.36-50) , le Christ interagit avec deux personnages que tout  oppose : Simon, un pharisien et une femme pécheresse anonyme.

Philippe de Champaigne, un peintre français du 17e s l’a mis en scène sous le titre  « Le repas chez Simon ou la pécheresse repentante ».

Juifs et païens dans les premières églises chrétiennes

Dans les années 60 de notre ère, les églises chrétiennes sont déjà bien constituées, avec des Juifs et des païens convertis. Mais les relations entre les deux groupes ne sont pas toujours au beau fixe. Les Juifs respectent la Loi, une loi morale forte, alors ils ont tendance à mépriser les païens convertis venus d’une société idolâtre et immorale.

Ces païens convertis ont donc besoin de savoir qu’ils sont eux aussi pardonnés, acceptés dans la famille de Dieu.

Luc et son Evangile

C’est à peu près à ce moment-là, que Luc va écrire son Evangile, à partir des récits des témoins oculaires, (1.1-2) ? En effet,  lui n’était pas présent pendant le ministère terrestre de Jésus.   

Luc va  montrer que Jésus est venu pour être le Sauveur de tous les hommes, Juifs ou païens, comme Théophile auquel il dédie son Evangile. Par de nombreux miracles et guérisons, le Seigneur authentifie sa mission : « Il est venu chercher et sauver ce qui était perdu » (Lc 19.10). Encore faut-il  reconnaître qu’on est perdu.

Jésus sous les divers aspects de son ministère

Le chapitre 7 présente Jésus sous les divers aspects de son ministère, annoncés par Esaïe 61.1-2

L’esprit du Seigneur, l’Eternel, est sur moi, Car l’Eternel m’a oint pour porter de bonnes nouvelles aux malheureux ; Il m’a envoyé pour guérir ceux qui ont le coeur brisé, Pour proclamer aux captifs la liberté, Et aux prisonniers la délivrance ;

– Celui qui guérit – le serviteur de l’officier romain (7.1-10)

– Celui qui ressuscite – le fils de la veuve de Naïn (7.11-17)

– Celui qui doit venir, annoncé par Jean-Baptiste, selon les Ecritures,  et qui a connu le rejet (7. 18-35)

– le prophète, c’est à dire l’oint, qui a reçu l’onction divine – le Christ et Seigneur avec l’autorité divine de pardonner les péchés : le repas chez Simon ou le pécheresse repentante (7. 36-50)

36 Un pharisien invita Jésus à manger avec lui. Jésus entra dans la maison du pharisien et se mit à table. 37 Une femme pécheresse qui se trouvait dans la ville apprit qu’il était à table dans la maison du pharisien. Elle apporta un vase plein de parfum 38 et se tint derrière, aux pieds de Jésus. Elle pleurait, et bientôt elle lui mouilla les pieds de ses larmes, puis les essuya avec ses cheveux, les embrassa et versa le parfum sur eux. 39 Quand le pharisien qui avait invité Jésus vit cela, il se dit en lui-même: «Si cet homme était prophète, il saurait qui est celle qui le touche et de quel genre de femme il s’agit, il saurait que c’est une pécheresse.» 40 Jésus prit la parole et lui dit: «Simon, j’ai quelque chose à te dire.» «Maître, parle», répondit-il. 41 «Un créancier avait deux débiteurs: l’un d’eux lui devait 500 pièces d’argent, et l’autre 50. 42 Comme ils n’avaient pas de quoi le rembourser, il leur remit à tous deux leur dette. Lequel des deux l’aimera le plus?» 43 Simon répondit: «Celui, je pense, auquel il a remis la plus grosse somme.» Jésus lui dit: «Tu as bien jugé.» 44 Puis il se tourna vers la femme et dit à Simon: «Tu vois cette femme? Je suis entré dans ta maison et tu ne m’as pas donné d’eau pour me laver les pieds; mais elle, elle les a mouillés de ses larmes et les a essuyés avec ses cheveux. 45 Tu ne m’as pas donné de baiser; mais elle, depuis que je suis entré, elle n’a pas cessé de m’embrasser les pieds. 46 Tu n’as pas versé d’huile sur ma tête; mais elle, elle a versé du parfum sur mes pieds. 47 C’est pourquoi je te le dis, ses nombreux péchés ont été pardonnés, puisqu’elle a beaucoup aimé. Mais celui à qui l’on pardonne peu aime peu.» 48 Et il dit à la femme: «Tes péchés sont pardonnés.» 49 Les invités se mirent à dire en eux-mêmes: «Qui est cet homme qui pardonne même les péchés?» 50 Mais Jésus dit à la femme: «Ta foi t’a sauvée. Pars dans la paix!» Segond 21

Le texte de Luc, illustré par le tableau, selon 3 axes

  • La femme et sa manifestation d’amour, de reconnaissance
  • Le pharisien bloqué dans ses convictions, la dictature des apparences
  • Jésus, la finesse du regard, au delà des apparences   

Le contexte

La pécheresse

Luc présente une pécheresse anonyme. Elle vient  d’une ville qui n’est pas nommée non plus. Sans doute un souci de discrétion. Peut-être Naïn citée un peu plus haut, ou alors Capernaüm

La tradition catholique, a supposé que la ville était Magdala. Elle a identifié la pécheresse avec Marie Madeleine.  Ainsi est née, la légende célèbre dans la littérature religieuse et dans les arts, de la Madeleine pénitente.

Dans les autres Evangiles (Matthieu 26.6s Marc 14.3s, Jean 12.1s,) une femme verse aussi du parfum. Pas sur les pieds, mais sur la tête de Jésus. Marie de Béthanie, sœur de Marthe et de Lazare. Elle peut difficilement être confondue avec la pécheresse du texte de Luc

Le tableau

Le tableau peint en 1656 était installé dans le réfectoire de l’abbaye du Val de Grâce, à Paris. Il invitait les religieuses à méditer, au cours des repas, l’Evangile en images.

Il est conservé au musée de Nantes

Sa construction très symétrique met en valeur les deux personnages principaux. Au premier plan au centre, à notre gauche Jésus,  en face, Simon

Dans les peintures de repas des scènes bibliques, les convives étaient assis autour d’une table carrée. A partir du 17e s, sous l’influence de l’archéologie, on représente les convives  à demi couchés autour d’une table en demi-cercle (triclinium ).
Champaigne peint un triclinium parce que Luc a écrit : « Il entra et prit place sur un lit ».

I. La femme et sa manifestation d’amour, de reconnaissance

Une pécheresse, peut-être une prostituée… Le texte ne le précise pas

Elle rompt la symétrie. Sa présence déséquilibre la scène, elle bouleverse ce qui est organisé, ordonné.

D’ailleurs comment a-t-elle pu entrer dans la maison, parmi les invités ?

Ce n’était pas inhabituel. Dans les repas de fête, toute personne pouvait  entrer, s’asseoir contre le mur, regarder les invités et peut-être demander des restes

la pécheresse repentante embrassant les pieds de Jésus

Elle se tient derrière aux pieds de Jésus

Comme les autres convives, Jésus était à demi couché sur le bras gauche, appuyé sur les coussins d’un divan, et les pieds nus étendus en arrière

… les cheveux dénoués.

La femme  oublie les convenances sociales. Il était honteux pour une femme de dénouer ses cheveux en public.  C’était un motif de divorce.

Elle tient et caresse le pied de Jésus. Elle ne s’intéresse pas du tout à la discussion entre Simon et Jésus, ni au scandale qu’elle a provoqué. Elle est aux pieds du Seigneur et seul cela compte.`

Elle arrose de ses larmes les pieds de Jésus  et les essuie avec ses longs cheveux dénoués.

Elle pleure d’émerveillement devant le pardon de Dieu. Elle sait qu’elle est acceptée, aimée  de Dieu. Elle a probablement entendu les enseignements de Jean-Baptiste, et aussi ceux de Jésus… Et elle s’est laissé convaincre … de repentance

Elle verse le parfum sur les pieds du Sauveur

Son parfum personnel, un parfum très cher contenu dans un vase d’albâtre, souvent orné d’argent et d’or.  Elle manifeste ainsi sa reconnaissance…Quand on aime, on ne compte pas

II Le pharisien, bloqué dans ses convictions : la dictature des apparences

Simon le pharisien et son geste de mépris

 

 

Le pharisien se dit en lui-même : Si cet homme était prophète, il saurait qui et de quelle espèce est la femme qui le touche, il saurait  que c’est une pécheresse.

Comment expliquer sa réaction négative devant le comportement de Jésus ?

Simon l’a bien remarqué : Jésus a accepté le geste d’amour de la femme. Il ne l’a pas repoussée avec dégoût et  mépris.
Mais lui, le pharisien, ne comprend rien à cette scène, ni à sa profonde signification morale.

Alors il  construit ses hypothèses

Si Jésus est un prophète, il doit savoir ce que valent les gens.

On reconnaît un prophète à sa clairvoyance. On le reconnaît aussi à sa sainteté.

Un prophète ne se laisserait pas toucher par une femme pécheresse et impure.

Si Jésus savait que la femme est une pécheresse, il ne voudrait rien avoir à faire avec elle. Or Jésus a laissé la femme le toucher. Donc il ne sait pas qui est cette femme. Par conséquent il ne peut être un saint prophète

Et il en tire ses conclusions

Puisque Jésus n’a pas rejeté cette femme, il ne sait pas ce que valent les gens.

Puisque Jésus ne sait pas que cette femme est une pécheresse, il ne peut pas être un prophète.

Puisque Jésus n’est pas un saint prophète, je  peux le rejeter, lui, son message et son ministère.

Mais ses conclusions logiques en elles mêmes sont tirées d’hypothèses fausses

Simon ne dit rien mais le langage du corps parle à sa place

Son portrait représente bien le pharisien d’un certain âge, tel qu’on l’imagine.

  • Visage au large front, teint sanguin de l’homme bien nourri
  • Regard dur du notable persuadé de sa supériorité
  • Mépris exprimé par le geste de repousser avec la main

Mépris traduit  aussi par les mots qu’il utilise dans sa réflexion muette : « qui elle est, ce qu ‘elle est, c’est à dire une pécheresse »

La scène qu’il voit le choque : il la refuse.

Refus : le pharisien, c’est le « séparé » du peuple qui ne respecte pas assez la loi du pur et de l’impur.

Des règles de pureté inapplicables pour le peuple

Les pharisiens voulaient que le peuple lui aussi applique, dans la vie courante, toutes les règles de pureté obligatoires  pour les prêtres au moment de leur service dans le Temple. Par exemple, le prêtre en exercice ne pouvait toucher un mort, humain ou animal, sous peine de souillure rituelle (la parabole du Bon Samaritain).

Mais pour le peuple du pays, c’était impossible à appliquer … Les gens et les bêtes mouraient à la maison et il fallait s’en occuper.

Les professions dites « impures »

On regardait comme impures les professions en relation avec l’étranger, le non juif : …

La Mishnah, un commentaire juif  déclare: « Si les collecteurs d’impôts sont entrés dans une maison [tout ce qui est en elle] devient impur »

les métiers en contact avec des animaux qui pouvaient être malades, souillés ou morts

Des métiers indispensables : berger pour les troupeaux des riches propriétaires, ou  tanneur des peaux des animaux sacrifiés dans le Temple.

Le problème : on confondait pureté ou impureté rituelle avec péché ou sainteté morale.

Quand risque-t-on pas de se conduire en  pharisiens comme Simon ?

Quand on évalue les gens d’un coup d’œil rapide, sans même leur adresser la parole. On  les catalogue  en fréquentables, ou non fréquentables, quand on dit, « il (elle) n’est sûrement pas chrétien » au vu de l’ aspect extérieur, de la coiffure, de la manière de s’habiller, peut-être même de la profession.

Mais aussi en tant que chrétiens, quand nous nous plaignons des autres et des circonstances, sans reconnaître nos propres erreurs

III. Jésus, la finesse du regard, au delà des apparences

le geste d’amour et de pardon de Jésus

 

Comme d’habitude chez Philippe de Champaigne, Jésus est vêtu d’une robe rose, le rouge de l’amour. Il est enveloppé d’un manteau bleu, symbole de pureté. On remarque la finesse, le dessin minutieux et délicat des sandales, au pied du lit.  Un discret halo autour de la tête symbolise sa divinité.

Jésus est bien prophète.

Il a lu dans la pensée de Simon ses idées préconçues à propos des pécheurs et son rejet de la femme.

Un enseignement en bonne et due forme sur le pardon ne va pas forcer le pharisien à changer d’avis.

Il raconte une histoire qui va mettre en plein jour ce que le pharisien ne veut pas voir

41 «Un créancier avait deux débiteurs: l’un d’eux lui devait 500 pièces d’argent, et l’autre 50. 42 Comme ils n’avaient pas de quoi le rembourser, il leur remit à tous deux leur dette. Lequel des deux l’aimera le plus?» 43 Simon répondit: «Celui, je pense, auquel il a remis la plus grosse somme.» Jésus lui dit: «Tu as bien jugé.»

« Lequel l’aimera le plus, c’est à dire montrera le plus de reconnaissance ? »

En hébreu ou araméen, il n’y a pas de mot particulier pour remercier ou exprimer la reconnaissance. Donc on utilise des mots comme amour, louange, bénédiction.

Ce court récit conduit à une  conclusion si  évidente que Simon tombe dans le panneau….

Celui, celle à qui le créancier a remis la plus grosse dette

sous entendu, cette femme pécheresse, évidemment, pas moi

« Alors, Simon,  es-tu incapable de comprendre pourquoi cette femme se conduit d’une manière qui te choque tellement.  Son attitude, ses larmes, ses gestes montrent sa reconnaissance. Elle sait que Dieu lui a beaucoup pardonné  » 

Et toi,  tu te trompes toi-même en t’imaginant que tu n’as pas besoin de pardon

Puis, se tournant vers la femme, il dit à Simon:

Vois-tu cette femme? Je suis entré dans ta maison, et tu ne m’as point donné d’eau pour laver mes pieds; mais elle, elle les a mouillés de ses larmes, et les a essuyés avec ses cheveux…

Je suis entré dans ta maison : service minimum

Intentionnellement  Jésus commence l’application de la parabole par : « Je suis entré dans ta maison ».

Il a fait au pharisien un honneur que celui-ci ne lui a pas rendu.

Que diriez-vous si on vous invitait à un repas et, à votre arrivée, rien, aucun contact… Ni poignée de main, ni baiser. On ne vous propose pas de passer à la salle de bain pour vous rafraîchir. On vous montre votre place à table sans vous présenter aux autres invités…

Cette courtoisie élémentaire en société,  se pratiquait aussi dans le Moyen Orient ancien. Ces gestes de politesse traditionnelle, Simon les néglige très clairement quand Jésus arrive chez lui.

Serait-ce peut-être : Ce jeune rabbin, invitons le avec des gens bien et voyons comment il s’en tire ?

D’où le service minimum.

C’est la femme qui a fait à Jésus les honneurs de la maison.

C’est elle, la vraie maîtresse de maison

Jésus le souligne par un série d’oppositions. Mais

Pas d’eau

Simon n’a pas donné d’eau à Jésus pour laver ses pieds. C’était une habitude de l’époque où on marchait en sandales dans des chemins poussiéreux. Le négliger signifiait que le visiteur était d’un rang très inférieur.

Mais des larmes

Ce n’est pas de l’eau mais des larmes d’amour et de reconnaissance que la femme verse sur les pieds de Jésus

Pas de baiser  sur les joues ou sur la main

Simon n’a pas donné à Jésus de baiser fraternel. Sur les joues ou sur la main si la personne était d’un rang social important.

Mais elle, elle n’a pas arrêté de m’embrasser les pieds…

Pas d’huile d’olive mais un parfum coûteux

Pas non plus d’huile d’olive qui protégeait la peau de la transpiration excessive, Mais un parfum coûteux. Quand on aime, on ne calcule pas….

Simon, tu ne m’as pas donné le minimum

tu aurais pu le faire au moins par simple politesse, sans engager ton coeur

Mais elle, elle a fait le maximum,

elle a engagé tout son cœur, toute sa vie devant tout le monde

C’est pourquoi, je te le dis, ses nombreux péchés ont été pardonnés

– car/ puisqu’elle a beaucoup aimé.. (Segond)

-C’est pourquoi je te le dis, ses nombreux péchés lui ont été pardonnés, c’est pour cela qu’elle m’a témoigné tant d’amour. (Semeur)
Mais celui à qui on pardonne peu aime peu

La déclaration de pardon peut être comprise dans deux sens opposés, selon la traduction de la particule grecque OTI

Aimer pour être pardonné Ou Aimer /être reconnaissant parce qu’on a été pardonné

Aimer pour être pardonné

Les versions catholiques et aussi les versions Segond traduisent OTI par car, parce que, puisque

Elle est pardonnée à cause de sa conduite : parce que, puisque, car, elle a beaucoup aimé

A cause de ce qu’elle a fait, ses péchés ont été pardonnés.

ALORS est-ce la doctrine du pardon par les œuvres ?

Le grand amour de la pécheresse serait-il  la raison de son pardon ? N’est ce pas plutôt sa foi ?

Aimer /être reconnaissant parce qu’on a été pardonné

La Version Semeur traduit OTI par « c’est pour cela, c’est pourquoi »

A cause de ce qu’elle a fait, je peux maintenant conclure que ses péchés ont été pardonnés ou

Je déclare que ses nombreux péchés ont été pardonnés, c’est rendu évident par le fait qu’elle a beaucoup aimé.

L’attitude de la femme, révélée par ses gestes d’amour et de reconnaissance est la preuve qu’elle a expérimenté le pardon.

Cette  interprétation est en accord aussi avec  la parabole des deux débiteurs

Elle illustre le grand principe  évangélique du pardon et du salut par la foi seule pour lequel Luther, Calvin ont combattu.

Et il dit à la femme: Tes péchés sont pardonnés. Va en paix

Trois doigts repliés et deux doigts tendus : Symbole de miséricorde, de  salut, et de rachat

Depuis la position élevée de Jésus, ce salut descend d’en haut sur la femme.

La femme a déjà été pardonnée (v. 47). La déclaration directe de Jésus la renforce dans son assurance. Par la foi, elle a expérimenté le pardon des péchés. Elle peut partir en paix

Qui est digne de la vie éternelle ?

L’Eglise chrétienne est la seule société au monde à laquelle on peut adhérer tout en étant indigne d’en être membre disait un chrétien américain  (Charles C. Morrison)

Qui a le droit d’entrer dans le royaume de Dieu, autrement dit, qui peut prétendre à recevoir la vie éternelle ?

Moi évidemment, dit le pharisien.  Moi J’applique à la lettre la Loi de  Moïse, jusque dans les détails. Moi je me garde pur, séparé de ce qui est impur ou même moins pur, en particulier les étrangers et les pécheurs.

Bref, le royaume de Dieu c’est comme un club réservé à certains, … à ce pharisien

Et ce pharisien  lie des fardeaux pesants, et les met sur les épaules des hommes, mais il ne veut pas les remuer du doigt (Matthieu 23.4)

C’est lui qui tient la clé de la porte d’entrée du ciel, bien verrouillée…

Mais en fait, comme le dit Jésus, il la ferme autant pour lui que pour les autres

Malheur à vous, spécialistes de la loi et pharisiens hypocrites, parce que vous fermez aux hommes l’accès au royaume des cieux; vous n’y entrez pas vous-mêmes et vous ne laissez pas entrer ceux qui le voudraient. Mt 23.13

Qui est appelé à entrer dans le royaume de Dieu ? Qui peut recevoir, par grâce, la vie éternelle ?

« Appelé » et pas « a le droit » « recevoir par grâce » et pas « prétendre »

Toute personne, même celle qui n’a pas les qualités requises, celle qui n’est pas à la hauteur, celle qui a besoin de secours, … le non juif, l’étranger, le pécheur…l’incapable, le raté…

A condition de reconnaître son péché devant Dieu, de se juger indigne d’être reçu dans son royaume, à condition de demander avec foi qu’il accorde par grâce, son pardon.

L’officier romain du début du chapitre, un homme respecté et apprécié, dit à Jésus : Je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit. Et  en même temps il exprime sa foi, sa confiance : Mais dis un mot et mon serviteur sera guéri

Alors, comment définir l’Eglise ?

  • Une assemblée de chrétiens ?
  • Une assemblée d’enfants de Dieu ?
  • Une assemblée de pécheurs pardonnés  ?

Oui, des pécheurs pardonnés par Jésus-Christ … mais qui doivent toujours continuer à demander pardon pour leurs péchés.

Si nous disons que nous n’avons pas de péché, nous nous égarons nous-mêmes, et la vérité n’est pas en nous. 9 Si nous reconnaissons nos péchés, il est juste et digne de confiance : il nous pardonnera nos péchés et nous purifiera de toute injustice. 1 Jn 1.8-9

Où se situe le chrétien ? Du côté de Simon ou du côté de la pécheresse repentie ?

Si nous croyons que nous sommes pas si mal que ça en nous comparant aux autres, si nous voyons leur pailles sans que nos poutres ne nous crèvent les yeux, (Luc 6. 41-42) en particulier quand nous ne sommes pas d’accord avec eux, alors, nous ressemblons à Simon. Et Jésus peut nous traiter  d’hypocrites

Hypocrite, enlève d’abord la poutre de ton œil, et alors tu verras clair pour retirer la paille qui est dans l’œil de ton frère

Reconnaissons que c’est par la grâce de Dieu que nous avons été rachetés pour la vie éternelle. Continuons à confesser devant Dieu les péchés de chaque jour, les péchés évidents et ceux qui restent cachés dans notre pensée, et que personne ne voit, alors nous ressemblons à la femme, repentie et en paix.

Une réflexion honnête et sincère de chaque jour, qui appelle péché ce qui est péché, sans se chercher d’excuses, un cœur qui souffre parce qu’il a péché, un cœur qui se repent et croit que Dieu lui accorde le pardon, voilà ce qui plaît au Seigneur.

C. Streng

Psaume 73 – réussir sans Dieu mais après

Que vous inspire cet extrait des Proverbes ?

La maison des méchants sera détruite ;
la tente des gens droits sera florissante. 14.11

Il ne suffit pas de dire qu’elle est forcément vraie, puisqu’elle vient de la Bible.
Votre interlocuteur vous répondra qu’il y a tant d’exceptions !

Il connaît des personnes qui sont un démenti à cette affirmation,. Des incroyants arrivent à réussir sans Dieu, ils prospèrent à faire envie. Alors que des croyants, attentifs à leur comportement, n’ont vraiment pas de chance dans leur vie.

C’est là un vrai problème et un problème qui a de tout temps agité les gens qui réfléchissent.

Un homme qui a réfléchi : Asaph, chef de chorale au Temple

Or la Bible nous a aussi conservé le témoignage d’un homme qui a franchement empoigné cette question pour tenter d’y voir clair. C’est Asaph, le lévite que le roi David avait établi chef de chorale au Temple de Jérusalem.

1. Une réalité indéniable

Psaume 73.1-15

(Lisez la Bible sur internet)

Les observations d’Asaph

Déjà de son temps, il y a 3000 ans ? Asaph a observé ce qui était évoqué  plus haut :

4-9.

Rien ne les tourmente jusqu’à leur mort,
et leur corps est replet ;

5 ils n’ont aucune part à la peine des hommes,
ils ne sont pas frappés avec les humains.

6 C’est pourquoi l’orgueil leur est un collier
– la violence, un vêtement qui les enveloppe ;

7 ils sont luisants de graisse,
les imaginations de leur coeur dépassent la mesure.

8 Ils raillent, ils parlent de faire du mal et d’opprimer ;
ils parlent de haut,

9 ils élèvent leur bouche jusqu’au ciel,
et leur langue se promène sur la terre.

Rien ne manque au tableau

Et vous l’avez constaté, rien ne manque au tableau : les déclarations arrogantes, la moquerie hautaine, la violence et l’oppression… !

Et pour couronner ce palmarès :

et on dit : Comment Dieu saurait-il ?
Y a-t-il même de la connaissance chez le Très-Haut ? 11

Sûr de soi !

la certitude de si bien contrôler toute situation et son propre destin qu’on se place même au-dessus de Dieu…Enfin, de l’idole caricaturale qu’on prend pour le vrai Dieu.

Mais pas sans admirateurs

Mais pour vraiment exister, un tel personnage a besoin d’une cour d’admirateurs ou de flatteurs :

9-10:

ils élèvent leur bouche jusqu’au ciel,
et leur langue se promène sur la terre.

Voilà pourquoi le peuple se tourne vers eux.
On boit leurs paroles

des gens impressionnés par le succès du vantard, qui croient devoir l’imiter à leur tour. Pour cela ils avalent sans grand tri tout ce que débite l’autre, et aussi les couleuvres et autres saletés qui s’y trouvent…

Voilà le spectacle déroutant qu’offrent certains. Comme on dit, ils « ont réussi », malgré leur abandon de tout scrupule envers autrui. Il va sans dire que tant d’injustice blesse (in)directement beaucoup de gens.

Asaph outré et perturbé

Face à ce spectacle Asaph est non seulement outré, mais il a même failli vaciller moralement :

Quant à moi, pour un peu mes pieds allaient s’écarter du chemin,
il s’en est fallu d’un rien que mes pas ne glissent,

car j’étais jaloux de ceux qui font les fiers,
en voyant la prospérité des méchants. 2-3.

Croyants au coeur pur mais échecs

C’est d’autant plus compréhensible qu’il comparait tout cela à la situation de certains croyants, au cœur pur

Oui, Dieu est bon pour Israël,
pour ceux qui ont le coeur pur. 1

Ils sont soucieux d’honorer Dieu, mais ils subissent des revers et des échecs, alors qu’ils se sont confiés entre les mains de Dieu.

Le bilan n’est pas facile à admettre.

  • D’un côté la prospérité insouciante de l’impie qui va jusqu’à provoquer Dieu en face.
  • De l’autre des épreuves, des blocages incompréhensibles et longs à surmonter dans la vie de personnes attachées au Seigneur ou même engagées dans son service.

Ainsi va la vie, diront certains.

Oui, mais qu’en est-il de la providence, de la justice de Dieu ?

N’est-ce pas l’argument favori de l’incroyant : si Dieu existait, il ne permettrait…pas…

La prospérité de l’incroyant, les épreuves du croyant ! Voilà ce qui  sert de preuves : Dieu est indifférent aux injustices ou alors … il ne contrôle rien dans la société.
Sans justice la vie devient insupportable. Or Dieu déclare qu’il est saint, donc juste. Cela devrait se voir dans le quotidien.

Et si les choses fonctionnent ainsi à l’envers, cela vaut-il vraiment la peine d’être soi-même juste, respectueux des autres et de Dieu ?

Se laisser aller à la facilité naturelle est tellement moins fatigant et peut pourtant donner des résultats gratifiants.

Le croyant qui se fait railler par les incroyants, a bien tort de se donner tant de mal et de se priver des plaisirs de la vie !

Conclusion :

J’ai donc réfléchi pour comprendre cela ;
ce fut pénible à mes yeux, 16

le point où s’arrêtent bien des gens, déconcertés, ne sachant plus que penser. Et là, naturellement, les attend le diable avec son raisonnement si logique :

C’est donc pour rien que j’ai purifié mon coeur,
et que j’ai lavé mes mains dans l’innocence :

 je suis sans cesse frappé,
tous les matins m’apportent mon châtiment.13-14.

2. Il faut changer de perspective

Psaume 73. 16-20

Lisez la Bible sur Internet

Réfléchir sous la direction de Dieu

Quand on mène une telle réflexion qui implique fortement Dieu, mieux vaut la faire sous sa direction et ne pas s’arrêter avant d’avoir obtenu sa réponse.

Sonder les Ecritures

Pour cela Asaph entre dans le Temple de Dieu. Il veut sonder les procédés de Dieu envers l’humanité, tels qu’on les trouve exposés dans les Écritures. Et celles-ci, à son époque, se trouvent au Temple, qui est le lieu où est enseignée la pensée de Dieu.

Et là, que lui dit Dieu, dans un langage du 21e s. ?

C’est vrai, ce que tu as compris du film, c’est bien ainsi que les choses se passent souvent entre les hommes. Mais tu juges avant la fin du film, tu n’en as vu qu’une partie, le film n’est pas terminé, attends de voir la suite et en particulier la fin…

Et la fin, ce n’est pas seulement ce qui arrive au terme du parcours terrestre, c’est aussi et surtout ce qui vient après le réveil

Comme un rêve au réveil,
Seigneur, à ton éveil, tu repousses leur image. 20.

Alors seulement ta vision des choses sera complète et tu pourras juger valablement.

Autrement dit : tes constats de 1-12 sont bien justes, mais la conclusion que tu en tires aux v. 12-13 ne l’est pas, parce que bien prématurée.
Ta perspective est celle de l’aujourd’hui, celle d’un point donné sur l’ensemble d’une trajectoire biographique. Elle n’est pas valable, parce que partielle, incomplète.
La Fontaine disait qu’en toute chose il faut considérer la fin, et un proverbe de mon village déclare qu’il n’a pas encore fait nuit tous les jours.

La perspective de Dieu est globale.

Elle prend tout en compte et ne prononce son verdict qu’à la fin, quand il ne peut plus rien venir s’ajouter. Le problème d’Asaph est donc une vision trop courte des choses.

La solution c’est allonger la perspective pour englober la totalité du parcours observé. Et là intervient la raison de l’apparent retard de Dieu, de ce que l’athée appelle injustice ou indifférence de Dieu envers le mal. Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir, l’espoir d’une repentance. C’est le mystère et la bénédiction de la patience de Dieu. Il ne veut pas qu’un seul périsse, mais… que tous parviennent à se convertir

Le Seigneur ne retarde pas l’accomplissement de la promesse, comme quelques-uns le pensent. Il est patient envers vous : il ne souhaite pas que quelqu’un se perde, mais que tous accèdent à un changement radical
2 Pierre 3.9.

Ce n’est qu’en prenant en compte toutes les données d’une situation qu’on peut l’évaluer correctement.

Que penser alors des déclarations définitives et hautaines de certains philosophes ou  savants ?

Ils se vantent de ne considérer que ce qui est objectif, compatible avec la raison, en excluant tout ce qui est inaccessible aux cinq sens. Ils évacuent ainsi allègrement tout un pan des réalités humaines, en particulier le monde de la vie spirituelle.
L’homme est certes un être rationnel, mais aussi émotionnel et spirituel. Il y a aussi des gens très savants et très écoutés qui jugent tout le film en n’en prenant en compte que telle ou telle partie de ce film.

Or qu’en est-il de cette autre partie du film, de la fin de l’incroyant ?

Oui, tu les places sur des voies glissantes,
tu les fais tomber dans la tourmente.

Comment ! En un instant les voilà dévastés,
ils sont à bout, achevés par l’épouvante !

Comme un rêve au réveil,
Seigneur, à ton éveil, tu repousses leur image. 18-20.

Mais attention, ne nous contentons pas de noter qu’il y a quand même une justice réelle, même si elle ne vient qu’à la fin.

Imaginons le cataclysme qu’elle représente pour cet homme. Lui qui était si sûr et si fier de tout contrôler, d’un coup il ne contrôle plus rien du tout.

Lui qui était si certain de n’avoir jamais à rendre compte de rien, le voilà brusquement en face du Juge de l’univers, le vrai Dieu qui se moque bien de toutes les affirmations arrogantes lancées contre lui (Psaume 2).

Là il ne s’agit plus d’un dieu de fabrication humaine avec qui on peut négocier, s’arranger. Cette fois et désormais la situation est doublement épouvantable : l’homme est tout seul, il n’y a plus de cour autour de lui et il n’a absolument rien prévu, rien en main pour affronter cela !

Chaque fois qu’un assassin d’une certaine religion se fait tuer soi-disant comme « martyr de cette religion», imaginons les deux minutes qui suivent sa mort. On lui a certifié qu’il a une entrée prioritaire, c’est à dire sans vérification des péchés, au paradis de cette religion. Imaginons l’abîme entre ce qu’il espérait et ce qui l’y attend effectivement. C’est un bon indicateur de l’horrible mensonge de tout ce système.

3. Quelques conclusions

Psaume 73. 21-28
Lisez la Bible sur Internet

Juger d’une situation avec tous les éléments

Asaph s’était trompé et il le reconnaît avec une belle franchise.
C’est stupide de juger d’une situation en ne prenant en compte qu’une partie des faits qui la constituent, même quand c’est habillé d’un vocabulaire très savant.
Un opticien sait remédier à la myopie, sauf quand elle est volontaire.

Sinon le jugement porté est contestable

L’homme est stupide lorsqu’il feint d’ignorer sa fragilité, la réalité de Dieu sauveur ou juge, le caractère éphémère de toute chose.
On ne peut pas non plus se contenter des apparences qui cachent parfois bien des aspects tristes ou gênants. Tant qu’on n’a pas accès aux données plus secrètes, le jugement porté est contestable :

Ne portez donc aucun jugement avant le temps fixé, avant la venue du Seigneur qui mettra en lumière les secrets des ténèbres et qui rendra manifestes les décisions des coeurs. Alors chacun recevra de Dieu sa louange.
1 Corinthiens  4.5.

Et bien souvent on n’a pas le moyen de les connaître et la sagesse élémentaire consiste à l’avouer et à se taire.

S’abstenir de juger

Dans le Temple de Dieu, dans sa présence, il y a la balance très fine du Saint Esprit. Il indique le vrai poids des choses quand on a besoin de le connaître ou il rappelle que là ce n’est pas à nous de juger.

Il y a encore une autre raison de s’abstenir de juger. Tout être humain veut profiter du cadeau qu’est la vie. Le tout, c’est de savoir ce qu’il entend par là.
L’incroyant le fait en se centrant sur lui-même, sur ses avantages et ses envies. Et pour cela il dispose peut-être de quelques décennies, après quoi c’est fini, sans appel.

Le croyant place le Seigneur au centre de son quotidien et son prochain aussitôt derrière.

Et dans la pratique il découvre qu’avec cette échelle des valeurs la vie vaut la peine d’être vécue et offre beaucoup de joies :

Oui, Dieu est bon pour Israël,
pour ceux qui ont le coeur pur.1.

Il y a aussi des tronçons moins faciles, plus obscurs.

Là on ne suit le Seigneur qu’à reculons et sans comprendre. Pourtant là aussi c’est Dieu qui garde le contrôle. Et on peut relire 23-25 avec l’assurance qu’il confirmera ces déclarations.

Cependant je suis constamment avec toi,
tu m’as saisi la main droite ;

 tu me conduis par ton conseil,
puis tu me prendras dans la gloire.

25 Qui d’autre ai-je au ciel ?
En dehors de toi, je ne désire rien sur la terre.

Et surtout, c’est là la différence énorme par rapport à celui qui veut se passer de Dieu : le croyant n’a pas juste quelques décennies devant lui, mais lui, il a le temps, tout le temps, l’éternité pour profiter de la vie.

L’éternité pour profiter de la vie

Une partie, il la connaîtra déjà sur terre ;

En dehors de toi, je ne désire rien sur la terre. 25b
Quant à moi, m’approcher de Dieu, c’est mon bien.
J’ai choisi pour abri le Seigneur DIEU
– afin de raconter toutes tes oeuvres. 28

L’autre, garantie par Dieu, vient ensuite et elle sera éternelle :

puis tu me prendras dans la gloire.

Qui d’autre ai-je au ciel ? 24b, 25a.

Et un tel choix n’est vraiment pas stupide :

Ma chair et mon coeur s’épuisent :
Dieu sera toujours le rocher de mon coeur et ma part .26

Amour et foi désintéressés : difficile aussi pour le croyant

Pour être honnête, notons que le croyant a du mal de concevoir un amour, une foi désintéressée :

C’est donc pour rien que j’ai purifié mon coeur,
et que j’ai lavé mes mains dans l’innocence :13.

Il a si facilement tendance à attendre une récompense pour ses efforts de sanctification, comme si ceux-ci le privaient de quelque chose qui aurait autant de valeur qu’une vie propre.

Le chrétien doit souvent lutter contre l’idée que sa différence de comportement l’autorise légitimement à attendre un privilège dans le traitement par Dieu.

C’est vrai que Dieu se plaît à bénir celui qui s’attache sincèrement à lui. Mais c’est à voir comme une grâce, une réponse d’amour et non comme un salaire pour un service rendu.

Dans les moments difficiles, patience et silence

Comme on l’a vu, le chrétien connaît des passes difficiles, déconcertantes. Mais en pensant à la dimension éternelle de sa vie, le bon conseil sera la patience et le silence.

Ce n’est pas notre réaction spontanée, mais c’est parfois la meilleure façon de glorifier Dieu : « Je ne sais pas pourquoi tu me fais passer par là, mais je sais que c’est toi qui conduis le trajet. Il se pourrait bien que la raison d’être d’une difficulté, soit justement de m’apprendre la confiance dans le silence. »

Nous autres, Français, Latins, croyons beaucoup trop à la nécessité de toujours parler. Or il n’est vraiment pas toujours nécessaire, ni même sage de parler, de tout exprimer :

Si je disais : Je vais parler comme eux,
je trahirais tes fils.15.

Eviter les débordements

Se répandre en vitupérations, surtout en l’absence du responsable de la difficulté, peut donner le sentiment d’être fort, alors que c’est l’étalage de mon impuissance en face du problème.

Il paraît que cela défoule, libère ; je n’en suis pas si sûr, mais ce qui est sûr, c’est que je devrai des comptes des paroles prononcées et qu’elles constituent souvent une lourde charge spirituelle.

Et si je me lâche ainsi en présence de frères et sœurs, je risque de les blesser, les troubler, les déstabiliser : « Ah, donc même lui, il ne fait pas plus confiance au Seigneur !…Mieux vaut se taire par solidarité, pour ne pas blesser, trahir un frère une sœur, l’Église :

Si je disais : Je vais parler comme eux,
je trahirais tes fils.15.

J-Jacques Streng

Comenius – L’homme image de Dieu et la conception de l’éducation

Le labyrinthe d’une vie

Comenius (Jan Amos Komensky), un chrétien engagé,  un pédagogue dans la tourmente

Paysage de Moravie République tchèque

Jan Amos Komensky (Comenius) est né le 28 mars 1592 à Nivnice, près d’Uhersky Brod en Moravie du Sud, (actuellement République Tchèque) dans une famille de l’Eglise de l’Unité des Frères de Bohême, héritière spirituelle de Jean Hus.

Après des études universitaires en Allemagne à Herborn ((1611-1613) et  Heidelberg (1613-1614), il enseigne à l’école latine de Prerov puis à Fulneck où il est nommé pasteur de la communauté de langue allemande.

Sous la persécution religieuse

Au début de la guerre de Trente ans, défaite des protestants tchèques contre l’empereur d’Autriche Habsbourg à la bataille de la Montagne Blanche, près de Prague en 1620.
Elle est suivie d’une Contre Réforme catholique féroce : exécution des chefs politiques, foi  protestante interdite, habitants contraints de se convertir au catholicisme ou d’émigrer.

Comenius y perd ses biens, ses livres,  sa paroisse et surtout sa femme et ses deux filles emportées par la peste. Il se remarie deux ans plus tard.

Dans la clandestinité, il écrit en 1623 Le labyrinthe du monde et le paradis du cœur, une allégorie qui explique sa conception du monde.

Emigré et voyageur à travers l’Europe

En 1628, il quitte son pays pour ne plus jamais y revenir. Il mènera à travers l’Europe, une existence compliquée d’émigré. Il éprouve les misères et les dangers provoqués  par la guerre et les haines religieuses. Il connaît aussi la notoriété de ses œuvres pédagogiques et philosophiques auprès des puissances politiques.  Il en  espèrera toujours, mais en vain, un secours pour sa patrie.

Oeuvres pédagogiques et linguistiques

De 1628 à 1641 à Lezno à la frontière polonaise où  les réfugiés de l’Unité des Frères, bénéficiaient de la protection de la famille protestante Leszczynski, il fait paraître ses œuvres pédagogiques principales :

  • La Porte ouverte des langues (Janua Linguarum reserata),
  • La Didactique tchèque (Didaktica ceska) (1628-1632) remaniée en latin  sous le nom de Magna Didactica (La Grande Didactique), (1633-1638), 

Grande Didactique – Didactica Magna

Ces deux ouvrages lui valurent plusieurs invitations et séjours à l’étranger :

En 1641-42 à Londres,  il participe à des travaux aboutissant à la création de l’Académie des sciences (Royal Society) ;

en 1641-1648, à Elbing en Pologne suédoise,  il écrit plusieurs manuels de langues.

Evêque de l’Unité des Frères, dispersée

en 1648-1650, deuxième séjour à Leszno.

En 1648, le traité de Westphalie attribue la Bohême et la Moravie aux Habsbourg, catholiques. Ceux-ci, selon le principe « cujus regio, ejus religio »(tel roi, telle religion)  imposent leur religion.
Un retour des fidèles de l’Unité des Frères dans leur patrie est définitivement exclu.

En 1650 , il  est nommé évêque  de l’Unité des Frères, dispersée dans toute l’Europe

D’un séjour à l’autre : oeuvres didactiques

de 1650-1654, à Sarospatak à la cour des Rakoczy princes calvinistes de Transylvanie, il travaille à des œuvres didactiques,

de 1654-1656, troisième séjour à  Leszno, : en avril 1656 il perd ses manuscrits et sa bibliothèque lors de l’incendie de la ville par les catholiques polonais.

En 1656, il s’établit à Amsterdam où le Sénat s’engage à publier l’ensemble de ses oeuvres didactiques. Il y mourra 15 ou le 25 novembre 1670.

Les chemins du labyrinthe et la clé du paradis

Le labyrinthe du monde et le paradis du cœur,  contient la clé qui aide à comprendre les choix de vie de Comenius. On peut suivre ainsi le fil conducteur de sa pensée philosophique  et  pédagogique.

Le pèlerin et ses deux guides

Le pèlerin part à la découverte du monde et des diverses activités de l’homme. Il est guidé à travers la ville symbolique par deux personnages allégoriques.

  • l’obnubilateur  impose sa manière d’envisager le monde
  •  l’ubiquiste  découvre tout, voit tout, surveille tout. 

Un monde terrifiant de manipulation

La conjonction de ces deux pouvoirs aboutit à l’image d’un monde terrifiant  où la domination des âmes est doublement assurée par la manipulation des conditions extérieures de la vision (l’obnubilation) et par la manipulation des conditions intérieures de la pensée (l’inquisition). (O. Cauly, Comenius, l’utopie du paradis) 

Mais des lunettes mal ajustées

Les deux personnages affublent le pèlerin de lunettes magiques qui font passer le faux pour le vrai, l’illusion pour la réalité.
Mais comme ces lunettes sont mal ajustées, il peut voir, en oblique,  ce qui se passe en fait et comment est produite cette illusion.

Devant le tribunal de la vanité

Le pèlerin, réticent à toutes les  sollicitations reste sur sa réserve. Il éveille  les soupçons de ses guides qui le conduisent devant le tribunal de la Vanité, reine du monde. Échappant de peu à la mort, il est tenté de désespérer d’un monde, devenu un labyrinthe sans espoir de sortie.

La vérité du paradis

Cependant, les masques …tombent. Et le pèlerin entrevoit soudain la vérité sous la forme d’un paradis …qui s’est réfugié dans l’asile d’un cœur pur.(Cauly

Modèle de l’Eglise invisible et de la cité de Dieu

C’est le modèle non seulement de l’Église invisible formée par la communauté spirituelle des âmes fondée sur la loi… de l’amour… Mais aussi d’une véritable cité de Dieu et des hommes, d’une communauté effective qui renaîtra dans la cité réunifiée (la Jérusalem céleste) lorsque les temps seront venus. (Cauly)

Comenius, homme non du désespoir ou de la résignation, mais de la nostalgie

Comenius, pèlerin entraîné dans le labyrinthe de la détresse par l’effondrement de l’Europe, particulièrement de sa propre nation, pendant la guerre de Trente ans, est d’abord habité par le désespoir devant ce  monde enténébré. Mais il ne se contentera pas cependant d’un paradis du cœur, en abandonnant le monde.

Il n’est pas l’homme de la résignation mais de la nostalgie  (vir desiderium) du paradis, du paradis tchèque. Il attend la réalisation de son désir… la renaissance de l’État tchèque. Il y consacrera son combat politique

Un projet de réforme de l’éducation pour restaurer la société

Et par son  projet d’une réforme de l’éducation,  il préparera la restauration de la société …déstructurée par la guerre  et menacée dans son identité spirituelle

Le rétablissement glorieux et le bel épanouissement… de l’Église, de l’État et de toute la nation de Bohême (quand il plaira à Dieu de restituer sa souveraineté au peuple tchèque) auront à reposer sur une reconstruction sage et circonspecte de l’enseignement. (Comenius, Projet succinct pour le rétablissement des écoles dans le royaume de Bohême)

Un projet global de restauration de l’homme

Mais cette réforme de l’éducation ne se limite pas à promouvoir la renaissance de la nation tchèque. Elle s’inscrit dans le projet global d’une restauration de l’homme à sa condition initiale, affirmée au début de La grande didactique : 

Dieu a décidé de faire renaître le paradis de l’Église et de transformer le désert en jardin de délices… par l’institution d’une droite institution efficace pour redresser l’humaine corruption … Et cela se fera principalement grâce à l’éducation soigneuse et prudente de la jeunesse.

Il n’y a aucun moyen de sortir de ce monde insensé et cruel de barbarie et d’ignorance sans l’éducation qui mène à la véritable régénération de l’homme et du monde, comme le dira  Comenius  dans Via Lucis :

Alors que le feu de la guerre embrasait les pays voisins et à partir de là l’Europe entière, et que tout dans la chrétienté menaçait de sombrer dans la désolation, je n’avais pas d’autre consolation que de voir réaliser l’ancienne promesse divine de la lumière qui, à la fin des temps, refoulerait les ténèbres.
Comme une collaboration humaine devait être nécessaire, cela ne pouvait être rien d’autre, pensais-je, que de mieux instruire la jeunesse de toutes les choses (à partir de leur fondement naturel) et par là même de sortir de ce labyrinthe du monde. (Cauly)

Un acte de résistance politique et culturelle

Ainsi, avec la  Didactique tchèque commencée en 1628, Comenius pose un acte de résistance politique et culturelle aux nouveaux maîtres de la nation tchèque.
Ceux-ci imposaient le catholicisme comme religion officielle, ils repoussaient la langue tchèque à l’arrière plan au profit de l’allemand, et sous l’égide de la pédagogie jésuite, réintroduisaient l’enseignement du latin dans les écoles primaires.

L’homme image de Dieu… en route vers le paradis

L’Unité des frères remontait à Jean Hus.

Sa  théologie de la perfectibilité infinie, est développée par Comenius :

En l’homme et dans la vie sont restées de la grâce divine de petites étincelles de lumière qu’il (lui) appartient … de raviver pour en créer une lumière claire en lui-même, en la personne des autres et pour toute l’humanité.
Le premier homme est tombé dans les ténèbres du péché. Par le sacrifice de Jésus, il peut essayer de reconquérir en tant qu’image de Dieu la perfection perdue, de racheter par une activité réformatrice fervente de toute la vie la chute du premier homme. (La grande didactique) 

Ainsi, pourra-t-il retrouver son état  premier d’avant la chute.

Il est plus naturel à l’homme et plus facile par la grâce de l’Esprit Saint de devenir sage, honnête et saint que de suivre le mal étranger. En effet, chaque chose revient facilement à sa nature… non l’état de corruption qui nous caractérise tous depuis la chute… mais la condition première, originelle à la quelle nous devons tous revenir. Après la chute et le châtiment, Dieu a greffé… dans les cœurs les boutures d’une grâce nouvelle. Et il  a envoyé son fils pour racheter la faute originelle…(La grande didactique)

L’homme peut donc être ramené à la vertu de Dieu par des moyens sûrs…, et refléter  la perfection de Dieu  par la connaissance , la vertu et la religion : c’est pourquoi nous réclamons l’instruction des chrétiens de la lignée du nouvel Adam…

En effet, l’homme, est image du Dieu omniscient. Par ses capacités intellectuelles, il naît capable d’acquérir la connaissance des choses. D’abord parce qu’ il est à l’image de Dieu… Et puisque parmi toutes les qualités de Dieu domine l’omniscience, nécessairement l’image de cette qualité resplendit aussi dans l’homme. (La grande didactique) 

Tout homme est éducable.

L’éducation, donnée ou reçue,  peut le faire sortir du labyrinthe qui le sépare de Dieu.  Elle  l’éclaire en lui ôtant  les lunettes de l’illusion qui faussent toutes les perspectives.
La pédagogie participe au rétablissement en lui de la ressemblance à l’image de Dieu, du retour au paradis  d’avant la chute.

Sur ce point, une réserve s’impose :

Le Nouveau Testament précise que la pleine restauration de l’image originelle de Dieu en l’homme commence par la nouvelle naissance opérée par le Saint Esprit. (Jean 3.3,7 ; Ephésiens 2.8-9.
C’est sur cette base essentielle que s’appuie ensuite l’oeuvre du Saint Esprit de restauration de l’image de Dieu en l’homme, en collaboration avec l’homme (Philippiens 2.12, 1 Pierre 1.10). Comenius a dû considérer la première étape comme implicite.

Le droit à l’instruction appartient à tous.

Les institutions scolaires, doivent donc être ouverts à tous.

Tous les enfants, nobles ou roturiers, riches ou pauvres, garçons ou filles de toutes les villes, cités ou villages doivent être admis dans les écoles ; voilà ce dont il faut se convaincre. (La Grande didactique)

A une époque où l’instruction était encore peu répandue et surtout parmi les plus riches, Comenius, reprend le souhait de Luther dans son Manifeste aux villes de l’Empire en 1525 . Il  demande ardemment la création d’écoles aux frais de l’État,  afin d’instruire la jeunesse des deux sexes. Même ceux qui sont destinés à l’atelier ou aux champs, doivent …recevoir régulièrement une instruction littéraire, morale et religieuse. (La Grande didactique)

Personne ne doit être exclu de l’instruction.

Les filles peuvent accéder non seulement à  l’enseignement primaire mais au delà :

Aucune raison ne justifie l’exclusion du sexe faible (je tins à y insister) de l’étude, que celle-ci se fasse en latin ou en langue vulgaire…Les femmes sont aussi également à l’image de Dieu…; elles sont douées d’un intelligence vive et d’une aptitude à la connaissance égale, voire supérieure à la nôtre …(La grande didactique)

Et aussi  les enfants peu intelligents, peut-être même des handicapés mentaux légers

On dira encore: il y a des esprits si abrutis qu’il et impossible d’y introduire quoi que ce soit. Je réponds : il y a certes des miroirs sales qui reflètent mal les images…Mais il faut commencer par nettoyer le miroir…Alors il ne refuse(ra) pas de jouer son rôle (La grande didactique)

Eduquer en tenant compte des différences

Cependant, le pédagogue ne se berce pas d’illusions à propos de l’éducabilité générale de l’homme. Il sait qu’il existe entre individus des disparités parfois considérables et il faut en tenir compte.

Mais il est possible d’instruire et d’éduquer une telle diversité de caractères avec une seule et unique méthode parce que… tous les hommes, par delà les différences d’aptitude intellectuelle ont une même et unique nature humaine dont il convient d’éduquer les organes. (La grande didactique)

L’enfant, du labyrinthe de l’école humaniste  au paradis de La Grande Didactique

Une pratique réelle de l’éducation et une véritable connaissance de la psychologie infantile

Page de titre de la Grande didactique Didactica Opera Omnia

La pédagogie de Comenius va au delà  de ses  bases éthiques et religieuses, avec la visée de la régénération de l’homme et de la sortie du labyrinthe.
Elle  n’en reste pas à des conceptions abstraites  mais elle s’appuie sur une pratique réelle de l’éducation et une véritable connaissance de la psychologie enfantine.

Une image positive de l’enfant

L’image positive qu’il donne de l’enfant, lui aussi à l’image de Dieu s’oppose à l’opinion négative qu’on en avait généralement au  17ème siècle.
Traditionnellement, l’enfant considéré comme mauvais, porté au mal, devait être soumis à une autorité  qui pouvait aller jusqu’à la répression.

Enracinée dans la tradition protestante de Bohême

Cette conception positive de l’enfance, insolite en ce 17e siècle, s’enracine dans la vieille tradition protestante et révolutionnaire de Bohême.  La vision utopique (et angélique) de la pureté de l’enfant permettait ainsi d’effectuer la critique de la corruption de l’homme et des pouvoirs établis…(Cauly)

L’enfant, le bien le plus précieux à éduquer

A Bérulle qui affirmait que « l’enfance est le plus vil et le plus abject de la nature humaine après celui de la mort », Comenius  répond qu’il n’y a rien de plus grand ni de plus estimable car elle est, à l’exception du péché originel, l’image non corrompue de Dieu. L’enfant est le bien le plus précieux que l’homme a le devoir d’éduquer. (Cauly)

Cette présence divine, il la souligne dans un passage de la dédicace de la Grande Didactique. Il y qualifie les enfants de maîtres et de modèles  vis-à-vis des grandes personnes…parce que  en eux se trouvent les dispositions les plus simples et les plus aptes à recevoir une amélioration que la miséricorde divine apporte aux causes humaines désespérées. (La grande didactique)

L’enseignement traditionnel au 17e siècle

Des classes surchargées, avec des élèves de tous les âges

L’enseignement au 17ème siècle était dispensé dans des classes surchargées, totalement hétérogènes.

Les enfants des classes sociales élevées entraient au collège dès cinq ans, puis neuf ans mais ceux du peuple entre douze et quinze ans.
Dans une classe de Cinquième du collège des jésuites de Chalons   (1618-1620), il y avait  165 élèves de 8 à 18 ans.
(Etienne Krotky, Former l’homme)

Aucune attention au niveau de maturité des enfants

Ensuite, on ne tenait aucun compte du niveau de maturité psychologique et intellectuelle  des enfants. On pensait qu’ils avaient les mêmes mécanismes mentaux et qu’ils étaient capables des mêmes performances  que les adultes.

Une aberration : faire apprendre la langue maternelle à partir du latin

Comenius dénonce l’aberration qui consiste à faire apprendre à l’enfant sa langue maternelle à partir du latin.

Il rappelle l’angoisse de l’élève, la sienne aussi quand il était élève à l’école latine, écrasé  sous le labyrinthe d’une masse de règles, de commentaires, de comparaisons de textes, de controverses, gavé  de grammaire latine y compris les exceptions et les irrégularités… hébété parce qu’incapable de savoir quel est le sens de tout cela. (La grande didactique)

Pire, dès qu’ils avaient appris à déchiffrer l’alphabet grec et alors qu’ils ignoraient encore les fondements de la langue, on leur mettait en mains des grammaires faisant état de différences grammaticales dialectales. (Krotsky)

Etudier trop vite des auteurs difficiles

Il critique aussi une habitude des écoles latines de passer aux auteurs dès que les élèves ont goûté aux règles de grammaire. Mais à quels auteurs ?
Les écoles qui veulent donner l’impression qu’elles sont les meilleures vont tout de suite … à Cicéron, à Virgile et il conseille de prendre les exemples de grammaire dans la vie courante. (Krotsky)

Des méthodes d’éducation torturantes, décevantes

Il reproche aussi aux méthodes d’enseignement d’être  si dures que les enfants considèrent l’école comme un épouvantail et une chambre de torture pour l’esprit .

La plupart éprouvent des nausées à la vue des lettres et des livres et préfèrent courir travailler chez les artisans ou faire n’importe quoi,  que de ne procurer que des résultats fort décevants. (La grande didactique)

Et inefficaces

La lavandière, l’artisan… apprennent n’importe quelle langue nouvelle, voire plusieurs, en moins de temps qu’il en faut aux élèves des écoles apprenant le latin à temps plein et à toute force…Mais  toujours pas capables   de s’exprimer sans… grammaire ou dictionnaire après quinze ou vingt ans d’études. (La grande didactique)

La Grande Didactique : une nouvelle organisation scolaire

Elle tient compte  de l’âge des enfants et de leur niveau de développement psychologique et intellectuel.

Pour Comenius, l’homme ne devient adulte que vers vint-quatre ans, avec quatre stades de développement  d’une durée approximative de six ans chacun,  caractérisés par la maturation d’une faculté ou de possibilités propres :

Quatre stages de développement

la petite enfance -INFANTIA -(de la naissance à 6 ans) – stade des sens externes et de la motricité;

l’enfance -PUERITIA -(de 6 à 12 ans) -stade des sens internes : éveil de la représentation mentale des choses;

  l’adolescence -ADOLESCENTIA -(de 12 à 18 ans) -stade de la faculté de jugement et de raisonnement;

la jeunesse -JUVENTUS -(de 18 à 24 ans) -stade du développement de l’entendement pur et de la volonté  (Comenius, la nouvelle méthode des langues – Methodus Linguarum novissima)

Quatre cycles d’enseignement

Ces quatre stades correspondent  à quatre cycles d’enseignement ouverts à tous, garçons et filles, au moins jusqu’à douze ans :

pour la petite enfance, l’école du giron maternel,

– pour l’enfance, l’école élémentaire publique, en langue maternelle,

– pour l’adolescence, l’école latine et le gymnase, (le lycée)

– pour la jeunesse, l’Académie (l’Université) et les voyages,

avec des écoles maternelles dans toutes les maisons; des écoles élémentaires dans chaque commune… un gymnase dans chaque ville, une Académie dans chaque royaume ou même  chaque grande région. (La grande didactique)

Un enseignement homogène donné de la même manière à tous

Auparavant, les maîtres s’épuisaient à dispenser un enseignement individuel à l’un et à braire contre les autres livrés au désœuvrement …et à l’ignorance. Ils dissociaient les matières naturellement liées, comme la lecture et l’écriture, et les élèves employaient des livres divers sur les même matières. (La grande didactique)

Maintenant, selon le modèle du soleil qui éclaire toute la terre de la même façon, un enseignement homogène, est donné de la même manière à tous, par un seul maître avec un même livre et les mêmes méthodes pour chaque matière.

Il s’appuiera sur des notions de base solides et concises. Il suivra une progression selon laquelle chaque nouvelle connaissance renforce celle qui la précède et ouvre la voie de celle qui la suit. (La grande didactique)

Un seul maître pourra ainsi  enseigner simultanément à une classe d’une centaine d’élèves

  • en divisant la classe en groupes de dix élèves avec des moniteurs
  • en ne donnant jamais de leçons particulières mais toujours collectives,
  • en se plaçant de manière à être vu et entendu de tous à la fois .

Les huit principes de la leçon modèle

L’auteur donne ensuite les huit principes de la « leçon modèle » qui permettent au maître d’éveiller et de maintenir l’attention des élèves et il explique les procédés de correction mutuelle des exercices écrits

Une nouvelle méthode d’enseignement

facile et agréable pour que les élèves aussi bien que les enseignants ne soient pas dégoûtés (du travail) avant même de l’aborder et avant d’en voir les résultats.
Puisse l’école cesser d’être un labyrinthe, un bagne, une prison et un lieu de détresse, et puisse-t-elle commencer à être un stade, un palais, un festin et un paradis» qui permettra « d’arriver à sortir des labyrinthes scolaires », selon le titre de l’un de ses traités. (Krotsky)

Fondements d’un enseignement et d’une étude faciles

Dans le chapitre XVII de La Grande Didactique qui porte le titre Fondements d’un enseignement et d’une étude faciles, il demande  au maître

  • d’éveiller chez les élèves le désir de savoir et d’apprendre
  • de choisir un méthode d’enseignement qui diminue la fatigue de l’élève et lui évite de se braquer  de peur qu’effrayé, il ne se détourne de l’étude (La gande didactique)

On fait violence à l’entendement (l’intelligence)

  • chaque fois qu’on contraint l’élève à accomplir une tâche au dessus de son âge et de ses forces
  • chaque fois qu’on lui impose d’apprendre par cœur des choses mal expliquées ou mal formulées et lorsqu’on exige de lui un exercice trop brièvement présenté,

Et aussi quand on lui fait apprendre des mots qu’il ne comprend pas.

Des motivations naturelles poussent l’homme à chercher la connaissance

Comenius  insiste sur les motivations naturelles qui poussent l’homme à désirer acquérir la connaissance. Ainsi,

Il n’est pas nécessaire de forcer l’œil  à s’ouvrir pour fixer les objets car, ayant soif spontanément de lumière, il prend plaisir de lui-même à regarder.

De même notre esprit a soif d’objets …Il capte toute chose sans fatigue pourvu que tu procèdes distinctement, avec l’ordre qui lui convient et une chose après l’autre (La grande didactique)

La connaissance commence par les sens

puisque rien ne peut parvenir à l’intelligence qui ne soit d’abord dans la sensation, la connaissance doit nécessairement commencer par les sens… C’est seulement lorsque l’observation de ces choses aura été conduite que la parole interviendra pour les expliquer avec profit. (La grande didactique)

Pour le jeune enfant, découverte du monde par l’observation des objets

Comenius  fait participer le jeune enfant  à la découverte du monde en lui faisant observer les objets qui le composent :

par les sens externes, il apprendra dès la maternelle à distinguer et à nommer les animaux, les éléments de la nature comme l’eau, le vent,… les membres du corps et à se repérer dans le temps.
Si l’observation directe des choses est impossible, on utilisera un livre d’images.

Pour l’enfant plus grand, développer sensibilité, imagination et mémoire

Pour l’enfant plus grand, on développera la sensibilité interne, l’imagination, la mémoire à l’école élémentaire en même temps que les organes d’exécution, la main et la langue pour la lecture, l’écriture, le dessin…le calcul, l’arpentage…et autres exercices qui font travailler la mémoire. (La grande didactique)

Un programme d’éducation complet pour l’intelligence, la langue et la main

Il propose donc un  programme d’éducation complet qui exerce à la fois l’intelligence, la langue et la main et permet à l’enfant d’acquérir des notions  et des principes par l’observation du concret, réel ou imagé.

Le Monde en images, premier livre scolaire illustré

en application des principes pédagogiques de Comenius

le Monde en images (Orbis sensualium pictus quadrilinguis) paru en 1652, est le premier livre scolaire illustré. C’ est l’application pratique la plus complète des principes pédagogiques de Comenius.

Le monde en images – Orbis pictus

avec un sous titre à caractère encyclopédique :

La peinture et la nomenclature de toutes les choses fondamentales et de toutes les actions principales de la vie humaine 

 un abrégé de l’ensemble du monde et de toute la langue … mais aussi un abrégé pictural et pédagogique, embelli de peintures, de nomenclatures et de descriptions. (Recueil d’extraits de l’oeuvre pédagogique)

Correspondance entre l’illustration et le nom de l’objet grâce à des numéros

Il permet d’établir la correspondance entre l’illustration représentant un objet  ou une notion et le nom qu’ils portent. En effet, les mots du texte portent un numéro qui correspond à l’image où l’objet est représenté.

Du simple au complexe

Le livre va du simple au complexe, avec une initiation aux métiers, comme le montre l’illustration et le texte sur l’imprimerie.

Avec un alphabet illustré

Précédé par un alphabet symbolique qui accompagne chaque lettre par  la figure de l’animal dont la voix naturelle en semble imiter le son, il sera utile pour l’apprentissage de la langue maternelle, et comme les mots traduits en d’autres langues (allemand) sont placés en regard des mots latins…, il servira  à comprendre mieux et plus facilement la langue latine. (Recueil d’extraits de l’oeuvre pédagogique)

A la base des encyclopédies enfantines actuelles

Le Monde en images fut édité jusqu’en 1910. On en retrouve aujourd’hui le principe dans les encyclopédies enfantines avec des illustrations simples, claires, et en couleurs, les mots pour  désigner les choses, un texte d’explication.

Pour l’adolescent, former le jugement, l’intelligence et la volonté

Observer, comparer, découvrir les raisons des choses

A l’adolescent, Comenius  demande aussi d’observer les choses mais surtout de les comparer et d’essayer d’en découvrir les raisons

On  passera de la pratique à la théorie par l’étude de la dialectique, de la grammaire, de la rhétorique.
Ainsi se formera le jugement et l’intelligence réflexive de tout ce qui est perçu par les sens.

Enfin, les Académies cultiveront surtout ce qui se rapporte à la volonté…pour qu’elle exerce son pouvoir légitime sur toute chose. (la grande didactique)

Pas d’enseignement avec des mots et des opinions glanés dans des livres.
Montrer comment les choses existent par elles-mêmes

Il rejette l’enseignement « par procuration » courant à son époque, qui consiste à farcir l’esprit d’un fatras de mots… et d’opinions glanées ça et là dans les livres;  au lieu d’éveiller l’intelligence en mettant les élèves en présence des choses, en leur montrant comment elles existent en elles-mêmes et par elles-mêmes. (La grande didactique)

Rendre les études faciles et intéressantes : aller du général au particulier, du facile au difficile

En même temps, il cherche à rendre les études faciles et intéressantes selon les principes du début du chapitre XVII de la Grande Didactique. Entre autres il fallait aller du général au particulier, du facile au difficile. Mais ce n’était pas appliqué pour l’enseignement du latin

Pour l’enseignement du latin aux débutants, on donnait des règles en latin

On donnait aux débutants en latin les règles de la langue en latin……un lexique latin-langue vernaculaire alors qu’il faudrait l’inverse; ce n’est pas leur langue qu’ils doivent apprendre mais le latin…un maître étranger qui ne connaît pas leur langue (La grande didactique)

Il  faudrait plutôt donner les explications dans la langue de l’élève et tirer de son environnement les exemples qui illustrent les nouvelles règles

La porte ouverte sur les langues (Janua linguarum resrata)

Un manuel de latin fondé sur la langue maternelle

C’est selon ces préceptes que Comenius écrivit La  porte ouverte sur les langues (Janua linguarum reserata). La première édition parut en 1631.
C’est un manuel de latin qui prend la langue maternelle comme point de départ.

1000 phrases simples avec 8000 mots latins et leur traduction en langue maternelle

Il consiste en mille phrases simples concernant le monde environnant, composées de huit mille mots latins mis en ordre, avec en regard, le même mot dans la langue maternelle. 

Petite encyclopédie de la nature et du monde environnant

C’est aussi une petite encyclopédie qui mettra l’élève en contact avec les phénomènes de la nature et les différentes facettes du monde qui l’entoure.

Une promenade dans le monde créé depuis l’origine jusqu’à la Sainte Trinité

Le cours des choses est présenté … à travers une promenade effectuée par l’enfant en compagnie de l’auteur qui le guide dans le monde créé, depuis 1’origine des choses jusqu’à la Sainte-Trinité à travers toutes les sphères de la vie. (Cauly)

100 courtes scènes de la vie quotidiennes en 100 rubriques :

De courtes scènes de la vie quotidienne sont clairement et distinctement présentées à l’esprit de l’enfant et distribuées en Cent rubriques (ou «Titres communs des choses») qui révèlent une progression méthodique: de la création aux différents règnes (minéral, végétal, animal) en passant par les différentes sphères de la vie sociale et économique, puis culturelle, jusqu’à la fin dernière de l’existence. (Cauly)

L’ouvrage sera rapidement traduit en plusieurs langues ,dont une édition en français et latin en 1642.

Le paradis retrouvé ?

Comenius  est un auteur passionnant, d’une grande richesse et par là même, d’une grande complexité. Il a exercé ses talents dans de nombreux domaines, pédagogique, philosophique, religieux et politique. Il a suscité l’admiration de beaucoup mais il n’a pas fait l’unanimité de tous et il s’est attiré critiques et ennemis.

Le rétablissement de la nation tchèque ?

Par exemple, il faisait trop confiance aux pseudo prophéties de personnes atypiques ou peu recommandables qui annonçaient un rétablissement de la nation tchèque, démenti par les faits.

On pourrait l’excuser en disant qu’il symbolisait les espoirs d’un peuple persécuté, en fuite, livré au jeux politiques et aux trahisons.

En effet, l’espoir suscité par le soutien de la Suède était immense, ses armées étaient sur le point d’occuper Prague.
Mais  l’annonce du  traité  de Westphalie mit fin à la conquête qui aurait accompli les prophéties de retour. Cependant…

Quand les traités de Westphalie (1648) eurent confirmé la domination étrangère sur la Bohême, Comenius, dans le Testament de l’Unité, mère mourante, lança ce cri qui sonnait comme un défi:

«0 peuple tchèque, un jour viendra où tu auras de nouveau le gouvernement de tes affaires dans tes propres mains».

Cette foi dans le retour de l’indépendance nationale sera le soutien des patriotes tchèques au cours du dix-neuvième siècle. Et quand l’heure de cette indépendance sera venue, en 1918, le président-libérateur, Masaryk, se référera à cette «prophétie» dans son premier discours solennel à la nation.(Krotsky)

Passion, générosité, espoir en Dieu

Si on considère l’ensemble de la vie et les motivations de Comenius, on ne peut s’empêcher d’y lire à la fois la passion, la générosité et un immense espoir en Dieu.

Pas de révolte malgré les malheurs. Dieu est le roc de sa vie

Les malheurs de sa patrie et ses souffrances personnelles auraient pu ruiner sa foi et le pousser à la révolte.
Mais, parlant de Dieu après l’incendie de Fulneck et la mort de sa femme et de ses enfants, il dira qu’il est le « roc de sa vie », une « tour forte ».
Et quand il perd ses manuscrits, -quarante années de travail – lors de l’incendie de Lezno en 1656, il dit qu’il « avait tout perdu excepté cet unique qui, à lui seul, est tout» (Krotsky).

Il y a quelque chose de prodigieux et d’authentiquement chrétien, dans le contraste entre les souffrances et les férocités endurées par Comenius, et l’allégresse mystique dont rayonnent ces textes écrits dans la pauvreté et dans l’exil.
La visualisation des choses et la conception philosophique du monde dans l’œuvre de Comenius
Marc Fumaroli Du Paradis du cœur au Collège de lumière

Souci de formation pour les gens de son époque livré à l’ignorance

Il avait un véritable souci pour la masse des gens de son époque livrés à l’ignorance intellectuelle morale et spirituelle par la négligence des pouvoirs politiques et les vicissitudes de la guerre et il était convaincu que de bonnes écoles pouvaient remédier à ces lacunes. Seul il sentait, à son époque, que «l’art de former les hommes était un des plus profonds mystères du monde et de notre salut» (Krotsky)

Un bilan, au moins sommaire, de son système éducatif ?

 Presque ignoré dans l’enseignement public français

On attribue à Rousseau sa conception du développement psychique de l’enfant et son système éducatif

Un premier fait : Comenius  est à peu près totalement  ignoré dans le monde de l’enseignement public. On a attribué à Rousseau la paternité de sa conception du développement psychique de l’enfant et de son système d’éducation.

Il serait …facile de montrer comment bien souvent Rousseau répète Comenius; parfois on « retrouve textuellement les expressions de Comenius« . (Krotsky)

Plus de notoriété aujourd’hui … dans les rencontres de spécialistes

Il est un peu plus connu aujourd’hui mais sa notoriété est limitée au cercle des spécialistes de colloques. 

La seule biographie accessible en français jusqu’à une date relativement récente était celle d’Anna Heyberger parue en1928.

Une Grande Didactique tronquée, éliminant toute dimension religieuse…

Quant à La Grande Didactique, elle a connu deux traductions.

Celle des Éditions Klincksieck parue en 1992 a heureusement remplacé celle de Piobetta en 1942 aux P.U.F.

Celui-ci, sous les égides du laïcisme, récupère les « avantages pédagogiques » de Comenius  en éliminant toute dimension religieuse.
Les premiers chapitres de La Grande Didactique et d’autres passages  sont simplement ignorés et les mots comme Dieu, religion remplacés par des points de suspension !

Reproche de vouloir rendre l’étude facile et inciter à la paresse

Certains lui ont reproché de vouloir rendre l’étude facile et d’inciter ainsi les élèves à la paresse.

Mais son objectif :  rendre accessible au peuple la culture réservée  l’élite

Mais il ne faut pas oublier son objectif de rendre accessible au peuple la culture réservée  jusqu’alors à l’élite, en évitant de le rebuter par trop de difficultés.

«Il faut toujours choisir dans la mesure du possible des moyens …faciles à employer (ce qui est difficile passera pour impossible)». …«Tout ce que tu entreprends, il faut que tu aies des moyens sûrs et une méthode facile pour le mettre en pratique». (Krotsky)

A la même époque, les jansénistes de Port Royal

Il n’était d’ailleurs pas le seul à travailler sur un meilleur enseignement des langues et des méthodes d’enseignement, moins rebutantes et plus accessibles aux élèves.

En témoignent les titres d’ouvrages composés à la même période par les Jansénistes à Port Royal

  • Nouvelle méthode pour apprendre facilement et en peu de temps la langue latine (1644)
  • Nouvelle méthode pour apprendre facilement et en peu de temps la langue grecque (1657) de Lancelot. (Krotsky)

Evaluer les notions de facilité, difficulté à la mesure des conditions de l »époque

Il est important aussi d’évaluer les notions de facilité et difficultés à la mesure des conditions de son époque – en particulier l’enseignement du latin donné en latin- et de ne pas le comparer aux conditions actuelles de l’enseignement.

Facile pour un  élève de l’école de Comenius voulait dire  « un peu plus accessible » alors que, dans certains domaines et exigences de l’enseignement actuel, cela signifie parfois « élémentaire » ou « indigent ».

Comenius : culture pour toutes les couches de la société

Diderot et Voltaire :  conservateurs sans sympathie pour le peuple

Comenius  est le premier à avoir travaillé à diffuser la culture dans toutes les couches de la société parce que  il respecte en chaque homme l’image de Dieu, alors que Diderot ou Voltaire qui «étaient des conservateurs sans sympathie, pour la masse populaire qui leur inspirait parfois des mots très durs». (Krotsky)

Droit à l’éducation pour les infirmes, les déficients intellectuels et ceux qu’on pensait réservés à l’esclavage

Il accorde aussi le droit à l’éducation aux infirmes et déficients intellectuels et aussi à ceux qu’on appelait alors « barbares »et que l’on pensait dépourvus d’âme, donc réservés pour l’esclavage.

Conclusion par Comenius

Nous laisserons à Comenius le soin de tirer lui-même la conclusion qui établit le lien entre les éléments fondamentaux, les options et les réalisations de sa vie

Dans l’ouvrage L’école comme un jeu (Schola ludus), il se décrivait ainsi en 1657 :

« Moravus sum natione, lingua Bohemus, professione theologus ad Evangelii ministerium
De nationalité, je suis Morave, de langue, Tchèque, de profession, Théologien au service de l’Évangile. »

Quant à ses recherches en didactique, il écrit clairement

Ce que j’ai écrit pour la jeunesse, je ne l’ai pas écrit comme pédagogue mais comme théologien. (Opera didactica omnia IV, 27).

Illustration tirée des «Oeuvres didactiques complètes» avec l’inscription « Tout coule de soi-même, la violence est absente des choses ».