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Le symbole des apôtres, une confession de foi chrétienne

Le symbole des Apôtres, ou Credo, une confession de foi de l’Eglise ancienne

On a récité le Credo pendant des siècles.

Aujourd’hui encore, on le proclame dans les Eglises catholiques et les Eglises issues de la Réforme protestante, dont font partie aussi aussi les Eglises évangéliques.

En fait, on le récite rarement dans les Églises évangéliques.

Peut-être,  diront certains, pour éviter « les vaines redites ». Mais on l’exprime parfois sous la forme d’un cantique

Pourquoi ne pas réfléchir à ce texte ?

Au-delà de la récitation ou de l’ignorance, ne serait-il pas judicieux  de réfléchir une fois  à la raison d’être  et à la signification de ce texte
Pourquoi ne pas aller plus loin que la simple récitation des mots ? Pourquoi ne pas chercher le sens profond,  l’explication qui ouvre à la mise en pratique ?
Nous avons sans doute entendu des prédications qui commentent le Notre Père.  Alors, pourquoi pas une explication du « je crois en Dieu »
Avec ses modifications et ses ajouts ce texte peut aider à comprendre  comment la doctrine chrétienne s’est construite

Le Credo, aurait-il été rédigé d’un commun accord par les apôtres de Jésus Christ lors du 1e Concile de Jérusalem ? Non, c’est une légende pieuse !

Qu’est ce que le Credo ?

C’est une confession de foi rédigée en latin. Elle contient les vérités nécessaires à la déclaration publique de la foi des nouveaux convertis le jour de leur baptême

Rufin a d’abord été écrit le Credo à la fin du 4e siècle. Il était originaire d’Aquilée, au nord de l’Italie, près de Venise.

Ensuite, après quelques étapes intermédiaires, le Credo a été complété au 8e siècle par Pirmin de Reichenau, près de Constance.

Enfin il a été « canonisé », c’est à dire rendu officiel au 9e siècle par Charlemagne à l’usage de toute l’Eglise de langue latine à l’ouest du bassin méditerranéen. Dans la partie orientale, la langue de l’Eglise était le grec.

Commentaire des termes du «Symbole des Apôtres »

Un commentaire des termes du  Symbole des Apôtres avec ses modifications et ses ajouts peut aider à comprendre comment la doctrine chrétienne s’est construite dans les premiers siècles de l’Eglise.

Il permettra de remarquer que les vérités doctrinales s’affirment souvent aussi par une réflexion d’opposition avec les courants hérétiques.
Sous forme suivie, chaque affirmation latine de cette confession de foi et sa traduction sera expliquée en détail

CREDO IN DEUM PATREM OMNIPOTENTEM
JE CROIS EN DIEU LE PERE TOUT PUISSANT

Une confession de foi individuelle

Comme dans tous les textes latins et grecs, le premier mot (incipit) donne le titre et le thème du texte qui suit, une confession de foi : « je crois ».

Les autres confessions de foi collectives comme le Symbole de Nicée Constantinople (en grec) et celui d’Athanase (en latin) étaient exprimées au pluriel.
Le « Symbole des Apôtres », est une confession de foi individuelle au moment du baptême, donc à la première personne du singulier.

Les autres religions de l’époque, y compris la religion juive, étaient liées à la nationalité ou à l’appartenance ethnique. Elles étaient acceptées globalement sans qu’une adhésion personnelle ne soit demandée. Le citoyen romain, lui aussi, n’avait pas besoin d’exprimer personnellement son accord avec la religion romaine traditionnelle héritée de ses ancêtres.

L’Église chrétienne a été reconnue officiellement par l’Empereur Théodose en 380 après plusieurs siècles de persécution. Alors le paganisme a été interdit et tous les citoyens romains ont été obligés d’adhérer à la foi chrétienne. Cependant, la distinction a toujours continué à se maintenir entre citoyenneté laïque et engagement religieux exprimé par le baptême. Cette différence s’est diluée par la suite dans certains pays.

Une affirmation du monothéisme

CREDO IN DEUM
JE CROIS EN DIEU 

Le monothéisme, croyance en un seul Dieu, une révolution culturelle

L’athéisme aujourd’hui c’est rejeter l’existence du Dieu biblique. Dans l’Antiquité gréco-latine, on était accusé d’athéisme quand on refusait de rendre un culte aux dieux nationaux.
La notion d’un Dieu personnel qui a créé l’univers et qui continue à en prendre soin (Ps 104. 24-30) est donc pour l’époque une révolution culturelle.

PATRUM OMNIPOTENTEM / LE PERE TOUT PUISSANT

Paternité divine en contexte juif et chrétien :

Dieu est d’abord défini à la fois comme Père, source de vie, ce qui implique une relation personnelle, et comme Tout Puissant. Dans la Bible, les deux notions sont distinctes.
La question de la paternité divine séparait les chrétiens des juifs : ces derniers reprochaient à Jésus d’appeler Dieu son père (Jean 5.18).

Omnipotence divine

Mais l’omnipotence (toute-puissance) divine était la preuve évidente de la supériorité du Dieu d’Israël sur toutes les autres divinités. C’était un élément essentiel de la foi. Elie en donne une preuve cinglante aux prophètes de Baal (1 Rois 18.20-40).

Paternité divine en contexte païen

Polythéisme et conflits de pouvoir entre  divinités rivales

En revanche, en milieu païen, la paternité divine fait partie de l’héritage culturel et religieux. Comme les humains, les divinités mythologiques grecques et romaines ont des ancêtres et des descendants. Par exemple Jupiter, issu de Saturne, a une nombreuse progéniture…

En même temps, partager la puissance spirituelle entre un grand nombre de dieux rend l’omnipotence impossible. Cela entraîne évidemment le polythéisme avec un conflit inévitable entre clans de dieux rivaux. On se croit obligé d’intégrer tous les dieux imaginables pour ne déplaire à aucun (le Dieu inconnu d’Actes 17) et être protégé contre tous en tous lieux (1 Rois 20.23).
On aurait pu expliciter commodément le mystère du mal par un conflit entre divinités ennemies. Ainsi le dualisme oppose le monde spirituel, de la lumière (= bien) et le monde corporel, matériel (= mal).

Foi chrétienne et confiance en Dieu tout puissant

Mais la foi chrétienne préfère placer sa confiance en Dieu, tout puissant, supérieur à toutes les autres forces spirituelles. Obéissantes ou rebelles, elles lui son de toute façon soumises (Esaïe 45.23, Philippiens 2.10). Ce Dieu tout puissant est parfaitement suffisant pour protéger celui qui l’adore.

Le baptême dans l’Eglise ancienne

Dans l’Eglise ancienne qui a suivi celle du Nouveau Testament, toute personne qui demande le baptême doit d’abord suivre un enseignement de deux ou trois années. Il donnera, pendant ce temps, des preuves de sa fidélité à la foi chrétienne véritable.
On en a le témoignage dans la Didachè, ou « doctrine du Seigneur transmise aux nations par les douze apôtres ». C’est un catéchisme très ancien qui s’appuie sur l’enseignement du Christ,. Il est d’autant plus utile qu’à ce moment-là tous les livres du Nouveau Testament n’étaient pas encore rassemblés.

Pas un texte à réciter, une confession de foi à vivre

Le Symbole des Apôtres n’est pas un texte à réciter par cœur, comme une formule, mais une véritable confession de foi . On montre qu’on a compris les grands points de la vérité biblique et qu’on a été averti contre le paganisme et ses dérives hérétiques.
Ainsi, le jour de Pâques, devant l’Eglise réunie, le futur baptisé déclare que Dieu le créateur de l’univers est son père et aussi son protecteur. Aucun pouvoir étranger n’est capable de le toucher ou de lui nuire contre la volonté divine.

Dieu créateur ex nihilo, à partir de rien, par sa parole

CREATOREM COELI ET TERRAE
CREATEUR DU CIEL ET DE LA TERRE

Cette qualification de créateur n’est pas nouvelle. Personne dans l’Eglise de l’époque ne contestait que Dieu, Tout-puissant, avait créé le ciel et la terre. Mais le credo apporte quelques précisions

Création sans matière pré-existante

Quand Dieu a créé le ciel et la terre, il les a créés par sa Parole, ex nihilo, à partir de rien. Il n’a pas arrangé une matière qui existerait déjà, comme le potier qui façonne des vases à partir d’argile ou le peintre qui exprime son art sur une toile avec des couleurs. Une matière préexistante rendrait nécessaire une puissance créatrice antérieure, donc le dualisme.

Ciel et terre, réalités physiques et symboles spirituels

Le ciel et la terre sont des réalités physiques mais aussi des symboles spirituels. Ils représentent la demeure de Dieu et le monde en rébellion contre lui. Mais il y a risque d’insister sur l’opposition entre monde spirituel bon et monde matériel mauvais. Lier le pouvoir créateur de Dieu à son omnipotence exclut de fait qu’un Dieu inférieur (appelé démiurge) ait créé la matière déclarée mauvaise comme dans le dualisme manichéen ou gnostique.

« Créateur, ciel et terre » : complémentarité entre spirituel et matériel

Réunir dans la même expression « créateur, ciel et terre » exprime la complémentarité entre spirituel et matériel, visible et invisible. Tous deux ont été créés par le même Dieu unique.

Le spirituel n’est pas forcément bon et le matériel n’est pas obligatoirement mauvais. Le conflit entre le bien et le mal a d’abord lieu dans les sphères spirituelles avant d’avoir des conséquences sur le monde matériel.

La perfection divine peut se manifester dans la matière. L’incarnation du Fils de Dieu est donc concevable.

Un credo sur Jésus Christ dans la Trinité

Et in Jesum Christum Filium ejus unicum, Dominum Nostrum

Et en Jésus-Christ son Fils unique Notre Seigneur

Jésus-Christ, Seigneur, d’essence identique à Dieu dans la Trinité

 

Jésus-Christ, Fils unique de Dieu le Père a le statut particulier d’héritier de tout. Il est le seul chemin possible pour conduire à Dieu.

 

Seigneur, DOMINUM, qui traduit YHWH, le nom propre de Dieu dans l’Ancien Testament, lui donne une essence (un être) identique à celle de Dieu dans la Trinité. La foi en Jésus-Christ, Sauveur ne peut être séparée de l’obéissance à Jésus-Christ Seigneur.

Exclusion de deux hérésies : adoptianisme et arianisme

Cela exclut deux hérésies des premiers siècles.

adoptianisme

Jésus aurait été un homme adopté par Dieu comme fils lors de son baptême ou de sa résurrection. Il aurait ainsi acquis un statut céleste.

arianisme

Cette hérésie lui refuse une divinité égale à celle du Père sous prétexte que son engendrement par le Père lui confère une position seconde.

Distinction entre la conception par le Saint Esprit et la  naissance par Marie

Qui conceptus est de Spiritu Sancto, natus ex Maria Virgine 

qui a été conçu du Saint-Esprit, et est né de la vierge Marie 

Le texte de Firmin, plus récent, modifie et complète celui de Rufin  qui disait

 

qui natus est de Spiritu Sancto et Maria Virgine

qui est né du Saint-Esprit et de la Vierge Marie 

En séparant plus nettement la conception par le Saint Esprit et la naissance par Marie, il apporte des précisions fondamentales.

Le Saint Esprit n’est pas le partenaire de Marie dans une sorte d’union spirituelle qui aurait abouti à la conception miraculeuse, virginale du corps de Jésus.

Confession de foi sur l’oeuvre « extérieure » de la Trinité

Une oeuvre commune aux trois personnes

L’œuvre « extérieure » de la Trinité est commune aux trois personnes

« au Père, le pouvoir de créer – Tu m’as préparé un corps – , au Fils celui d’organiser, au Saint Esprit, celui de rendre parfait ».

C’est  la formule d’Abraham Kuyper, un théologien chrétien réformé hollandais du 19e s dans son ouvrage « L’œuvre du Saint Esprit ».

Divinité du Fils par les trois personnes de la Trinité

Ce n’est pas l’Esprit seul qui donne au Fils sa divinité, mais c’est l’ensemble de la Trinité dans ses trois personnes.

Humanité par Marie

Pour son humanité Jésus dépend de Marie. Il tire d’elle sa nature humaine. Elle est unie à sa nature divine, en une seule personne à la fois totalement divine et totalement humaine.

Nature humaine entachée par le péché originel

Mais cette nature humaine, a-t-on dit, est entachée par le péché depuis l’origine. C’est comme une tache congénitale sur l’âme héritée dès la conception et transmise aux générations successives ?

A l’origine, l’homme créé par Dieu est bon naturellement. S’il n’avait pas cédé à la tentation, s’il avait continué à ne pas pécher, il serait resté naturellement fils de Dieu. Il a perdu cette nature bonne à cause du péché originel. Ce dernier n’est pas une tare congénitale mais la rupture de la relation établie par Dieu à la création.

Mais Jésus est sans père humain, donc sans péché

Jésus, lui, n’a jamais péché, car la chaîne de transmission a été rompue. Lhéritage du péché passe par le père et Jésus n’a pas eu de père humain.

Chercher à résoudre la question de la purification du péché chez Marie a conduit à l’idée d’une purification préparatoire au moment de la conception de Jésus puis au dogme relativement tardif de « l’immaculée conception » de Marie elle-même, en 1854.

Une proclamation sur la passion, la mort en croix, la résurrection et l’ascension de Jésus-Christ

La crucifixion ancrée dans l’histoire

Rufin :
QUI SUB PONTIO PILATO CRUCIFIXUS EST ET SEPULTUS

QUI A ÉTÉ CRUCIFIÉ ET ENSEVELI SOUS PONCE PILATE
Pirmin :

QUI PASSUS SUB PONTIO PILATO, CRUCIFIXUS, MORTUS ET SEPULTUS EST 

QUI A SOUFFERT SOUS PONCE PILATE, A ÉTÉ CRUCIFIÉ EST MORT ET A ÉTÉ ENSEVELI

Ponce Pilate, est le seul païen cité dans une confession de foi chrétienne.

Preuve archéologique de l’existence de Pilate


Des fouilles archéologiques en 1961 ont permis de découvrir une pierre avec quatre lignes partiellement effacées.

Elles portent l’inscription de son nom : « Tiberium (empereur de ce moment-là)… Ponce Pilate…préfet de Judée ».

Les événements de la crucifixion sont ancrés dans un contexte historique extérieur à l’Église, ce qui les confirme de fait.

Le texte de Pirmin ajoute des précisions au texte de Rufin, plus ancien Jésus « a souffert, a été crucifié, est mort et a été enseveli ».

Jésus-Christ est réel (contre le docétisme)

Il est évident que Jésus est mort parce que la mort est la conséquence inévitable d’une crucifixion. Mais ce n’était pas admis par tous

Pour le docétisme, Jésus un être céleste sous l’aspect d’un homme

Dès les premiers temps de l’Église, le docétisme (du grec dokeo « sembler ou paraître »), niait que Jésus soit venu sur terre comme un homme véritable.

Selon cette hérésie, c’était un être céleste qui avait pris l’aspect d’un homme. Son incarnation et sa crucifixion n’étaient qu’une apparence. C’est cette hérésie que Jean combat déjà quand il déclare :

« Tout esprit qui reconnaît que Jésus Christ est véritablement devenu un homme vient de Dieu. Tout esprit, au contraire, qui ne reconnaît pas ce Jésus là, ne vient pas de Dieu »

Quelques siècles plus tard, l’islam a prétendu qu’au moment de la crucifixion, il y a eu substitution de personnes et que ce n’est pas Jésus mais un autre qui serait mort sur la croix.

Par ses souffrances et sa mort, identification avec l’humanité

Les précisions sont données aussi pour montrer que par sa souffrance, Jésus a obéi à la volonté du Père. Dans sa mort, il a accompli une identification totale avec l’humanité.

Jésus Christ n’a pas seulement payé la dette du péché, comme le bon samaritain a payé la dette des soins donnés à l’homme qu’il avait secouru.

Devenant lui-même péché par substitution, Jésus a entièrement enlevé par sa mort la dette du péché.

Le texte classique ajoute DESCENDIT AD INFERNA / EST DESCENDU AUX ENFERS

Pas de 2e chance de salut mais la proclamation de la victoire du Christ sur Satan

Cette précision, absente chez Rufin, est l’essai d’interprétation d’un verset difficile, 1 Pierre 3.18, selon lequel Jésus est allé « prêcher aux esprits en prison …qui avaient été incrédules au temps de Noé ».

Littéralement, cette prédication en enfer concernerait seulement ceux qui étaient morts jusqu’à l’époque de Noé mais pas ceux d’après, ce qui pourrait être compris comme une injustice.

Ce verset a été utilisé pour rassurer des chrétiens dans des civilisations du Proche-Orient où le culte des ancêtres avait une forte influence. On ne pouvait envisager qu’un parent décédé puisse être perdu sans avoir eu l’occasion d’entendre de son vivant la prédication de l’Évangile.

Mais ce verset risque aussi de créer un précédent. Jésus aurait prêché après leur mort à des gens qui n’ont pas eu pendant leur vie l’occasion d’entendre l’Évangile, il pourrait donc y avoir une deuxième chance de salut après la mort, comme le prétendent certaines sectes.

Rien ne garantit que ce message « en enfer » soit un message annonçant le salut. C’est plutôt une proclamation de victoire du Christ face à Satan). Rien ne dit non plus que les personnes concernées aient accepté ce message de salut si c’en était un.

Jésus descendant aux enfers est venu signifier sa défaite à Satan définitivement vaincu sur son propre territoire. Le Fils de Dieu s’identifie avec l’humanité. Il choisit d’assumer jusqu’au bout la destinée humaine, jusqu’au passage par l’enfer et jusqu’à la délivrance de l’enfer.

Une véritable résurrection après une mort réelle

Rufin : TERTIA DIE RESSURREXIT A MORTUIS ASCENDIT IN CAELOS SEDET AD DEXTERAM PATRIS

LE TROISIÈME JOUR EST RESSUSCITÉ DES MORTS, EST MONTE AU CIEL, SIÈGE À LA DROITE DU PÈRE

Pirmin précise : DEI PATRIS OMNIPOTENTIS
DE DIEU LE PÈRE TOUT PUISSANT

Toute puissance de Dieu dans la résurrection et la session du Fils à la droite du Père

Pirmin insiste sur la toute puissance de Dieu le Père. La Toute-Puissance est liée à la paternité divine dans la création du monde et l’engendrement du Fils.

Elle se manifeste ici à nouveau pour la résurrection et pour la session céleste du Fils ressuscité à la droite de Dieu le Père.

Pas de mort apparente

Ce véritable retour à la vie a lieu après une mort réelle de trois jours, mais pas plus pour que le corps ne risque pas de disparaître. Ce fait ferme la bouche de ceux qui prétendent que la mort de Jésus ne serait qu’un évanouissement prolongé, une mort apparente.

L’Ascension : le ministère céleste d’intercession et de jugement du Christ

AD DEXTERAM DEI PATRIS OMIPOTENTIS
À LA DROITE DE DIEU LE PÈRE TOUT PUISSANT

Ce sont les paroles de Jésus au grand prêtre lors de sa comparution devant le Grand Conseil juif :

« Vous verrez désormais le Fils de l’homme assis à la droite de la puissance de Dieu…».
L’élévation de Jésus Christ au ciel à l’Ascension est l’accomplissement de la prophétie de Daniel 7. 13 et 14.

Jésus-Christ à la droite de Dieu : ministère d’intercession et règne sur l’univers jusqu’au jugement dernier

L’œuvre du Christ payant pour les péchés de l’humanité ne s’achève pas à la croix. Elle prend sa signification complète au moment de l’Ascension. Le Fils a apporté à son Père le sacrifice qui autorise le pécheur pardonné à entrer dans la présence de Dieu.

Le Fils siège à la droite du Père pour exercer son ministère céleste d’intercession (Romains 8.34).

Il régnera sur l’univers entier jusqu’au jugement dernier « où il remettra le royaume à celui qui est Dieu et Père » (1 Corinthiens 15.24)

Tout jugement remis au Fils

UNDE VENTURUS EST IUDICARE VIVOS ET MORTUOS
D’OÙ IL VIENDRA POUR JUGER LES VIVANTS ET LES MORTS

C’est le Christ qui vient pour juger :
« Le Père ne juge personne, mais il a remis tout jugement au Fils » (Jean 5.22)

Ce jugement concerne tous les humains, les vivants aussi bien que les morts.
« A la dernière trompette, les morts ressusciteront, incorruptibles…et les vivants (nous) seront changés» 1 Corinthiens 15.51-52,

Puis tous seront jugés et seront sauvés dans la présence de Dieu ou perdus loin de lui.

L’affirmation des doctrines sur l’Esprit Saint et la Trinité

CREDO IN SPIRITUM SANCTUM / JE CROIS EN L’ESPRIT SAINT

En répétant « CREDO/JE CROIS, le futur baptisé insiste sur l’affirmation de sa foi dans les trois personnes de la Trinité, le Père, le Fils, l’Esprit Saint.

L’icône de la Trinité

représentation de trois personnes de la Trinité. Icone d’Andrei Rublev

 

La Trinité est illustrée par l’icône dite de la Trinité d’Andrei Roublev. Il s’agit des trois hommes apparus à Abraham au Chêne de Mamré (Genèse 18).Roublev, à la suite des Pères de l’Église, l’interprète comme une figure du mystère de la Trinité indivisible.

La doctrine de l’Esprit-Saint

La doctrine de l’Esprit est affirmée dès les débuts de l’Église. Mais elle sera développée seulement au 4e siècle.

Selon Grégoire de Nysse, un théologien de l’Église ancienne, « il a fallu résoudre la question du Fils avant d’aborder celle de l’Esprit, d’abord expliquer qui est le Fils puis qui est l’Esprit, car l’Esprit est « ambassadeur du Père et du Fils ».

La doctrine du « filioque » (et du Fils)

Le Saint-Esprit procède du Père et du Fils

L’affirmation de Grégoire – « ambassadeur du Père et du Fils » –  annonce la doctrine du « filioque » (« et du Fils »). Elle sera ajoutée au 6e s à la version occidentale du Symbole de Nicée Constantinople, une profession de foi rédigée en grec.

Elle est commune aux trois grandes confessions chrétiennes, le catholicisme, l’orthodoxie et le protestantisme :

Je crois en l’Esprit Saint, qui est Seigneur et qui donne la vie.

Il procède du Père et du Fils. Avec le Père et le Fils, il reçoit même adoration et même gloire; il a parlé par les prophètes.

Doctrine acceptée par les Eglises catholiques et protestantes, rejetée par l’Eglise orthodoxe

La doctrine du « filioque », double procession de l’Esprit, qui émane à la fois du Père et du Fils a été acceptée par l’Église latine (et protestante). Elle a été rejetée par l’Église orientale pour laquelle l’Esprit procède (émane) du Père seul. Ce refus est l’une des causes du grand schisme de 1054 entre l’Église catholique romaine et l’Église orthodoxe.

Croire en l’Esprit saint signifie aussi croire en son oeuvre

Pour le catholicisme, à travers le magistère de l’Église

Pour le catholicisme, l’Esprit agit objectivement à travers le magistère de l’Église, même sans participation consciente ou sans approbation de la personne concernée. Ainsi, le baptême administré à un nourrisson ferait de lui un chrétien. Et si un non croyant participait à l’eucharistie, il recevrait le corps et le sang du Christ par la transformation du pain et du vin opérée par les paroles de consécration.

Pour le protestantisme, dans la transformation du coeur

En revanche, pour le protestantisme, l’œuvre de l’Esprit ne réside pas dans des actes extérieurs mais dans la transformation du cœur.

Entre protestants de diverses obédiences, cette œuvre de l’Esprit est aussi interprétée différemment. Pour les uns, elle se manifeste par des œuvres de puissance, des dons spirituels extraordinaires. Pour les autres, c’est par une conduite et une fidélité dignes de la Parole de Dieu, même sans éclat particulier.

La catholicité de l’Église: la foi universelle « pratiquée partout, par tout le monde dans tous les temps »

Rufin :

SANCTAM ECCLESIAM
LA SAINTE EGLISE

REMISSIONEM PECCATORUM
LA RÉMISSION DES PÉCHÉS

CARNIS RESURRECTIONEM
LA RÉSURRECTION DE LA CHAIR

Pirmin ajoute un développement théologique important

SANCTAM ECCLESIAM CATHOLICAM
LA SAINTE EGLISE UNIVERSELLE

SANCTORUM COMMUNIONEM
LA COMMUNION DES SAINTS

Catholique = universel (pas catholique romain)

Dans le contexte de ce credo complété au 8e s, « catholique » ne signifie pas catholique romain. C’est un mot grec courant, qui veut dire « universel ».

La catholicité de l’Église est définie au 5e s par Vincent de Lérins comme la foi universelle « pratiquée partout, par tout le monde dans tous les temps ».

Elle se manifeste dans l’espace, le temps, et l’histoire.

– dans l’espace :

Les chrétiens convertis de tous les pays sont unis spirituellement par la foi en un même Seigneur. Rassemblés ou non en communautés locales, y compris les chrétiens isolés dans les pays où sévit la persécution, ils participent à la communion des saints de l’église universelle visible et invisible

– dans l’histoire :

La doctrine de la foi repose sur Jésus-Christ, pierre angulaire. Il fonde la foi et unit les croyants. La vie de l’Église se construit sur la base de l’enseignement des apôtres et prophètes (Ephésiens 2.20).

Cela exclut donc l’ajout de dogmes ou systèmes particuliers aux sectes. Cela devrait aussi empêcher le détournement de vérités qui pourraient être gênantes pour la raison ou la sensibilité de l’homme moderne. Ainsi  l’enfer, séparation éternelle d’avec Dieu remplacé par l’anéantissement des âmes condamnées.

– dans le temps :

La rédaction de la Bible s’est achevée dans les premiers siècles de notre ère. Elle reste toujours pertinente aujourd’hui. Dans ses principes et ses vérités illustrés par des exemples, elle répond aux interrogations universelles de l’homme sur son origine et sa destinée : qui je suis, d’où je viens, quelle sera ma destinée ?

La rémission des péchés, au centre de la vie chrétienne.

REMISSIONEM PECCATORUM
LA REMISSION DES PECHES

Toute nouvelle naissance, début de la vie chrétienne doit passer par cette étape. Reconnaître que l’on est pécheur, y compris dans la pensée et l’intention (les paroles de colère qui « tuent »), et que l’on mérite la mort que Jésus a subie à notre place.

Jésus-Christ a non seulement acquitté la dette juridique du péché, pour satisfaire à la justice divine. Il a aussi réconcilié avec Dieu ceux qui se savent pécheurs et lui demandent pardon et réconciliation (2 Co 5.18-19).

En conséquence, la parole du pardon doit être proclamée dans l’Église. Il faut en informer en particulier ceux qui croient avoir commis le péché impardonnable ou ceux que la mort de parents a privés de la possibilité d’apurer les conflits.

La résurrection de la chair: celle des corps dans le royaume céleste

CARNIS RESURRECTIONEM ET VITAM AETERNAM
LA RESURRECTION DE LA CHAIR ET LA VIE ETERNELLE

Le symbole des Apôtres se termine par une confession de foi en la vie éternelle

La résurrection de la chair, c’est celle des corps (faits de matière) dans le royaume céleste. Ce n’est pas le corps tel quel, corruptible, incapable d’hériter le Royaume de Dieu (1 Cor 15.50. C’est le corps mystérieusement transformé et rendu capable d’entrer et de séjourner dans la vie éternelle (2 Co 3.18).

C. Streng

Dans les jours sombres, croire en la résurrection ?

Croire en la résurrection alors que tout pousse au désespoir

En lisant les Evangiles à propos du jour de Pâques, le jour de la résurrection du Christ, on est frappé de l’atmosphère qui règne parmi les disciples ce jour-là : une profonde tristesse qui va peut-être jusqu’au désespoir.

D’abord ils ont perdu leur Maître, crapuleusement assassiné par les autorités. Avec lui sont morts tous les espoirs qu’ils avaient fondés sur lui. Et voilà maintenant que même son corps a disparu. Ils avaient à peine commencé à faire leur deuil et déjà tout se complique et s’aggrave encore. On est à mille lieues du triomphe qu’un examen superficiel aurait attendu.

Et pourtant la journée si sombre finira brusquement dans une joie débordante : celle qui fait croire en la résurrection

Qu’est-ce qui a provoqué ce complet retournement de la situation ?

 Luc 24 : 13-35.

Et voici, ce même jour, deux disciples allaient à un village nommé Emmaüs, éloigné de Jérusalem de soixante stades; et ils s ‘entretenaient de tout ce qui s’était passé.Pendant qu’ils parlaient et discutaient, Jésus s’approcha, et fit route avec eux.Mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître.

Il leur dit: De quoi vous entretenez -vous en marchant ?

Et ils s’arrêtèrent, l’air attristé. L’un d’eux, nommé Cléopas, lui répondit: Es -tu le seul qui, séjournant à Jérusalem ne sache pas ce qui y est arrivé ces jours ? -ci-

Quoi ? leur dit -il.

-Et ils lui répondirent: Ce qui est arrivé au sujet de Jésus de Nazareth, qui était un prophète puissant en oeuvres et en paroles devant Dieu et devant tout le peuple, et comment les principaux sacrificateurs et nos magistrats l’on livré pour le faire condamner à mort et l ‘ont crucifié. Nous espérions que ce serait lui qui délivrerait Israël; mais avec tout cela, voici le troisième jour que ces choses se sont passées.

Il est vrai que quelques femmes d’entre nous nous ont fort étonnés; s’étant rendues de grand matin au sépulcre et n’ayant pas trouvé son corps, elles sont venues dire que des anges leurs sont apparus et ont annoncé qu’il est vivant. Quelques-uns de ceux qui étaient avec nous sont allés au sépulcre, et ils ont trouvé les choses comme les femmes l’avaient dit; mais lui, ils ne l’ont point vu.

Alors Jésus leur dit:

O hommes sans intelligence, et dont le coeur est lent à croire tout ce qu’ont dit les prophètes ! Ne fallait -il pas que le Christ souffre ces choses, et qu’il entre dans sa gloire. Et, commençant par Moïse et par tous les prophètes, il leur expliqua dans toutes les Écritures ce qui le concernait.

Lorsqu’ils furent près du village où ils allaient, il parut vouloir aller plus loin. Mais ils le pressèrent, en disant: Reste avec nous, car le soir
approche, le jour est sur son déclin.

Et il entra, pour rester avec eux. Pendant qu’il était à table avec eux, il prit le pain; et, après avoir rendu grâces, il le rompit, et le leur donna. Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent; mais il disparut de devant eux.

Et ils se dirent l’un à l’autre: Notre coeur ne brûlait -il pas au-dedans de nous, lorsqu’il nous parlait en chemin et nous expliquait les Écritures ?
Se levant à l’heure même, ils retournèrent à Jérusalem, et ils trouvèrent les onze, et ceux qui étaient avec eux, assemblés et disant: Le Seigneur est
réellement ressuscité, et il est apparu à Simon. Et ils racontèrent ce qui leur était arrivé en chemin, et comment ils l ‘avaient reconnu au moment où il rompit le pain.

Les événements du dimanche de la résurrection

De sombres jours

C’était déjà le 3e jour sans le Maître, avec qui ils avaient partagé le quotidien pendant plus de trois ans. Désemparés, ils ne savaient plus que faire de leur temps, ni d’eux-mêmes. La matinée s’annonçait aussi sombre que la veille et dans la chambre haute il devait régner un silence lourd, malgré le nombre des personnes réunies là.

Ils restaient enfermés par peur des autorités. Celles-ci, après avoir éliminé le Maître, devaient certainement chercher à faire de même des disciples, pour mettre fin à ce mouvement si gênant qui les avait tant exaspérées.

Des faits déconcertants

Très tôt Marie de Magdala était partie avec deux autres femmes rendre les honneurs funéraires au corps du Seigneur. Mais elles étaient rentrées prématurément, avec encore une nouvelle accablante : on a enlevé le corps du Seigneur !

Bien sûr, Marie avait ajouté d’importants détails (v.23), mais ça, on l’avait à peine entendu ; de toute façon on n’a pas l’habitude d’accorder grand crédit à ce que dit une femme.

Résultat : ces femmes les ont déconcertés (v.22). Ils entendent la nouvelle la plus formidable qui soit, mais par une femme, alors elle tombe à plat. Pire, elle ajoute au désarroi ! La nouvelle la plus libératrice qui soit, reçue sans foi, laisse indifférent et peut même augmenter le trouble.

Curieux, comme nos oreilles peuvent être sélectives quand un fait biblique leur parvient ! Et pourtant Marie, il y a longtemps qu’ils la connaissaient comme une personne sérieuse, fiable.

Au cours de la journée deux de ces disciples s’en retournent tout tristes (v.17) chez eux, à Emmaüs, à 12 km de Jérusalem. En effet leur espoir que ce serait Lui qui restaurerait Israël (v. 21) est désormais anéanti et ils n’ont donc plus rien à faire en ville.

En chemin ils rencontrent un étrange rabbin inconnu qui leur donne un cours d’instruction biblique comme ils n’en avaient entendu qu’avec leur Seigneur. Leur cœur en devient tout brûlant en eux. Mais ça ne va pas plus loin, sauf que pour en apprendre encore plus, ils l’invitent à passer la nuit chez eux. C’est la fin de cette triste journée !

Convaincus de la résurrection

Pas du tout : peu après, alors que la nuit est tombée, voilà que les deux ressortent, tout joyeux, complètement transformés et pressés d’avaler en sens inverse les 12 km vers Jérusalem. Or un juif normal évitait de voyager à pied de nuit.

Eux n’ont qu’un souci : retrouver leurs amis dans la chambre haute (v. 33). Ceux-ci aussi n’étaient plus du tout les mêmes. Plus de tristesse, ils étaient tout excités et disaient tous : « Le Seigneur est réellement ressuscité et il s’est montré à Simon » (v.34.)

Tous, à présent, sont convaincus que le Seigneur est ressuscité ! Mais comment sont-ils donc parvenus à cette certitude ? Qu’est-ce qui a été décisif pour les convaincre ?

Qu’est ce qui convainc ?

D’abord deux affirmations fondamentales : la 1re nous est familière, mais a besoin d’être approfondie ; la 2e peut surprendre à première vue.

1. Les miracles ne convainquent pas à eux tout seuls.

Ils étonnent, remplissent d’admiration ou d’enthousiasme, mais ne font pas changer de position spirituelle. Les amis de Jésus dans la chambre haute ont entendu les trois femmes annoncer la résurrection et ça n’a rien changé.

Pierre, lui, est allé au tombeau, il l’a vu déserté par les gardes romains et vide. Il y est entré (Jean 20) et il a surtout vu la disposition très particulière des bandelettes de Jésus puis il est reparti, consterné, mais il n’a pas cru.

Les ennemis de Jésus avaient vu Lazare sortir de son tombeau, empêtré dans ses bandelettes. Tout ce que cela leur a inspiré, c’est l’urgence d’éliminer à la fois Lazare le ressuscité et Jésus qui l’a ramené à la vie, comme des preuves vraiment trop gênantes.

Au mont Carmel tout Israël a vu l’intervention sensationnelle de Dieu lui-même sur la demande d’Elie. C’était tellement évident qu’ils ont alors tous proclamé : « C’est l’Eternel qui est Dieu ! » Une démonstration absolument unique et exaltante ! Mais le lendemain chacun est retourné à ses pratiques païennes habituelles (1 Rois 18).

2. Ce qui est beaucoup plus inattendu, c’est que la Parole de Dieu ne convainc pas non plus à elle seule.

Quel meilleur professeur de théologie peut-on souhaiter que Jésus lui-même ? Pendant peut-être une heure et demie sur la route d’Emmaüs les deux disciples ont écouté un cours fondamental par le Seigneur. Du sérieux et leur cœur en était tout transporté, mais ce n’est pas allé plus loin.

Plus étonnant encore : aux v. 19-24 les deux hommes expliquent à leur mystérieux compagnon ce qui les rend si tristes : en quelques mots ils exposent l’essentiel de l’Évangile, la résurrection y comprise ! Voilà ce qui les désespère tant ! Même le Sermon sur la Montagne n’a pas seulement été entendu par les disciples, mais par tous ceux qui étaient là, y compris ceux qui allaient devenir, quand même, ses ennemis. Ils en ont été frappés, impressionnés, sans plus. Aujourd’hui certains diraient : « C’était un beau sermon » ; « Il a bien parlé ».

Bien loin de se laisser séduire par ce genre d’enthousiasme, Jésus s’en méfiait et le fuyait.

Un miracle ne trouve tout son sens que mis en correspondance par la foi avec la Parole : voyez la réflexion de Jean devant le tombeau : Jean 20.8-9.

Alors l’autre disciple, qui était arrivé le premier au sépulcre, entra aussi; et il vit, et il crut. Car ils ne comprenaient pas encore que, selon l’Écriture, Jésus devait ressusciter des morts.

Et cette Parole doit être centrée sur Jésus : les yeux des deux hommes se sont ouverts (v. 31) quand ils ont réalisé que tout ce que le mystérieux rabbin leur avait expliqué non seulement concernait Jésus, mais se concentrait sur la mort et la résurrection de Jésus-Messie de Dieu, une résurrection prouvée sous leurs yeux par la manière si caractéristique et si personnelle de leur Maître de rompre le pain. Honnêtes devant Dieu et avec eux-mêmes, ils ont cru, ils ont accueilli le don de la foi et en ont été transformés en profondeur.

Retenons donc ceci : l’aspect décisif de l’évènement de Pâques, c’est cette mise en correspondance par la foi des annonces prophétiques par l’Ancien-Testament et par Jésus lui-même avec sa mort et sa résurrection.

Voilà ce qui convainc et libère de leur désarroi les deux disciples à Emmaüs et les 120 à Jérusalem , voilà ce qui provoque leur témoignage courageux. Si l’Écriture ne nous donne pas le sens de la mort et de la résurrection de Jésus, la mort et la résurrection de Jésus ne nous donnent pas le sens de l’Écriture. Mais les deux mises ensemble, l’une comme explication de l’autre, forment le message de la Bonne Nouvelle qui a révolutionné le monde et qui garde toute sa puissance pour le faire encore.

Insistons sur ce point : ce qui dans l’œuvre de Jésus doit être particulièrement mis en relation avec l’Écriture, c’est sa mort et sa résurrection. C’est le scandale intolérable du christianisme : Dieu a accepté de mourir et en mourant il a fait éclater la réalité et l’horreur du péché. Et ceux qui se scandalisent ainsi, ne veulent pas voir/ croire que ce même Messie mort est aussi ressuscité, qu’il est vivant aujourd’hui, le vrai Maître du monde et son prochain juge.

Les foules aiment un Messie qui multiplie le pain, guérit des malades et ressuscite des morts. Elles seraient enchantées de pouvoir faire d’un tel homme leur roi. Or Jésus a refusé une telle carrière parce qu’au-delà des besoins matériels, bien légitimes des hommes, il visait le problème spirituel fondamental du péché que lui seul pouvait régler et dont la solution peut seule changer l’existence humaine.

Et quand Jésus est arrivé tout près du but de tout son ministère, quand il est accusé par les autorités devant Pilate, les mêmes foules n’ont apparemment pas de mal à crier : « Crucifie, crucifie ! »

Le christianisme, la vraie religion ?

N’est-ce pas la conclusion logique de tout ce qui précède ? Eh bien, quitte à vous surprendre encore : pas du tout et surtout pas ! Non parce que son enseignement serait faux, mais parce qu’il n’y a qu’une vérité, la Bible et que la Bible condamne comme menteuses ou trompeuses toutes les religions, y compris et surtout les formes religieuses du christianisme.

Et qu’est-ce donc qu’une religion ? C’est un mot sur la définition duquel les spécialistes se battent depuis toujours. Pour être simple, quitte à manquer de nuances, on peut dire que c’est un système de spiritualité intellectuelle et pratique dans lequel la révélation biblique a entre 0 et 99 % de place. 0 %, c’est la multitude des religions, dont certaines passent pour très respectables, mais d’où la vérité biblique est totalement absente. 99 % ou moins, ça peut être ma propre foi si je laisse à la pensée humaine un tant soit peu d’autorité à côté ou au-dessus de celle de Dieu. A titre d’exemple voici une définition de la grâce : la grâce est le couronnement des efforts que l’homme fait pour être sauvé ! C’est subtil, mais un poison violent.

Dans l’esprit des gens qui pratiquent une religion, il y a un nombre de choses à faire et quantité de choses à éviter de faire et alors Dieu leur est favorable il les bénit et ils peuvent obtenir de lui ce qu’ils désirent.

C’est ainsi que fonctionnent les amis de Job : Job 11.13-18. Dans un tel système marchand l’homme accepte de payer le prix qui lui est demandé, en argent, en efforts ou en sacrifices et il se croit alors en droit d’attendre de Dieu ce qu’il lui demande. C’est ce que signifie, par la négative, une exclamation telle que : « Qu’est-ce que j’ai fait au bon Dieu pour qu’il me traite ainsi ? »

Au Carmel les prêtres de Baal ont fait tous les rites, les danses sacrées nécessaires pour que Baal fasse pleuvoir, lui, le dieu des orages. Ils ont même ajouté des incisions sur leur corps pour être sûrs de le convaincre et voilà qu’il ose ne rien faire ! Face au Dieu véritable le système religieux se bloque. Elie, lui, ne pratique aucun sport religieux, aucun rite, aucune formule magique. Il compte sincèrement sur son Dieu, il l’appelle et reçoit un exaucement qui dépasse sa propre attente.

Normalement le dieu d’une religion fait ce que l’homme attend de lui. Autrement dit l’homme sait comment son dieu pense ; le mode de pensée de l’un est le même que celui de l’autre.

Esaïe dit exactement le contraire à propos du Dieu véritable :

Esaïe 55.8-9

Car mes pensées ne sont pas vos pensées, Et vos voies ne sont pas mes voies, Dit l’Éternel. Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, Autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies, Et mes pensées au-dessus de vos pensées.

Paul tient le même langage :

1 Corinthiens 2.9-10

Mais, comme il est écrit, ce sont des choses que l’oeil n’a point vues, que l’oreille n’a point entendues, et qui ne sont point montées au coeur de l’homme, des choses que Dieu a préparées pour ceux qui l ‘aiment. Dieu nous les a révélées par l’Esprit. Car l’Esprit sonde tout, même les profondeurs
de Dieu.

On peut citer des prêtres païens, mais les autorités religieuses juives qui méprisent souverainement les adorateurs d’idoles, ont pourtant la même mentalité. Selon leurs conceptions le Messie viendra revêtu de la puissance de Dieu restaurer la gloire ancienne du royaume de David et expulser l’occupant romain.

Or Jésus a refusé tout au long de son ministère tout ce que les conceptions religieuses juives voulaient qu’il devienne ou fasse comme Messie humain . Et c’est pour ce refus qu’on l’a assassiné.

Le diable lui-même fonctionne de cette façon. « Si tu es le Fils de Dieu, ordonne que ces pierres… » Le Fils de Dieu n’a pas de raison d’être limité par la condition humaine générale ; il a des avantages dont il peut librement profiter.

Les promoteurs de la théologie de la prospérité vivent dans un luxe choquant sur le dos des adeptes qu’ils exploitent sous prétexte qu’un enfant de Dieu ne doit pas être pauvre. Le Vatican a toujours considéré que le vicaire du Christ sur terre devait vivre dans un faste digne de Dieu.

Dans une religion il y a des miracles, des apparitions célestes, des signes extraordinaires, considérés comme autant de preuves. Inutile de s’attarder à la foule de miracles qu’on peut appeler absurdes, parce qu’ils ne sont faits que pour épater les naïfs : du sang coagulé qui redevient liquide, le soleil qui fait des pirouettes, une prétendue vierge qui apparaît à des enfants.

Parlons plutôt des miracles religieux centrés sur Jésus : « Maître, nous voudrions te voir faire un miracle » = organise nous un beau spectacle religieux. « Si tu es le Fils de Dieu, lance-toi dans le vide » du haut du Temple = tu auras pour
toi la confirmation éclatante que tu es bien le Fils de Dieu et surtout les gens seront bien obligés de croire en toi. Obligés de croire ! Ou encore plus incontournable : « Si tu es le Fils de Dieu, descends de la croix…

C’est là qu’on touche à la différence la plus définitive entre les religions, même chrétiennes, et la révélation biblique. C’est là que se révèle le caractère bassement humain de toute religion, même si elle se prétend révélée. Tôt ou tard, et souvent très vite, la religion, comme les idéologies politiques, tombent dans la tentation de forcer les gens à croire et donc de persécuter et même de martyriser ceux qui n’ont pas choisi librement de croire en elle.

Il faut oser faire cette double affirmation : Tout système qui se permet d’utiliser la force, la violence, la persécution pour se faire des adeptes, prouve par là qu’il n’est qu’humain, misérablement humain, quels que soient les oripeaux sacrés sous lesquels il déguise cette origine.

Ensuite un système qui a besoin de la violence pour s’imposer, prouve par là qu’il ne croit pas en lui-même, en sa pertinence, en sa solidité, et surtout qu’il a peur, consciemment ou non, peur de s’écrouler, s’il n’a pas recours à la force pour se maintenir.

A tout cela s’opposent deux autres faits centraux de la Bible. D’abord Jésus n’a jamais utilisé, ni permis ou recommandé d’employer la force pour répandre ou sauvegarder l’Évangile. Dans son histoire l’Église dite chrétienne a osé le faire et certaines confessions s’y lancent allègrement de nos jours. Que Dieu en ait pitié ! Ensuite Dieu aime l’homme, sa créature ; il respecte ses choix, quels qu’ils soient et il ne veut de relation que volontaire, librement choisie et cultivée par l’homme.

Toutes ces suggestions, tentations soufflées à Jésus par l’esprit religieux pour obliger les hommes à croire en lui, il les a rejetées. A cause de cela la religion déçue, exaspérée l’a assassiné. Mais la croix sur laquelle la religion s’est vengée de lui, cette croix a scellé la mort de la religion.

La merveille de Pâques, ce n’est pas le miracle de ceux qui prétendent que le Fils de Dieu aurait au dernier moment été remplacé par un autre et aurait ainsi échappé à la mort. Le miracle de Pâques, c’est que Jésus a affronté franchement Satan et la mort et la religion et le péché. Il les a vaincus et l’a prouvé par sa résurrection.

Et pour quiconque croit en la résurrection, cette victoire le libère du visage terrifiant de la mort en lui ouvrant la vie éternelle, elle le libère du péché pour lequel le pardon est offert et qui n’est plus une fatalité incontournable. Elle le libère de la religion où l’homme reste seul dans son légalisme, face à une divinité silencieuse.

Désormais il est aimé comme son enfant par Dieu et son Fils qui viennent faire leur demeure en lui et qui l’accueillent dans la famille de l’Église. Le chrétien n’est pas un « esclave » mais un enfant de Dieu libre, parce que si le Fils affranchit quelqu’un, celui-ci est réellement libre. Libre et aimé, libre parce qu’aimé, ce qui le conduit naturellement à vouloir servir Dieu, par choix et non par obligation.

Ce respect du Créateur pour sa créature, son refus de toute autre relation avec elle qu’une relation fondée sur l’amour et cultivée dans la confiance, c’est aussi ce que la foi biblique a de plus noble et de plus contraire à la religion.

C’est la résurrection qui ouvre et garantit à l’homme cette nouvelle perspective de vie avec son Créateur, dès ici-bas sur terre et dans l’éternité, auprès de lui. Le tentateur offre à l’homme la religion avec le légalisme, l’incertitude quant à l’avenir et l’angoisse de la mort. Le Ressuscité apporte et garantit au pécheur repentant le pardon, la paix intérieure, la liberté, la joie d’être aimé et d’aimer en retour. Tout cela sans fin.

J.J.Streng