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Actes prophétiques du Christ avant la Passion

Trois actes prophétiques du Christ : la résurrection de Lazare, l’entrée à Jérusalem, la purification du Temple

Au moment de son arrivée définitive à Jérusalem, avant la passion, Jésus-Christ va poser trois actes prophétiques. Ils sont témoins de la réalité du royaume de Dieu en sa propre personne : la résurrection de Lazare, l’entrée triomphale à Jérusalem et la purification du Temple.

Thèmes de la littérature juive et de la prophétie de Zacharie père de Jean-Baptiste

La littérature juive à propos du royaume présente trois thèmes principaux que l’on retrouve dans la prophétie de Zacharie, père de Jean-Baptiste:

Zacharie, son père, fut rempli du Saint-Esprit, et il prophétisa, en ces mots : Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël, de ce qu’il a visité et racheté son peuple, et nous a suscité un puissant Sauveur dans la maison de David, son serviteur. (Luc 1.67-69).

Le premier est l’espoir eschatologique que Dieu interviendra dans les affaires des hommes ; le second, que la restauration de la puissance politique d’Israël sera accomplie par Dieu à travers un roi descendant de David, le troisième est la croyance en la résurrection des morts et dans un « Fils de l’Homme » compris comme un Messie surnaturel.

Jésus-Christ donne une dimension spirituelle élargie à cette conception limitée du royaume. Il enseigne et va prouver dans la réalité que l’espoir de l’Ancien Testament est accompli dans sa propre personne et dans sa mission, et pas seulement pour Israël mais pour toute l’humanité.

La résurrection de Lazare, accomplissement l’un des thèmes prophétiques du royaume

Cathédrale d’Uzès; Résurrection de Lazare, Simon de Châlon 1550

La résurrection de Lazare est une illustration ou application de cet accomplissement des thèmes prophétiques du royaume promis.

Ce n’est pas la première résurrection des Évangiles. Il y a eu celle du fils de la veuve de Naïn (Luc 7.11-15) et celle de la fille de Jaïrus (Marc 5.21-43).

Quand le Christ promet à Marthe la résurrection de son frère, ce n’est pas, comme elle le pense pour la fin des temps, mais pour l’immédiat.

En lui disant : « Je suis la résurrection et la vie » (Jean 11.25), il se présente comme ce Fils de l’Homme. Il réalise effectivement cette résurrection des morts, pas dans le futur, mais au moment même. Marthe ne s’y trompe pas. Elle déclare alors qu’il est le Christ, c’est à dire le Messie.

La réaction des chefs juifs

Les chefs juifs non plus d’ailleurs ne s’y trompent pas, mais à une autre niveau. Informés de la résurrection de Lazare, ils organisent rapidement une réunion du sanhédrin. Ils ne mettent pas en doute la réalité du miracle. Ils veulent prendre les mesures qu’ils pensent nécessaires pour juguler un danger qu’ils croient imminent.

Si la population reconnaît Jésus comme roi d’Israël, ils risquent de perdre leur crédit auprès d’elle (tous croiront en lui). Cela pourrait aussi susciter une réaction violente de Rome contre la ville et la nation (Jean 11.46-48). Caïphe alors prophétise, sans en comprendre vraiment la portée, que Jésus doit mourir. Mieux vaut le sacrifice d’un seul homme que celui de toute une nation.

C’est pourtant le plan de Dieu lui-même qu’il annonce malgré son incroyance et son rejet de Jésus : Celui-ci va mourir pour la nation entière et par cette mort, beaucoup trouveront la vie éternelle.

La résurrection de Lazare est ainsi une étape qui prépare le triomphe de Jésus auprès de la foule lors de son entrée à Jérusalem.

Entrée triomphale à Jérusalem

L’entrée triomphale du Christ à Jérusalem est le deuxième acte prophétique : Il entre dans la ville de manière officielle, comme le roi davidique que Dieu a chargé de restaurer la puissance politique d’Israël.

Une entrée comme celle des rois Macchabée

Entrée de Jésus à Jérusalem – Lippo Memmi

Le Christ apparaît comme Simon Macchabée, « entré à Jérusalem en triomphe, avec des acclamations et des palmes » (1 Macchabée 13.51), ou comme Juda Macchabée devant lequel « le peuple, portant… des rameaux verts et des palmes, fait monter des hymnes… » (2 Macchabée 10.7) [1]

Le parallèle est saisissant : rien n’y manque, ni les rameaux, ni même les vêtements jonchant le sol pour servir de tapis, ni surtout les acclamations de la foule tirées du Psaume 118. Le psalmiste rappelle qu’Israël est entouré d’ennemis mais compte sur la protection de Dieu pour sa délivrance.

Pas d’illusions sur les acclamations de la foule

Jésus ne refuse pas ces acclamations mais il en limite la portée immédiate : il ne sera pas le roi guerrier, conquérant qui va chasser les Romains. D’ailleurs, il est monté sur un âne et non sur un cheval.

Mais il ne se fit aucune illusion sur la profondeur des sentiments de la foule. Elle désire que Jésus soit son roi, mais de la même manière que les Galiléens voulaient le faire roi après la multiplication des pains. C’est pour cela aussi qu’il pleure sur la ville, sachant les malheurs qui l’attendent. Il dessèche aussi le figuier pour montrer symboliquement le dessèchement qui attend la nation.

La foule est donc déçue et les autorités politiques de Jérusalem sans doute irritées ou inquiètes : « voici, le monde est allé après lui » (Jean 12.29). Elles craignent de perdre leur crédit auprès du peuple (Matthieu 23.15) et aussi une réaction violente du pouvoir romain.

La purification du Temple

Le dernier acte prophétique du Christ, le plus significatif est la purification du Temple. Il va avoir lieu dans la cour du Temple de Jérusalem. Il constituera un des principaux chefs d’accusation pour le sanhédrin.

Jésus chasse les marchands du lieu réservé à la prière des non Juifs

Jésus chassant les marchands du Temple

Jésus pénètre dans le seul endroit du Temple où les non Juifs, attirés par le monothéisme et la religion juive ont le droit de se tenir pour adorer Dieu. I

l se met à chasser ceux qui vendaient leur disant : « Il est écrit: Ma maison sera une maison de prière. Mais vous, vous en avez fait une caverne de voleurs » (Marc 11.17, cf. Matthieu 21.12-13)

Cette cour est réservée à l’adoration des païens. Elle mesure 450 mètres sur 300. Le marché du temple occupe une bonne partie de la surface. Marchands d’animaux, changeurs d’argent et foule se pressent. Et au moment des fêtes de la Pâque, il y a plusieurs centaines de milliers de personnes.

Une maison de prière pour toutes les nations

Jésus chasse donc les marchands les animaux, et les acheteurs. Ils occupent le peu de place réservée aux adorateurs d’origine païenne. Ceux-ci n’ont pas le droit de dépasser la cour extérieure. Ils n’ont donc pas d’autre choix que de prier au milieu de la foule, des animaux et du brouhaha.

Marc 11.17 Ma maison sera appelée une maison de prière pour toutes les nations reprend Esaïe 56.6-7 :

Et les étrangers qui s’attacheront à l’Éternel pour le servir, Pour aimer le nom de l’Éternel, Pour être ses serviteurs, Tous ceux qui garderont le sabbat, pour ne point le profaner, Et qui persévéreront dans mon alliance, Je les amènerai sur ma montagne sainte, Et je les réjouirai dans ma maison de prière; Leurs holocaustes et leurs sacrifices seront agréés sur mon autel; Car ma maison sera appelée une maison de prière pour tous les peuples.

Ce texte d’Esaïe annonce que les étrangers seront acceptés dans le Temple au moment où le Seigneur ramènera son peuple de l’exil.

Le geste de Jésus montre qu’il désapprouve l’attitude d’ Israël : le peuple de Dieu a perdu de vue sa mission de témoignage en faveur de tous les peuples.

La fin du verset « vous en avez fait un repaire de brigands » cite le verset 7 de Jérémie 11 avertissant ses compatriotes. Il se résume ainsi :

Le temple n’a pas un pouvoir magique, ce n’est pas un fétiche qui permet de faire n’importe quoi (v.4 de Jérémie). Si on ne conforme pas sa conduite aux exigences de Dieu, ce n’est pas la peine de venir adorer au temple.

En effet, Jérusalem et le temple seront détruits en 587 avant J.-C. par Nabuchodonosor et le peuple d’Israël emmené en exil à Babylone. C’est donc un avertissement de Jésus à ses propres compatriotes.

Le commerce du Temple, nécessaire mais abusif

Jésus réagit sans doute aussi contre les abus du commerce dans cette cour du Temple.

Au moment de la Pâque, chaque adorateur doit obligatoirement payer un impôt annuel d’un demi-sicle (Exode 30.13). Celui-ci pèse environ 6 grammes d’argent, dans la monnaie spéciale du Temple, la seule acceptée.

Le fidèle doit donc échanger son argent sur place. Il lui faut aussi offrir un animal (agneau, pigeon) en sacrifice. Pour des gens venus de loin, c’est plus facile de l’acheter à l’endroit même.Ceux qui amènent leur propre animal doivent le faire authentifier officiellement et cela coûte cher.

L’argent était échangé à un taux exorbitant. Les animaux vendus ou authentifiés au prix fort. Ce commerce était un monopole des prêtres qui en tiraient un revenu considérable.

Selon certains commentateurs, Jésus procède à cette expulsion pour rendre à l’adoration des non Juifs cette partie de la cour occupée par les animaux, les marchands et la foule des acheteurs. Il veut  permettre au Temple d’être une maison de prière pour tous les peuples (Marc 11.17); ou alors le réserver à une pure et véritable adoration de Dieu.

Mais dans les conditions de l’époque, le marché du Temple était nécessaire à l’exercice du culte. Il permettait d’acquitter sur place l’impôt du temple qui exigeait un change et de se procurer les animaux destinés aux sacrifices. L’adoration au Temple n’a jamais été exempte des abus du commerce lié à l’obligation de se procurer des animaux pour les sacrifices

Une remise en cause du culte sacrificiel ?

Jésus remettait-il en cause dans son principe tout le culte sacrificiel du Temple. Il savait bien que les sacrifices étaient ordonnés par Dieu, que cela exigeait une certaine part de commerce. Il était conscient aussi que son geste pouvait passer pour une attaque contre les sacrifices ordonnés par Dieu, donc contre le culte lui-même.

Un acte prophétique de la destruction du Temple en 70

Les paroles du Christ dites en privé aux disciples « Il ne restera pas pierre sur pierre… » (Marc 13.1) complètent son geste. Ce ne sont pas des paroles de menace mais d’avertissement. Elles rappellent celles qu’il a prononcées lors de la première purification du Temple (Jean 2.18-22). Les Juifs de Jérusalem le comprennent d’ailleurs au sens littéral du Temple d’Hérode.

En fait Jésus parle de lui-même et il met l’accent sur sa mort et sa résurrection (Jean 2.19). Ce sont ces paroles, transformées, qui seront utilisées plus tard pour l’accuser devant le sanhédrin (Marc 14.58 par.; cf. Marc. 15:29).

L’action de Jésus est un acte prophétique. Sous les apparences d’une justice immédiate, elle symbolise la future destruction du Temple en 70. Interprétée comme un symbole de destruction, elle concorde avec les paroles  de Jésus. Il a explicitement annoncé la ruine future du sanctuaire (Matthieu 24.2 Mc 13.2 Luc 19.44; 21.6). Cet acte de Jésus est bien prophétique, mais à l’inverse de l’espérance apocalyptique. Ce n’est pas la restauration de la puissance d’Israël mais sa destruction et celle du Temple qu’il annonce ici.

Un élément déterminant pour l’arrestation du Christ

L’épisode au Temple est probablement un des éléments déterminants pour l’arrestation de Jésus. Il constitue une provocation, non seulement pour les dirigeants, les prêtres, mais aussi, pour tous ceux qui considéraient le sanctuaire comme le lieu approprié où le croyant pouvait offrir les sacrifices ordonnés par Dieu pour le pardon des péchés.

Parler contre le Temple, prophétiser sa destruction était considéré comme un blasphème et conduisait à des sanctions, au moins à la menace de mort (Jérémie 26).

Il est vrai qu’on n’a vu intervenir, ni la garde du Temple, ni la troupe romaine en faction à la forteresse Antonia pourtant toute proche. Il y aurait eu seulement quelques tables renversées…

Le climat d’une période de fêtes comme celle de la Pâque, avec un très grand nombre de pèlerins était effervescent. Il y avait occasion pour des militants nationalistes, de tendance zélote, d’organiser un coup de force. Avec la surveillance des troupes romaines prêtes à intervenir à la moindre manifestation de désordre, il est certain que l’action de Jésus a provoqué l’exaspération des chefs et a conduit à son arrestation.

  1. Les livres Apocryphes de l’Ancien testament ne sont pas inspirés mais ils contiennent des renseignements historiques utiles.

C.Streng

 

Mort et résurrection de Lazare – Jean 11

Jésus face à la mort de Lazare

De tous les incidents qui ont rempli le quotidien de Jésus, les évangélistes n’ont retenu qu’un petit nombre, les plus significatifs de la condition humaine. Ainsi, Jésus fait face au scandale suprême, à la mort. Et c’est la mort de Lazare, un de ses rares vrais amis.

Cet évènement marque d’autant plus Jésus qu’il le place aussi face à l’immense douleur des deux sœurs de son ami, qu’il aime tout autant. Si Jean consacre un long chapitre à cet épisode, c’est qu’il y a là beaucoup d’aspects à nous faire méditer.

Lire  Jean  11

1. Jésus et ses amis

On n’a peut-être pas vraiment mesuré l’importance de cette maison des trois frère et sœurs, à Béthanie, un village à 3 km à l’Est de Jérusalem. Dans tout le pays c’était peut-être le seul endroit où Jésus était franchement bienvenu, sans arrière-pensée, et même aimé. Un havre de paix où il pouvait respirer un air pur, libre de toute menace et de toute haine, où il pouvait se détendre.

A son contact Marie avait un jour fait une expérience spirituelle décisive et elle va en exprimer sa reconnaissance d’une manière bouleversante, lors d’une visite de Jésus chez un voisin (11.2 ; 12.1-8). C’est aussi à Béthanie que Jésus passe ses dernières soirées et nuits de liberté avant son arrestation ; il y arrive le vendredi avant la Passion et y revient chaque soir jusqu’à mardi. (Notre épisode a eu lieu un peu plus tôt.)

Un cercle intérieur d’amis

Malgré la masse de ses contacts et malgré tout le bien qu’il leur a fait, Jésus a eu très peu de vrais amis : surtout Lazare et ses deux sœurs.

Nous aussi, nous avons quelques relations plus proches avec certains. L’amour choisit et n’exclut pas la préférence, sans pour autant négliger les côtés positifs des autres. C’est le fonctionnement normal des hommes et femmes : même parmi les disciples il y avait une sorte de cercle intérieur avec des relations privilégiées entre Jésus et trois disciples : Pierre et les deux frères Jacques et Jean.

Délicatesse et confiance

Remarquez la délicatesse des deux sœurs envers Jésus. Juste une information, aucune demande ni appel au secours angoissé. La confiance est totale : leur ami Jésus saura que faire, comment le faire et il le fera forcément.

Mais remarquons aussi la position difficile de Jésus. Il est homme et ses sentiments le portent à partir aussitôt auprès de ses amis très éprouvés. Mais il est aussi l’Envoyé de Dieu parmi les hommes pour glorifier Dieu (v.4). Pour cela il va devoir attendre que Lazare soit mort et vraiment mort (quatre jours). Il est donc obligé de blesser cette amitié confiante, de plonger ses amis dans la douleur et la déception.

Ne disons pas que ce n’est pas si grave, puisque le deuil ne durera que quatre jours. Un deuil est toujours pour toujours ! Leur douleur très profonde le bouleverse jusqu’aux larmes. Notre Dieu Tout-puissant, incarné en un homme comme nous, souffre comme nous, à nos côtés, de ce qui nous angoisse, nous déchire.

2. Le dialogue entre Jésus et Marthe

C’est de cette douleur qu’il va se charger tout d’abord. Et il s’agit là d’un aspect important, même fondamental et pourtant rarement relevé dans les commentaires.

Notons d’abord l’optique dans laquelle Jésus se place : v.4. Pas un mot sur la maladie, la cause de la mort, aucun regard en arrière. Il est entièrement tourné en avant, vers ce qui vient , de la part de Dieu et pour sa gloire. Une leçon pour nous.

Marthe aussi regarde en avant : v. 21, 24. Avec cette ferme assurance elle a une longueur d’avance sur nos contemporains. Au v.21 elle dit à son ami Jésus toute sa souffrance, mais aussi sa confiance intacte, malgré la déception. Jésus lui répond par la phrase un peu ambiguë du v.23 pour la conduire plus loin. Une phrase que nous employons aussi, mais sans pouvoir aller au-delà.

Et alors Marthe affirme cette certitude du v. 24, une réalité pour elle, mais hors de portée, au dernier jour, lors de la résurrection des morts. Seulement, en attendant, aujourd’hui, la place de Lazare est vide, le cœur des deux sœurs est vide et elles pleurent. C’est pour aujourd’hui qu’elles ont besoin de quelque chose de fort, tout de suite.

Pour Marthe la résurrection est une chose qu’elle sait bien, mais ça n’atténue guère sa peine d’aujourd’hui, c’est un savoir pour un temps si lointain qu’il reste abstrait et surtout sans conséquence vivante, sans effet concret sur l’aujourd’hui douloureux. Une Parole de Dieu est toujours donnée maintenant pour être entendue, pour être obéie maintenant et avoir son effet aujourd’hui.

C’est alors que Jésus fait un pas de plus. V. 25 : « Tu souffres de l’absence de ton frère que tu ne retrouveras que bien plus tard. Mais moi, je suis là dès aujourd’hui : la résurrection, la puissance de vie, le dernier jour, la vie qui jaillira de la mort, sont déjà là, devant toi, en ma personne ».

Quand on vient se placer devant Jésus, le temps se télescope : l’avenir le plus éloigné, devient présent maintenant, la résurrection commence aujourd’hui. Si je me place devant lui, la puissance de vie qui agira au dernier jour, commence aujourd’hui déjà, avec lui, par lui.

Il est la résurrection finale dès maintenant : Crois-tu cela ? Veux-tu recevoir dès cet instant la vie qui triomphe de la mort, bénéficier dès aujourd’hui de la puissance vivifiante du dernier jour… jusqu’au dernier jour (et encore plus ensuite) ? Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu.

Il ne s’agit plus de SAVOIR, mais de CROIRE. Marthe est passée d’un savoir sincère, mais abstrait à un croire personnel, centré sur le Messie qui vient ainsi changer profondément sa perspective. Et un quart d’heure après elle commence à voir la gloire de Dieu comme jamais encore : v. 43-44.

Est-ce aller trop loin, si je dis que ce jour-là il y eut deux résurrections, une physique qui couvre deux versets, 43,44 et une spirituelle qui s’étend sur sept,20-27. Et à votre avis laquelle est la plus importante, c’est à dire  laquelle a le plus de conséquences ?

Et nous-mêmes, comment voyons-nous la résurrection ? Est-ce une chose extérieure à nous qui est loin dans l’avenir et ne concerne que les morts en Christ ? Quelque chose d’assez confus qui ne peut donc pas avoir d’impact sur ma vie actuelle ? Mais à quoi m’avance une croyance qui reste sans effet sur mon vécu actuel ?

La résurrection ne devrait-elle pas plutôt être une révolution actuelle qui a pris son élan depuis quelque temps déjà et qui se poursuit toujours ? Un puissant renouveau de vie actuel, qui continue jusque dans l’éternité par la présence transformatrice de celui qui seul est la Vie. Alors Résurrection et Vie éternelle sont une seule et même expérience

Le grand malentendu

Les choses se déroulent ce jour-là largement comme ce qui s’est passé quand on a amené à Jésus un paralytique du haut d’un toit. Tout le monde et ses quatre porteurs attendaient sa guérison et voilà que Jésus commence par lui pardonner ses péchés !

Laquelle des deux libérations a entraîné le plus de conséquence heureuses ? Il y a là, entre Jésus et les gens un malentendu auquel Jésus a toujours à nouveau buté tout au long de son ministère et qui existait aussi dans la tête des disciples et même des deux sœurs : v. 21, 32. Mais il vient d’en libérer Marthe.

Quel est l’objectif du ministère de Jésus ?

Ou, plutôt, qu’est ce  qui y retient le plus notre attention ? C’est une question-piège ! N’est-ce pas la foule de ses actes miraculeux, si nombreux qu’on pourrait remplir la terre des livres qu’on en écrirait Jn 21.25 ?

Voilà le point de départ de l’erreur, car, enfin, si Jean fait cette déclaration dithyrambique, pourquoi lui-même ne présente-t-il que sept miracles sur 21 chapitres ? N’est-ce pas la preuve que l’objectif de Jésus était ailleurs que là où tout le monde croyait le voir et cela jusqu’à la fin.Si tu es le Fils de Dieu, descends et nous croirons.

Jésus n’est pas venu rendre le monde plus humain, plus vivable. Il n’est pas venu comme médecin infaillible pour supprimer hôpitaux et médecins. Il voulait signifier que le mal n’est pas souverain, que Satan n’a qu’une latitude d’action limitée et pas d’avenir. Jésus n’était pas un super révolutionnaire qui élimine toute injustice et tout crime et instaure la paix, la liberté, l’égalité….

En fait ces deux domaines sont de la responsabilité de l’homme qui devrait leur donner la priorité absolue, au lieu de tant d’autres choses qui encombrent la vie politique.

Jésus n’est même pas venu empêcher les gens de mourir (v.21, 25), prolonger indéfiniment la vie naturelle.

Il est venu, par sa mort et sa résurrection, nous faire accéder à un type de vie nouvelle, éternelle. Nouvelle parce que  libérée du contentieux du péché et recentrée sur lui, le Créateur de toute vie. Nouvelle, parce que c’est dès à présent une vie de résurrection qui n’aura pas de fin, même si elle s’interrompt sur cette terre.

Seul Dieu est capable de donner cette qualité de vie et c’est pour y attirer notre attention et notre espoir par ses miracles-signes, pour nous en ouvrir l’accès que Jésus est venu vivre parmi les hommes, assumant notre condition et ses drames, même le pire : la perte d’un être cher.

Il n’est pas un simple réparateur de gaffes et de catastrophes, encore qu’il le fasse souvent. Mais il veut nous faire vivre sur un autre niveau malgré et à travers les catastrophes, jusqu’au jour où c’en sera fini des souffrances , auprès de lui.

Et son action doit être un signe de ce qu’il est, de sa suffisance, de sa puissance aimante, de sa victoire finale pour introduire dans sa présence éternelle. Un signe donnant un clair espoir et même la certitude que le mal, et donc la mort seront un jour éliminés dans un univers et une humanité recentrés sur le Créateur

Miracle et foi

Un miracle n’a vraiment pas sa raison d’être en soi. Il n’est pas fait pour épater, ni pour convaincre, ni même seulement pour glorifier Jésus. Lui, il fuit la publicité, interdit qu’on parle de ce qu’il a fait et quand on lui désobéit, il reste hors des localités, dans la solitude, alors que tous ne parlent que de lui et le cherchent.

La raison d’être du miracle est d’attirer l’attention sur ses déclarations concernant le royaume de Dieu, de démontrer l’origine divine de ce message et de le faire accueillir comme tel.

A plusieurs reprises les évangélistes disent que beaucoup de gens ont cru en voyant les libérations opérées par Jésus. Mais Jésus ne se fiait pas à ce genre de foi.

C’est une foi fondée sur le spectacle de la puissance, sur le sensationnel, l’exceptionnel et donc aussi un peu sur la peur de voir disparaître tout cela. Elle n’est pas fondée sur un amour véritable pour Jésus, tout au plus de l’admiration. Mais elle a surtout besoin de sa ration régulière de miracles, elle ne vit surtout de miracles. S’ils cessent pour une raison quelconque, la foi s’évanouit avec eux. Et l’Église où on ne trouve pas ce quotidien merveilleux est déclarée morte et on la quitte pour une autre, réputée plus vivante.

Il y a aussi des gens que le miracle endurcit. Et ceux-ci sont les derniers qu’on soupçonnerait d’incrédulité : les autorités religieuses. Et la raison n’est pas qu’eux n’ont rien vu des actes de Jésus, au contraire, c’est justement à cause d’eux : v.47b-48.

A la différence de beaucoup de gens, eux ne se demandent pas si Jésus ne serait pas le Messie : ils savent qu’il l’est et leur préoccupation est bien ailleurs : Si nous le laissons faire, tout le monde va croire en lui, le suivre lui et donc se détourner de nous ! Et alors adieu notre pouvoir, nos postes de dirigeants, notre raison d’être ! Voilà ce qui les panique, mais ils ne peuvent pas avouer les choses aussi crûment, alors ils avancent un beau prétexte politique typique. Mais c’est ce jour-là, v. 53 ! Et ils prennent toutes les mesures pratiques pour assassiner leur Messie, v. 57.

Mêlée à la foi, la politique pourrit toujours la foi et la foi n’est plus qu’un pauvre mensonge quand on la prend en renfort pour faire passer des intérêts politiques ou bassement intéressés. Les Romains ont bon dos : en fait ils évitent par principe de se mêler des questions religieuses en Israël.

Ce que Jésus veut signifier ce jour-là, ce n’est pas seulement qu’il est le Maître de la vie : il l’a déjà démontré deux autres fois. Ce qu’il offre, ce n’est pas une simple prolongation ou reprise de l’existence actuelle, mais une vie d’une toute autre qualité, marquée par la libération de toute culpabilité et une paix définitive dans la communion avec Dieu .

Et surtout cette vie nouvelle commence aujourd’hui même, au moment où je place ma confiance en Jésus qui est la résurrection et la vie. Dès ce moment-là ma vie est éternelle, même s’il reste devant moi un passage difficile et mystérieux à franchir. Mais ce n’est qu’un passage vers la pleine expérience de ce dont Jésus m’a déjà donné des arrhes : 2 Corinthiens  5.17-18.

J.J. Streng