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Esaïe prophète en temps de crise

Esaïe 40.27-31 : un temps de crise politique et spirituelle

Israël et Juda sous domination de l’empire assyrien

Esaïe a été prophète pendant plus de quarante ans à Jérusalem, depuis la fin du règne d’Osias en 740 jusqu’au début de celui de Manassé, le plus mauvais roi du royaume de Juda, vers 686.

Israël et Juda sont les deux royaumes du Nord et du Sud après le schisme, la séparation des tribus, sous le règne de Roboam fils de Salomon.

 

Les deux royaumes sont passés sous la domination de l’empire assyrien, … la grande puissance politique et militaire de l’époque.

Depuis plus d’un siècle, l’empire assyrien, la grande puissance politique et militaire de l’époque impose sa suzeraineté, son autorité politique sur les petits États : Syrie, Israël et Juda. (2e livre des Rois, chapitres 16 à 20)

par l’intermédiaire du parti pro-assyrien

Cette influence s’exerce par l’intermédiaire du parti pro-assyrien, qui cherche à mettre en place le roi et la politique de son choix, évidemment favorables à l’empire assyrien. Mais il y a un parti adverse qui résiste, d’où des luttes d’influence.

 C’est un temps de crise, de crise violente. Plusieurs des derniers rois d’Israël assassinent leur prédécesseur et se font assassiner par leurs successeurs. Les petits États entrent dans des jeux d’alliance pour se rebeller ; ils refusent de payer le tribut, leimpôt exigé par l’Assyrie;  ils cherchent l’appui de l’autre grande puissance, l’Égypte.

Des alliances à risque catastrophique : l’idolâtrie

Dans le monde antique, toute alliance politique avec un pays étranger, a une conséquence … quasi inévitable. On se conforme à ses croyances religieuses, on rend un culte à ses divinités, à ses idoles. Et on le fait d’autant plus facilement que – croit-on- … ce sont ces divinités qui lui donnent sa puissance, qui lui permettent ou lui accordent la réussite.

Esaïe s’oppose à ces alliances avec des puissances étrangères. En effet, elles entraînent l’idolâtrie. Il prophétise aussi bien la fin des États vassaux que celle des empires suzerains successifs, Assyrie puis Babylonie. Seul un reste du peuple de Dieu se repentira et reviendra de l’exil

Achaz, roi de Juda est en conflit avec les rois de Syrie et d’Israël. Plutôt que  la confiance en Dieu, il préfère l’alliance avec l’empire assyrien.
Résultat logique et inévitable : le royaume de Juda deviendra un satellite de l’Assyrie.
Comme Esaïe l’a prophétisé, le royaume de Syrie est écrasé en 732, le royaume d’Israël cesse d’exister en 722, la population est déportée en Assyrie.

Ezéchias un roi fidèle mais…

Ézéchias, fils et successeur d’Achaz est un roi fidèle qui fait confiance à Dieu. Les chapitres 36 à 39, la partie historique du livre d’Esaïe racontent ses démêlés avec l’empire assyrien.
Jérusalem est assiégée en 701 par le roi Sanchérib et l’armée assyrienne   
Suite aux prières du roi  et du prophète, la ville est délivrée miraculeusement. Une épidémie, probablement la peste, fait 185000 morts en une nuit chez les assaillants.

Mais Esaïe dénonce aussi l’orgueil et la légèreté du roi. Ezéchias montre tous ses trésors, c’est à dire sa puissance militaire à l’ambassade babylonienne du roi  Mérodac-Baladan. Certes celui-ci veut le féliciter pour sa guérison miraculeuse; Mais surtout chercher une alliance contre l’empire assyrien.
L’empire babylonien, la nouvelle puissance politique  et son roi Nabuchodonosor reviendront plus tard, en vainqueurs.

Les Babyloniens emmèneront les descendants d’Ézéchias en captivité.

La prophétie d’Esaïe : un encouragement en temps de crise

Les chapitres 40 et suivants peuvent être lus selon des perspectives différentes.

Esaïe, prophète du 8ème siècle s’adresse sans doute d’abord directement à ses contemporains, qui ont échappé au siège de Jérusalem après le retrait de Sanchérib en 701. Ils n’ont pas retrouvé d’indépendance politique véritable et craignent toujours une nouvelle invasion.

Le message pourra s’appliquer aussi aux contemporains de Manassé, le plus mauvais des rois de Juda. Son idolâtrie et ses crimes attireront nécessairement le jugement et l’exil annoncé à Ézéchias.

Enfin, la prophétie peut contenir, un message pour les exilés qui la liront beaucoup plus tard à Babylone après la prise de Jérusalem en 586.

Ceux qui veulent rester fidèles à l’Éternel ont besoin d’être encouragés Ils ont besoin de savoir qu’il y aura, au-delà de l’exil, au delà des épreuves, un avenir pour le peuple de Dieu.

 

Contestation et découragement

Pourquoi dis-tu, Jacob,
pourquoi répètes-tu, Israël :
Ma destinée est cachée au Seigneur,
mon droit passe inaperçu de mon Dieu ?
(Segond 21)

Il y a contestation

Ma destinée échappe à l’Eternel
Il y a un accusé, Dieu : il ne s’occupe pas de Ma destinée, il ne tient pas compte de Mes droits avec grand M
Il y a un contestataire, le prophète l’appelle par son nom : Jacob/Israël, peuple de l’alliance. 

Tout un programme pour Israël : Dieu l’a choisi, s’est révélé à lui, il lui a donné des avertissements et des promesses. Dieu ne s’occuperait-il pas de son peuple ? Quelle contradiction !

Les « pourquoi » d’Esaïe sont lancés sur un ton de réprimande : pourquoi dis-tu…, pourquoi répètes-tu… ?

Le prophète veut les faire réfléchir à leurs pensées, à leurs attitudes, et à leurs actions.

Le temps du 2e verbe en hébreu (répètes-tu) suggère que se plaindre était devenu une habitude en Juda.

Ma destinée est cachée, mon droit passe inaperçu ou dans la version Semeur :
Mon Dieu ne fait rien pour défendre mon droit.

Le verbe hébreu Abar, signifie littéralement « passer à côté, ne pas tenir compte », comme quelqu’un qui marche juste à côté de nous sans faire attention à nous. Je suis en panne sur la route, les voitures passent sans s’arrêter

Il y a découragement

Israël se plaint : ses droits et sa justice ne figurent pas à la première place dans le plan de Dieu. Dieu n’est pas juste, il aurait dû faire les choses à leur manière, à eux.

A première vue Israël a raison. De nombreux rois ont trop souvent méprisé ses droits et son sens de la justice. Samuel en avait averti le peuple quand celui-ci avait demandé un roi 

Quelques extraits de 1 Samuel 8. 11-18
Voici les droits du roi qui régnera sur vous : il prendra vos fils et … ils iront devant son char comme gardes du corps … Il prendra vos filles comme parfumeuses, cuisinières et boulangères.  Il prendra le meilleur de vos champs, de vos vignes et de vos oliviers et il le donnera aux gens de sa cour.  Il prendra la dîme de vos semailles et de vos vendanges, et il la donnera à ses hauts fonctionnaires et aux gens de sa cour. … Ainsi vous deviendrez ses esclaves.  Ce jour-là vous crierez contre le roi que vous vous serez choisi, mais ce jour-là le SEIGNEUR ne vous répondra pas !

La situation politique du moment est sombre. L’empire est toujours maître de la situation : l’Assyrie ou, de manière prophétique, la Babylonie, dominent la région dans toutes les questions politiques et militaires. Jérusalem, assiégée, affamée a été délivrée par miracle sous le règne d’Ezéchias en 701 (2 Rois 19.35-37) mais pour combien de temps. Sa destruction et la captivité de ses habitants sont annoncées, mais pour quand ?

La chair est comme l’herbe, fragile comme la fleur des champs (Esaïe 40.6 et 7).
Il n’y a pas d’espoir de voir la domination impériale s’affaiblir. Pas d’espoir non plus qu’Israël redevienne assez puissant pour secouer le joug du dominateur.
Les quelques tentatives des derniers rois d’Israël et plus tard, des derniers rois de Juda ont été des échecs lamentables. Le royaume d’Israël a disparu en 722 et celui de Juda en 586 avant J.C.

Mais comment oser contester ?

Dieu n’est pas seulement le créateur mais aussi celui qui préserve tout, terre, corps célestes, nations, individus.
Alors comment pouvez-vous, vous le peuple de Dieu, vous qui avez reçu des promesses et des privilèges qui ont été accordés à vous seuls parmi toutes les nations, comment pouvez-vous dire que Dieu vous a abandonnés ?

Cette contestation pose aussi la question : « qui tient le gouvernail du navire, qui dirige le monde, qui détermine la direction de l’histoire, qui décide du rôle du peuple de Dieu » ?

La réponse est évidente. Cependant, à travers les paroles d’Esaïe, Dieu veut aider son peuple à réfléchir. Bien sûr, rien n’a changé dans sa situation mais il ne peut pas voir comment les choses vont évoluer. Il lui manque la perception, la compréhension de la grandeur de Dieu.

Qu’est ce que ces affirmations nous apprennent à propos des pensées du peuple d’Israël et aussi des nôtres ?

La justice qui m’est due échappe à mon Dieu :

Autrement dit, nous n’obtenons pas les bons coups de main au bon moment. « La vie » n’est pas juste !

Est ce de l’incroyance, est-ce de l’ignorance, peut-être les deux ?

On ne croit pas vraiment que Dieu est capable de connaître tous les détails de notre vie. On ignore l’amour qu’il a pour nous. Dieu ne s’intéresse pas à nous, il est trop occupé par autre chose pour faire attention à nos besoins.

Ces accusations illustrent le processus d’endurcissement de la personne : apitoiement sur soi-même, amertume, frustration, colère. Si on n’obtient pas ce qu’on veut, alors on se croit négligé ou abandonné par Dieu ; « personne ne m’aime ».
Les épreuves et les difficultés de vie sont inévitables. Mais elles ne veulent jamais dire que Dieu nous a oubliés ou ne se soucie pas de nous.

 Un Dieu éternel aux commandes : Esaïe 40.28

Ne le sais-tu pas ?
Ne l’as-tu pas entendu ?
C’est le Seigneur (YHWH), le Dieu de pérennité (d’éternité)
qui crée les extrémités de la terre ;
il ne s’épuise ni ne se fatigue ;
son intelligence est insondable.

Un peuple qui ne comprend pas

Le prophète introduit au verset 28 une  2ème série de questions adressées à son peuple 
Ne le sais -tu pas, n’as-tu pas entendu, c’est à dire, ne comprends-tu- pas?
La connaissance de Dieu du peuple est inadaptée et peu profonde. Sa pratique extérieure superficielle a fermé et endurci les cœurs

Le Seigneur dit : Ainsi, quand ce peuple s’approche de moi, 
il me glorifie de la bouche et des lèvres, mais son cœur est loin de moi, 
et la crainte qu’il a de moi n’est qu’un commandement appris des hommes
. (Esaïe. 29.13).

La nature insondable de Dieu

Le prophète affirme la nature insondable de Dieu. L’Éternel est Dieu de toute éternité. Sa stratégie s’étend dans la durée. Elle ne se limite pas au présent. Il ne compte pas en mesures humaines mais en dimensions cosmiques à la mesure et à la distance du ciel (Esaïe 40.12) et des étoiles (Esaïe 40.26)

C’est lui, Dieu,  qui crée les extrémités de la terre

Lui seul peut mesurer l’étendue des océans, peser montagnes et collines (Esaïe 40.12 ) Son œuvre de création mais aussi sa providence s’appliquent à tous les pays et à toutes les créatures de la terre et pas seulement à Israël. Il a des projets pour l’Assyrie puis pour Babylone ; il en aura plus tard pour la Perse avec Cyrus aussi bien que pour Israël.
Israël restreint son droit, sa justice au cadre de son petit pays. Son sens limité du temps exige une satisfaction immédiate.

Dieu ne s’épuise ni ne se fatigue

Même après avoir déployé les cieux comme une tente (v. 22), avoir fait marcher en ordre l’armée des astres (v. 26) (Version Semeur)

Il est indépendant et n’a pas besoin de notre aide

« De qui Dieu a t-il pris conseil pour se faire éclairer ? (v.14) (Version Semeur)
Les nations sont comme des gouttes dans un seau , comme un grain de sable (v. 15) … Elles ont pour lui la valeur du néant et du vide (v. 17) La puissance de l’Assyrie et de Babylone peut paraître terrifiantes, ces empires ne sont rien devant Dieu. Leurs rois, il les réduit à néant, comme des fétus de paille (v. 23-24).

Dieu donne force et courage : Esaïe 40.29-31

Il (Dieu) donne de la force à celui qui est épuisé
et il augmente la vigueur de celui qui est à bout de ressources.
Les adolescents s’épuisent, ils se fatiguent,
les jeunes gens finissent par trébucher ;
mais ceux qui espèrent le Seigneur renouvellent leur force.
Ils prennent leur essor comme les aigles ;
ils courent et ne se fatiguent pas,
ils marchent et ne s’épuisent pas. Segond 21

A celui qui est fatigué

Il donne de la force à celui qui est fatigué, Et il augmente la vigueur de celui qui est à bout de ressources (qui tombe en défaillance, Semeur)

Cette force, appliquée à Dieu, suggère sa toute puissance.

Cette force pour celui qui est fatigué, cette vigueur pour celui qui est à bout de ressources, il les met à la disposition d’Israël.  Il les donne à tous ceux qui reconnaissent leur faiblesse, leurs limites. Il la donne même à ceux qui se croient forts, qui ont l’illusion d’être forts mais risquent de faiblir et de tomber, une fleur qui se fane, une herbe qui se flétrit.

Les jeunes se fatiguent et trébuchent

Les adolescents s’épuisent, ils se fatiguent, les jeunes gens (robustes gaillards, Semeur) finissent par trébucher

«Jeunes gens» vient d’un mot qui signifie élu, choisi pour porter les armes, donc ce sont des hommes dans la force de l’âge. 
Même les jeunes hommes, qui sont des symboles d’énergie, et les gages du  renouvellement de la nation, trébuchent et s’écroulent. La force humaine n’est pas grand chose. C’est parfois plutôt l’obstination, l’entêtement : une illusion de force.
La véritable force consiste à ne pas s’entêter dans des positions fausses, à se rendre compte de ses limites, ne pas se faire d’illusions sur ses capacités ou sa résistance à long terme mais c’est faire confiance aux capacités illimitées de Dieu.

Mais ceux qui espèrent dans le Seigneur renouvellent leur force

« Ils prennent leur essor, leur envol comme les aigles ;
ils courent et ne se fatiguent pas,

ils marchent et ne s’épuisent pas »

Se confier en l’Éternel, c’est un espoir qui attend ou une attente qui espère. La confiance se manifeste dans la durée.

Esaïe encourage ses compatriotes à persévérer dans la foi car il sait prophétiquement qu’ils seront plus tard exilés à Babylone.

Et ils auront besoin de cette foi qui espère

L’aigle prend son essor, non par la puissance de ses ailes, mais parce que  les courants du vent soulèvent ses ailerons.

Ni par la puissance, ni par la force mais par mon Esprit. (Zacharie 4.6)

Ceux qui font confiance à Dieu seront portés par l’Esprit de Dieu. Ils recevront la force et la patience nécessaires pour surmonter les moments difficiles, pour ne pas se fatiguer, ne pas faiblir, mais continuer.

A l’aube de la nouvelle année, nous faisons des projets …. Et nous voudrions les voir se réaliser.
Mais si des obstacles surviennent, …s’il nous semble que nos désirs en se réalisent pas …

Ne campons pas sur nos droits … et ne tombons pas dans la dépression. Mais … gardons le silence devant l’Éternel et espérons en lui (Psaume 37), … nous soumettant à Dieu à l’exemple du Christ (1 Pierre 2. 21).

 

C. Streng

Chute, souffrance et souveraineté de Dieu

Si Dieu est maître de tout, pourquoi la chute, le péché originel, la souffrance ?

Dieu, dans sa toute-puissance n’aurait-il pas pu les empêcher ? en garantir le chrétien ?

Quel gâchis !

La création et la chute de l’homme – Mariotto Albertini (1474-1515

En lisant les premiers chapitres de la Genèse, vous vous êtes peut-être aussi déjà dit : « Mais quel dommage ! À peine l’homme est-il installé dans ce magnifique paradis, le voilà qui gâche tout par sa bêtise ! Quelle folie ! N’y avait-il vraiment pas moyen d’éviter cela ?

On ne peut changer le passé

Cette question est futile en ce sens qu’il est absurde de vouloir changer le passé, mais elle touche en fait une caractéristique fondamentale de toute la Création et mérite quand même d’être examinée sérieusement.

1. Ah, si seulement Dieu avait détruit Satan

Genèse 1. 27 ; 2.16 et 3. 1

La création et la chute de l’homme (1514-1515) – Mariotto Albertini (1474-1515)

« Dieu n’aurait pas dû permettre la tentation en Eden et, vu sa toute-puissance, il lui aurait suffi de détruire Satan, avant qu’il ne puisse nuire. » Raisonnement logique, typiquement humain : en face d’un problème on recourt spontanément, parfois sans vraiment réfléchir, à la violence.

Deux cadeaux : l’intelligence et la liberté

À la création l’homme a reçu, parmi beaucoup d’autres, deux cadeaux qui sont le reflet de son Créateur : l’intelligence et la liberté. Or comment sait-on que quelqu’un est est libre ? Quand il a le choix, quand il peut faire un choix guidé par sa réflexion.

Jouissance égoïste ou obéissance confiante ?

Or en face du fameux arbre en Eden Adam avait le choix entre la jouissance égoïste, fermée sur lui-même, et le devoir d’égard envers ses semblables et l’obéissance confiante envers son Créateur. Donc : 1er point : il était libre.

Liberté pour le bien ou pour le mal ?

Ensuite cette liberté a besoin d’être testée, éprouvée, pour démontrer si l’homme va l’utiliser pour le bien ou pour le mal. Supprimer Satan d’emblée, avant ce test de Genèse 3, aurait été la manière faible et inintelligente d’exercer la toute-puissance. Certes cela aurait supprimé toute contestation de l’autorité de Dieu. Mais cette question de Satan serait toujours restée posée, sans réponse : Dieu a-t-il vraiment dit, peut-on faire confiance à une parole de Dieu, Dieu mérite-t-il qu’on fonde sa vie sur ses paroles ? Avouons qu’elle est fondamentale et qu’elle appelle une réponse vraiment nette et définitive.

Concilier justice, sainteté et compassion

Là se joue un test révélateur pour tous les innombrables prétendus dieux de ce monde. Qui parmi eux va se donner la peine, va se montrer capable de concilier la justice, la sainteté envers le péché et la compassion et l’amour pour le pécheur ?

Seul Jésus Christ a réussi à concilier l’inconciliable

Seul Jésus-Christ a eu ce courage et la sagesse qui réconcilie parfaitement ces deux  extrêmes logiquement inconciliables. Lui seul a su atteindre ce résultat, non dans une construction théorique acrobatique, mais dans la pratique ; non dans un déploiement exceptionnel de puissance, comme l’auraient peut-être attendu des hommes, mais dans l’impuissance extrême et l’humiliation honteuse et même injuste d’une mort d’esclave.

Satan privé de sa puissance

Là Satan, le contestataire d’Eden s’est non seulement vu clouer définitivement le bec, mais aussi dépouiller de toute sa puissance. Il n’a plus désormais que les moyens que l’homme, dans son incroyance envers Dieu, lui accorde en croyant à ses mensonges.

Jésus totalement confiant jusqu’à la croix

Mais la question de Gn 3.1 a reçu sa réponse majestueuse dans le dépouillement total du Crucifié. C’est vrai, Dieu avait bien dit de ne pas manger d’un certain arbre en Eden, mais c’était par amour de l’homme et non pour se réserver des privilèges égoïstes. Oui, on peut faire confiance à n’importe quelle parole prononcée par Dieu : Dieu se tient derrière elle et la réalise pour quiconque s’y attend. Oui, Dieu est digne qu’on fonde toute sa vie sur ce qu’il dit : Jésus l’a fait et a ainsi pu accomplir une œuvre d’amour d’une valeur éternelle.

Une confiance qui a surmonté le mal

Un homme a surmonté le mal par confiance en Dieu, par amour pour lui : Jésus. La rançon d’amour qu’il a ainsi versée à la justice, pulvérise l’obstacle du péché entre la créature et son Créateur, elle suffit pour purifier le pécheur dans la confiance en Dieu et pour instaurer entre les deux une relation d’amour éternelle.

Et le nouveau peuple que Jésus a ainsi suscité à son Père apporte à son tour la preuve de cette fiabilité par toute son action à la gloire de son Re-créateur.

La perfection de Dieu : aimer sa créature
La gloire de Dieu : en être aimé en retour

La perfection de Dieu, c’est d’aimer sa créature. Sa gloire, c’est d’en être aimé en retour, pour lui-même.

En nous rappelant ainsi ces réalités, nous mesurons le gâchis qu’entraîne tout manque ou refus de confiance au Créateur pour l’individu et son entourage. Et on est émerveillé de la sagesse, de l’amour que Dieu a mis en oeuvre pour apporter une vraie réponse à la question posée. Et il y a une conséquence logique qui découle de tout cela : « Il faut que Dieu soit reconnu comme disant la vérité et tout homme qui s’oppose à lui comme menteur, car il est écrit : Tu seras toujours reconnu juste dans tes sentences et tu seras vainqueur lorsque tu juges. » (Rm 3.4)

2. l’amour de la créature pour son créateur

… malgré la souffrance, malgré les difficultés…

Job 1. 8 -11

La Bible n’est pas un livre sacré qui contourne prudemment les problèmes délicats ou qui emballe sa réponse dans un nuage de conditions ou d’approximations. Elle prend les difficultés de front, souvent dans le cadre de l’expérience pratique, vécue.

Satan contre Job !

Voici, à cet égard, un 2e cas très analogue à celui de Genèse 3 où le même Satan conteste Dieu de façon encore plus radicale. C’est le problème fondamental posé par le livre de Job, un livre qui inquiète bien des chrétiens et dont certains commentaires sont des simplifications bien superficielles.

Pour le diable : pas d’amour inconditionnel, sans contrepartie

D’une manière gratuite et méchante Satan agresse Dieu au sujet de Job : « Est- ce vraiment pour rien (= de manière désintéressée) que Job révère Dieu ? » La question est sournoise et porte la marque typique de son auteur. Satan qui a créé ou au moins inspiré tout ce qui se fait comme religions dans le monde leur a, à toutes, donné le même esprit, celui du commerce : si tu me donnes, je te donne ; je t’offre ceci, tu m’accordes cela et si tu ne me donnes pas ce que je t’ai demandé, j’irai voir ailleurs. On n’a rien pour rien, le « gratuit » n’existe pas plus dans le monde religieux que dans le monde commercial, même si les publicités en sont pleines. Et pour revenir à Job, selon Satan, si Job révère Dieu, c’est par intérêt, c’est pour garder les nombreuses bénédictions que Dieu lui a accordées.

… Sans avantages, on se détourne de Dieu

Cette nouvelle question de Satan est au moins aussi essentielle que la première. Satan qui ne sait pas ce qu’est l’amour, peut encore bien moins concevoir un amour inconditionnel, sans contrepartie. Selon lui, si Job révère Dieu, c’est parce que Dieu lui a donné la prospérité, la paix, la considération sociale… Et si Dieu lui retirait quelque chose de tout cela, Job se détournerait sûrement de Dieu ou le maudirait, comme le lui suggère sa femme.

Amour inconditionnel ou donnant donnant ?

Dans Genèse la question était de savoir si Dieu et ses paroles méritent une confiance entière, jusqu’à engager sa vie sur elles. Ici elle est de savoir si un amour inconditionnel est possible, concevable entre le Créateur et sa créature ou si cette relation n’est qu’une affaire de donnant donnant.

Job au coeur d’un test opaque et de problèmes révoltants

Dieu connaît Job et accepte le test. Job ignore cet arrière-plan et il faut qu’il l’ignore, pour que le test soit honnête. Mais il va de ce fait se débattre dans un nœud de problèmes absolument inouï et révoltant.

Un cri de désespoir vers Dieu

Pourtant il rejettera avec vigueur la religion simpliste de ses amis, il appelle Dieu à se manifester et à répondre à ses questions. Il lui crie son désespoir face à ce silence, en fait nécessaire, mais n’acceptera jamais de mettre l’honneur de Dieu en question, ce qui était la visée de Satan.

Oui : On peut aimer Dieu sans condition

Ainsi un deuxième point essentiel est acquis : oui, Dieu mérite qu’on l’aime sans condition. Un homme peut aimer son Dieu sans attendre de lui une contrepartie, Dieu mérite d’être aimé même dans les difficultés, quand les circonstances démentent son amour. Il en a le contrôle et sait où il veut en venir, sans abandonner le croyant. Et, à la fin du récit il approuvera magnifiquement l’attitude de Job

Amour vérifié dans l’épreuve

Pour être réelle, la liberté avait besoin d’être mise à l’épreuve. Il n’est pas anormal non plus que l’amour soit appelé à vérifier son authenticité dans une épreuve.

3. Pourquoi Dieu laisse-t-il sur terre le chrétien racheté

Certes le chrétien a été racheté, purifié du péché qui faisait obstacle entre lui et son Père céleste. Mais il lui arrive encore si facilement et si souvent de retomber dans le péché, le manque de confiance, le manque d’amour. Pourquoi Dieu le laisse-t-il sur cette terre, au lieu de le prendre avec lui au ciel ? Pourquoi, au lieu de bloquer ou même de détruire dès maintenant Satan qu’il a déjà vaincu, lui laisse-t-il cette latitude d’action ?

Jusqu’à quand ?

Aussi, à travers le NT, retentit cette question : jusqu’à quand ? Celle-ci n’est pas posée méchamment par le diable, mais souvent avec angoisse ou douleur par les enfants de Dieu, surtout quand ils sont maltraités à cause de leur confiance, de leur amour pour Dieu.

La souveraineté de Dieu dans son plan éternel pour la création

Ce qui est en jeu, cette fois, c’est la maîtrise totale de Dieu dans l’histoire, sa maîtrise des évènements. Ces chrétiens savent que l’histoire est la mise en oeuvre d’un plan éternel de Dieu pour toute sa création, mais ce qui les déroute, au premier degré, c’est la manière si différente de Dieu de concevoir et de gérer le temps. Et plus profondément bien des chrétiens n’ont pas compris quel objectif final Dieu veut atteindre par son plan.

Un plan réalisé par l’amour et la sainteté en Jésus-Christ

C’est sûr, tout va vers un but, vers un point final dans le futur où Dieu lui-même viendra faire le bilan de toute l’histoire et inaugurer un tout autre ordre de choses.
Or, en attendant, Dieu poursuit sans bruit la réalisation de son grand dessein. Dans cette humanité et cette création souillées par le péché, il introduit un homme en qui il incarne en particulier ses deux qualités maîtresses : l’amour et la sainteté.
Jamais l’humanité n’avait vu un de ses représentants, aussi simple, ordinaire, s’élever à un tel degré de noblesse dans l’amour du prochain : Rm 5. 6-8.

Incarné dans l’abaissement et la discrétion

Il l’a fait non pas pour un ami, mais pour l’humanité pécheresse. Il l’a fait non dans une apothéose glorieuse comme dans un roman héroïque, mais dans l’abaissement total de l’exécution d’un esclave, organisée dans le cadre d’un crime d’État. Ses 33 ans de vie, dans la discrétion d’une petite ville rurale, d’une culture largement méprisée à l’époque, ont été pour Dieu le moyen de révéler à la face de l’univers visible et invisible, une réalité que le monde ignore, qu’aucune religion ne pratique : la sainteté, la sienne, ainsi incarnée dans le naturel quotidien d’une vie humaine.

Manifesté dans la mort  par amour de Jésus

Le Christ portant sa croix, Maître de Delft, fin du 15e s

Or c’est la vie sainte de ce Jésus, l’efficacité transformatrice de sa mort choisie par amour, qui sont capables, et elles seules, de délivrer l’humanité et toute la création du péché et de son ferment destructeur. Cela, il s’agit de le faire savoir à tout homme et, dans sa sagesse, Dieu en confie la mission à l’Église, à ceux qui se sont confiés en lui.

Le chrétien témoin de la confiance et de l’amour pour Dieu

Voilà pourquoi le chrétien reste sur terre, même en milieu hostile, pour témoigner que Dieu mérite une vraie confiance et un amour inconditionnel… que cette attitude garde son sens et sa force même quand elle est ridiculisée ou entraîne la persécution. C’est inévitable quand on est encore en route entre le déjà sauvé et le pas encore réuni avec le Sauveur.

Deux forces pour vaincre le mal  : l’amour et la sainteté de Dieu

Il s’agit que les hommes aveuglés par la sensualité et l’égoïsme voient et donc sachent qu’il y a deux forces portées par le Saint-Esprit et capables de vaincre le mal : l’amour et la sainteté de Dieu. N’importe qui peut les recevoir dans sa vie en la confiant à Jésus, c’est à dire en exerçant sa liberté et son intelligence.

Et pour libérer la création

Alors la création, elle aussi et toute entière, pourra être libérée du fardeau du péché : Rm 8. 19-23. Il n’y a donc pas que les chrétiens qui soupirent en disant « Jusqu’à quand ? », la création entière est dans la même attente anxieuse de voir l’accomplissement définitif du plan de Dieu et sa restauration dans une pleine communion avec son Créateur. « Et c’est cet Esprit qui constitue l’acompte de notre héritage, en attendant la délivrance du peuple que Dieu s’est acquis.

Pour célébrer la gloire de Dieu

Ainsi tout aboutit à célébrer sa gloire. » (Ephésiens 1.14) = chanter de tout cœur et dans une formidable chorale universelle notre amour pour notre Père et notre Frère célestes. Voilà la pièce maîtresse de notre avenir. Dès demain peut-être !

J.J.Streng