Mois : janvier 2016

La parabole du fils prodigue – Luc 15

Parabole du fils prodigue ou le fils perdu et retrouvé

Il serait plus judicieux de donner à  la parabole du fils prodigue le titre  « le retour du fils perdu ».

En effet les trois paraboles de Luc 15 ont en commun quelque chose ou quelqu’un qui est perdu, qui est cherché, puis retrouvé. Nous sommes invités à  méditer cette histoire racontée par Jésus selon ces trois idées : des illusions à perdre – une relation perdue, puis retrouvée – l’amour du Père.

Lecture : Luc 15.11-32

Il dit encore : Un homme avait deux fils. Le plus jeune dit à son père : Mon père, donne-moi la part de bien qui doit me revenir. Et le père leur partagea son bien. Peu de jours après, le plus jeune fils, ayant tout ramassé, partit pour un pays éloigné, où il dissipa son bien en vivant dans la débauche.

Lorsqu’il eut tout dépensé, une grande famine survint dans ce pays, et il commença à se trouver dans le besoin. il alla se mettre au service d’un des habitants du pays, qui l’envoya dans ses champs garder les pourceaux. Il aurait bien voulu se rassasier des carouges que mangeaient les pourceaux, mais personne ne lui en donnait.

Etant rentré en lui-même, il dit : Combien d’ouvriers chez mon père ont du pain en abondance, et moi, ici, je meurs de faim ! Je me lèverai, j’irai vers mon père, et je lui dirai : Mon père, j’ai péché contre le ciel et contre toi, je ne suis plus digne d’être appelé ton fils ; traite-moi comme l’un de tes ouvriers. Et il se leva, et alla vers son père.

Comme il était encore loin, son père le vit et fut ému de compassion, il courut se jeter à son cou et le baisa. Le fils lui dit : Mon père, j’ai péché contre le ciel et contre toi, je ne suis plus digne d’être appelé ton fils.

Mais le père dit à ses serviteurs : Apportez vite la plus belle robe, et revêtez-le ; mettez-lui un anneau au doigt, et des souliers parce que ton frère que voici était mort et qu’il est revenu à la vie, parce qu’il était perdu et qu’il est retrouvé.aux pieds. Amenez le veau gras, et tuez-le. Mangeons et réjouissons-nous ; car mon fils que voici était mort, et il est revenu à la vie ; il était perdu, et il est retrouvé. Et ils commencèrent à se réjouir.

Or, le fils aîné était dans les champs. Lorsqu’il revint et approcha de la maison, il entendit la musique et les danses. Il appela un des serviteurs, et lui demanda ce que c’était. Ce serviteur lui dit : Ton frère est de retour, et ton père a tué le veau gras, parce qu’il l’a retrouvé en bonne santé. Il se mit en colère, et ne voulut pas entrer.

Son père sortit, et le pria d’entrer. Mais il répondit à son père : Voici, il y a tant d’années que je te sers, sans avoir jamais transgressé tes ordres, et jamais tu ne m’as donné un chevreau pour que je me réjouisse avec mes amis. Et quand ton fils est arrivé, celui qui a mangé ton bien avec des prostituées, c’est pour lui que tu as tué le veau gras !

Mon enfant, lui dit le père, tu es toujours avec moi, et tout ce que j’ai est à toi ; mais il fallait bien s’égayer et se réjouir, parce que ton frère que voici était mort et qu’il est revenu à la vie, parce qu’il était perdu et qu’il est retrouvé.

1. Des illusions à perdre

Insatisfaction et révolte contre le Père

Voilà deux fils dans le même état de profonde insatisfaction. Ils ont de fortes aspirations, comme tout jeune : s’épanouir, mettre en actions tout son potentiel. Mais ils ne leur ont encore jamais donné corps, car il y a quelque chose qui les bloque. Et cet obstacle, ils l’identifient tout naturellement, c’est leur père. Les deux sont profondément révoltés contre ce père qui leur bouche l’horizon.

Cette révolte, le cadet, le fils prodigue l’exprime sans ménagement : il enterre son père de son vivant par sa demande choquante de recevoir l’héritage. L’aîné est plus lâche et la couve patiemment en silence, mais il finit aussi par la jeter à la figure de son père.

Fausse image du Père

Alors qu’en est-il donc de ce père de la parabole du fils prodigue ? Est-il vraiment aveugle et tyrannique ? À en juger par l’attitude des fils, c’est évident. Mais à en juger par son comportement effectif, c’est grossièrement calomnieux. Voilà tant et tant d’années qu’ils vivent sous son toit et ils ont de lui une image si fausse que c’en est incroyable !

On peut donc vivre tant et tant d’années à côté de Dieu dans une famille, une Église, un cadre social qui nous le rend proche et ne voir pourtant de lui qu’une caricature ! On peut le voir comme quelqu’un qui vous dépasse largement, qui a droit de regard sur vous, qui bloque votre liberté, mais sur qui vous n’avez aucune prise.

Liberté sans limites ?

Et cette liberté comment la verriez-vous ? Un horizon débarrassé de toute limite, de toute autorité, la possibilité de faire tout ce dont on a envie, sans avoir de compte à rendre à quiconque ?

Cela fait deux erreurs de taille, deux illusions calamiteuses : d’une part un Dieu tyran ou moralisateur qu’il faut débarrasser d’urgence, par exemple en le déclarant mort, en disant qu’il n’est qu’une survivance du passé ou la fabrication d’une culture donnée. Et d’autre part une liberté qui n’est qu’un égoïsme absolu et qui entraînera une anarchie invivable.

Fausses conceptions de la liberté

Le plus grave n’est pas de se tromper, c’est de ne pas y regarder de plus près. Il est ahurissant d’entendre tel slogan futile qui suffit à fonder toute une existence, tel dicton éculé qui permet d’envisager tranquillement l’éternité sans Dieu. Et c’est avec ces paroles creuses que des gens se perdent parmi nos proches, notre Eglise, notre cadre professionnel.

Prions pour eux, pour savoir leur montrer combien Dieu est tout autre et combien une relation profonde avec lui libère, épanouit, donne du sens à la vie.
Mais dans l’Eglise il y a aussi le risque de se perdre en objectifs étrangers à la volonté de Dieu, en vision déformée des autres, voire en enseignements douteux. On peut blesser autrui et même se perdre à cause d’une fausse conception de la liberté.

2.Une relation perdue mais retrouvée

Illusions perdues

Quand on s’adonne à des illusions on prend le risque de tout perdre… y compris ses illusions ! Oh, pas tout de suite. Le cadet découvre enfin cette liberté rêvée, la grande vie riche de plaisirs et libre de toute contrainte, pleine de relations. Grâce à quoi ? L’argent du père : il avait quand même ça de bien !

Mais quand cet argent est épuisé, la bulle des illusions éclate et le garçon retombe lourdement dans la réalité ordinaire. Et curieusement c’est juste alors qu’il y a une grande famine dans le pays…

Encore un coup du père tyrannique ? Non, le rejet du Père

Non ! la cause c’est l’absence, le rejet de ce père : là-bas on peut manger autant qu’on veut, alors que moi je suis ici à mourir de faim. C’est cette distance mise entre lui et le père qui cause la famine, l’exploitation, l’avilissement (un Juif réduit à garder des cochons !).  Masquée jusque là par la vie factice, la réalité reprend ses droits et toute son autorité implacable.

Juste appréciation de la réalité

Et maintenant ce qui est décisif, c’est ce qui va se passer dans sa tête : il se mit à réfléchir sur lui-même. Encore faut-il que cette réflexion soit honnête. Va-t-il accuser la société, « le système », le patron ; ce serait courir encore plus  loin du père. Eh bien non, mais il faut aller jusqu’au bout de cette nouvelle lucidité :

Je me lèverai, j’irai vers mon père, et je lui dirai : Mon père, j’ai péché contre le ciel et contre toi,  v.18. Et il se mit en route.

Mais le long d’un tel retour, combien de gens s’arrêtent en route, bloqués par l’orgueil, le refus de se déjuger, la peur d’affronter les réactions des autres, celles de son frère dès son arrivée :

Et quand ton fils est arrivé, celui qui a mangé ton bien avec des prostituées, c’est pour lui que tu as tué le veau gras v. 30

Non, la déchéance est telle qu’il a retrouvé une juste appréciation des choses :

je ne suis plus digne d’être appelé ton fils ; traite-moi comme l’un de tes ouvriers. v. 19

Retour vers le Père, retour sur soi

Mais encore une fois, ce n’est pas le père qui lui a fait la leçon pour provoquer ce changement de perspective. Et voilà que la présence du Père devient désirable, se remettre sous son autorité devient vital.

Revenir au père, c’est le seul moyen d’éviter la mort. Plus question d’indépendance à tout prix, on est près d’une dépendance volontaire inconditionnelle. Le retour sur soi doit déboucher sur un retour chez soi, c’est à dire à une relation étroite avec le Père, sans mérite à faire valoir. Ca, c’est comme une résurrection, le début d’une vraie vie.

Plein d’illusions mais tout de même perdu

Notons que l’aîné, lui, a beau être chez lui, auprès du père, il est moralement à des milliers de kilomètres de lui. Il n’a qu’une relation pharisaïque, c’est à dire nulle : il est fier de sa fidélité sans faille, de sa propreté morale, de la modestie de ses demandes par rapport à l’immensité de ses mérites.

Impeccable, mais plein d’illusions et perdu là où il pourrait être sauvé, heureux. S’il connaissait ou voulait connaître réellement son père. On est encore plus gravement perdu, quand on est sûr d’être le seul à ne pas être égaré.

3. L’amour du Père

Pardon sans leçon de morale

Imaginez les craintes, les remords qui se bousculent dans la tête du cadet en route. Et quand à l’approche de la maison il lève un instant les yeux, le ciel lui tombe sur la tête : il n’est pas arrivé, il n’a rien dit et le voilà enfermé dans les bras de son père !

Comment est-ce possible ? Il est le bienvenu, il est embrassé, il est pardonné, il est même totalement restauré dans sa position de fils de la maison ! Et pas seulement sous forme de promesses, mais avec des actes et sans délai. Et tout cela par celui qu’il avait carrément enterré avant l’heure !

On n’a pas l’impression que son père ait entendu ses paroles, tant sa repentance était évidente dans son retour et son attitude lamentable. Tout comme Dieu, ce père n’est pas un esprit chagrin qui met sérieusement en doute les motivations de ce retour pourtant attendu.

Cela fait qu’il manque ici quelque chose que nous aurions sans doute préparé avec soin et considéré comme essentiel : une solide leçon de morale ! C’est ainsi que Dieu nous traite, nous aussi, avec une grâce confondante : il nous montre jusqu’où il est allé par amour pour nous, nous attendant depuis 2000 ans : la Croix.

Grâce à grand prix et pardon inconditionnel

C’est bien la preuve que la grâce accordée aux coupables n’est pas une grâce à bon marché, elle a coûté le prix le plus énorme et c’est Dieu qui l’a assumé. Il est donc justifié d’appeler cette parabole la parabole du père prodigue et c’est par des actes bien concrets qu’il montre son amour. Pensons-nous, voulons-nous en faire de même envers qui nous demande pardon ? Et ne plus rappeler la faute couverte par le pardon ?

C’est alors qu’éclate avec magnificence la réalité capitale qui a toujours existé et que les deux fils ont toujours brouillée par leur égoïsme : l’infini amour inconditionnel du père. Cet amour existe pareillement aujourd’hui, même pour ceux qui ont « tué le père », qui clament la mort de Dieu. Il leur faut parfois en arriver à une extrémité comme le cadet pour avouer qu’il est d’une urgence vitale de revenir à ce père pour que la vie ne se perde pas misérablement, mais soit restaurée dans un sens épanouissant.

Légaliste et fier de l’être

Mais il est des gens volontairement aveugles : comme l’aîné, ils maintiennent fièrement leur distance et osent même jeter à la face du Père céleste leur palmarès impeccable et si injustement méconnu.

Ils se scandalisent de ce que leur respect (légaliste) de toutes les règles de service ne leur rapporte rien. Eux n’ont jamais réfléchi sur eux-mêmes et arrivent à continuer à ruminer une rancœur contre leur père, qui, lui, les aime de manière extraordinaire.

Dieu créateur généreux et plein de bonté

Pour finir juste encore trois conclusions un peu carrées tirées de cette histoire de Jésus. Comme n’importe quel plant de tomate, l’être humain n’est pas fait, pas capable de mener une vie utile à d’autres sans un bon appui, tuteur.

Pourquoi fuir le meilleur : son Créateur ? Maintenir une fausse image de celui-ci n’est pas une simple bévue, c’est franchement du suicide prémédité. Car par-delà tous les errements possibles des hommes, il y a une réalité intangible, dont tout chrétien devrait méditer la fantastique bénédiction :

Mon enfant, lui dit le père, tu es toujours avec moi, et tout ce que j’ai est à toi ; mais il fallait bien s’égayer et se réjouir, parce que ton frère que voici était mort et qu’il est revenu à la vie, parce qu’il était perdu et qu’il est retrouvé.  v. 31.

J.J.Streng

De la justification à la sanctification – lettre aux Romains

De la justification à la sanctification

La rose de Luther, un résumé de sa théologie

  • La croix noire, symbole de la croix de Jésus-Christ.
  • Au centre de la rose, elle rappelle l’importance centrale de la mort du Christ. En effet, c’est la foi en la mort de Jésus sur la croix et en sa résurrection qui justifie et sauve.
  • Le cœur rouge, symbole du cœur des chrétiens.Car la croix donne la vie au chrétien, qui à son tour doit aimer comme Jésus l’a aimé.
  • La rose blanche, symbole de la joie et de la paix. La foi procure joie, consolation, et paix du cœur.
  • Les flammes dorées, symboles du Saint-Esprit. L’Esprit éclaire le chrétien, et le pousse à aimer son sauveur et témoigner de sa foi.
  • L’arrière-plan bleu, symbole du ciel.La joie issue de la foi est le début d’une nouvelle vie qui continue au ciel. Il s’agit de l’idée chère à Luther du « déjà et pas encore ».
  • L’anneau d’or, symbole de l’éternité.Comme l’or qui ne rouille pas et qui est le plus précieux des métaux, il montre l’éternité de la vie céleste qui attend le chrétien.

D’après Wikipédia

Justification et sanctification au centre de la lettre aux Romains

Justification et sanctification sont deux réalités centrales de la lettre aux Romains et d’une vie chrétienne conséquente. Les deux notions sont étroitement liées. Après un rappel de ce qu’est la justification, le sujet de la sanctification sera développé, avec ses difficultés et ses applications pratiques.

En effet, si nous sommes devenus une même plante avec lui par la conformité à sa mort, nous le serons aussi par la conformité à sa résurrection, sachant que notre vieil homme a été crucifié avec lui, afin que le corps du péché soit réduit à l’impuissance, pour que nous ne soyons plus esclaves du péché ; car celui qui est mort est libre du péché.

Or, si nous sommes morts avec Christ, nous croyons que nous vivrons aussi avec lui, sachant que Christ ressuscité des morts ne meurt plus ; la mort n’a plus de pouvoir sur lui. Car il est mort, et c’est pour le péché qu’il est mort une fois pour toutes ; il est revenu à la vie, et c’est pour Dieu qu’il vit. Ainsi vous-mêmes, regardez-vous comme morts au péché, et comme vivants pour Dieu en Jésus Christ. Romains 6.5-11

1.  La justification

Le péché entraîne la peine capitale exigée par la justice de Dieu en vertu de sa loi sainte Le salaire du péché, c’est la mort. Romains 6.23

Culpabilité expiée par Jésus-Christ

Aucun homme ne peut affronter lui-même, expier cette culpabilité, payer cette dette devant la justice du Dieu trois fois saint. Jésus-Christ, Dieu fait homme, mais sans péché, a effectué cette expiation à la place du coupable.

Ainsi la justice de Dieu est satisfaite, puisque la culpabilité est expiée. Elle l’est pour quiconque croit cela, c’est à dire se saisit du bénéfice de cette substitution, pour être acquitté. Dans cet acte de foi il y a en fait plusieurs prises de position successives :

  • je reconnais que le verdict du Juge divin sur le péché est juste ;
  • je considère que la mort subie par Jésus à ma place est aussi ma mort au péché,
  • je me solidarise avec Jésus dans cette mort qu’il a subie volontairement pour moi;
  • cette solidarité avec la mort de Jésus m’entraîne dans la résurrection de Jésus, qui devient également réalité pour moi : Romains 6.11

Croire ce que Dieu dit de l’œuvre de Jésus au point d’en faire dépendre mon existence, c’est honorer Dieu, alors Dieu honore à son tour ma foi en lui donnant ce qu’elle croit :

  • il m’acquitte de ma culpabilité et me déclare juste ;
  • il me ressuscite spirituellement avec Jésus ;
  • il me donne ainsi une nouvelle vie et me fait changer d’identité (rebelle – enfant de Dieu) et de statut (coupable – déclaré juste).

Ainsi le péché est surmonté sur le plan légal par l’œuvre de Jésus et une décision juste de Dieu. Ce sont deux évènements fondamentaux auxquels j’accroche en quelque sorte ma vie par la foi. Dieu me fait la grâce de me considérer comme juste (sans culpabilité) et même comme saint (séparé du péché), c’est à dire  tel que je serai, quand il me prendra auprès de lui, alors que je sais, et lui aussi sait, que je chute encore. Quelle immense grâce !

2. La sanctification

Parvenu à ce point l’idée absolument évidente s’impose : ce nouveau statut extraordinaire que Dieu veut bien m’accorder par principe, il faut le faire entrer concrètement dans mon quotidien :

Nous qui sommes morts au péché, comment pourrions-nous encore vivre en lui ? …Romains 6.2

Vous êtes morts avec Christ, faites donc mourir …Colossiens  3.5.

Si donc vous êtes ressuscités avec Christ, cherchez les choses d’en haut, où Christ est assis à la droite de Dieu.Attachez-vous aux choses d’en haut, et non à celles qui sont sur la terre. Car vous êtes morts, et votre vie est cachée avec Christ en Dieu. Quand Christ, votre vie, paraîtra, alors vous paraîtrez aussi avec lui dans la gloire. Faites donc mourir ce qui, dans vos membres, est terrestre, la débauche, l’impureté, les passions, les mauvais désirs, et la cupidité, qui est une idolâtrie.  Colossiens 3.1-5

Ces derniers versets identifient clairement un premier champ moral d’application de la sanctification : le développement d’un caractère, d’un mode de penser et d’agir qui honore et reflète notre Sauveur.

Et là il faut être clair : beaucoup de systèmes moraux demandent d’abandonner les péchés connus, de pratiquer une discipline de l’âme et du corps, d’adopter une mentalité, un comportement corrects ; beaucoup de religions appellent à se consacrer à Dieu et au service de nos semblables.

Paul prononce des exhortations analogues, mais il n’abandonne pas ensuite son lecteur dans le dilemme de devoir réaliser une chose dont il sait qu’il n’a pas les moyens en lui-même.

D’abord première différence dans la motivation  : la gratitude

il ne s’agit pas d’obéir à des ordres, à un code moral froids et extérieurs à nous ; c’est le désir intérieur d’exprimer notre gratitude à notre Sauveur qui a payé de sa vie notre vie nouvelle. Ça, c’est le principe de base.

Puis une deuxième différence : de la domination du péché à l’autorité du Seigneur

Paul explique que par la foi en la mort de Christ pour nous, celui-ci a vaincu le péché comme puissance dominatrice. Ainsi nous sommes passés, par la foi toujours, de la domination du péché sous l’autorité de notre Seigneur qui nous aime.

Bien sûr, cela ne se voit et ne se sent pas, mais c’est un fait proposé à notre foi et alors nous partons au combat sur le terrain de la victoire : Romains 6.7,11.

La troisième différence : la présence du Saint-Esprit

Pour ce combat nous avons comme arme, en plus de notre sérieux et notre persévérance, la présence, la direction et les forces du Saint-Esprit. Une de ses missions est justement d’opérer notre sanctification avec nous 

Que le Dieu de paix vous rende lui-même entièrement saints et qu’il vous garde parfaitement esprit, âme et corps pour que vous soyez irréprochables lors de la venue de notre Seigneur Jésus-Christ.
1 Thessaloniciens 5.23-24

Qui accusera les élus de Dieu ? C’est Dieu qui justifie ! Qui les condamnera ? Christ est mort ; bien plus, il est ressuscité, il est à la droite de Dieu, et il intercède pour nous ! Romains 8.33-34

Le quatrième atout : le pardon

Si nous chutons tout de même, il n’y a pas de raison de nous désespérer, nous pouvons demander et recevoir le pardon pour l’échec et un nouveau départ avec ses forces pour reprendre le même combat : 

Que le méchant abandonne sa voie, et l’homme d’iniquité ses pensées ; qu’il retourne à l’Éternel, qui aura pitié de lui, à notre Dieu, qui ne se lasse pas de pardonner. Esaïe 55.7

Réorientation de l’activité

Parallèlement au développement d’un caractère chrétien il y a un autre domaine par lequel le croyant exprime sa reconnaissance à son Sauveur, c’est une réorientation partielle ou totale de son activité. Il est devenu membre de toute une nouvelle famille qui, même localement est plus grande que sa famille naturelle et qui a une dimension mondiale : la famille de Dieu, l’Église.

Comme partie de cette nouvelle famille le chrétien redistribue ses activités, en abandonne certaines, en entreprend d’autres ou en change totalement. Notre Seigneur n’est pas venu se faire servir, mais pour servir lui-même. C’est donc un honneur que de pouvoir lui emboiter le pas dans le même esprit, nous sommes sauvés pour servir.

La sanctification, mon désir de remercier le Seigneur et de lui plaire, va donc dans ces deux directions : vers l’intérieur, développer une mentalité qui honore mon Sauveur ; vers l’extérieur placer Dieu au centre de ce que je fais et réviser ou compléter le programme dans cette nouvelle optique. C’est à cela que pensait Paul en disant que la justice reçue de Dieu vient de la foi et s’épanouit ensuite dans la foi 

Car je n’ai point honte (je suis fier) de l’Évangile : c’est la puissance de Dieu pour le salut de quiconque croit, du Juif premièrement, puis du Grec. Romains 1.16

3. Des difficultés

La plus grande, c’est certainement que de tous les atouts énumérés tout à l’heure, aucun n’est visible. Je ne vois pas que Christ a vaincu le péché pour moi, que je ne suis plus esclave du péché, que le Saint-Esprit veut surmonter le péché dans ma vie.

Cette difficulté est normale et nous rappelle une réalité de base de la vie chrétienne : nous vivons guidés par la foi, non par la vue (2 Corinthiens 5.7) ou pour reprendre Romains 1.17 : la justice vient de la foi et s’épanouit dans la foi (Version Maredsous) ou encore plus clair : tout cela c’est par la foi seule, du commencement à la fin (Version Bonne Nouvelle Aujourd’hui).

Paul a bien prévenu : le juste vivra par la foi, de foi. Nous avons commencé par la foi en honorant la Parole de Dieu par notre foi et nous avons effectivement été sauvés, radicalement changés.

Eh bien, continuons ainsi, par la foi seule, du commencement à la fin, sachant que Dieu est fidèle à sa Parole. Il ne s’agit pas de  minimiser le problème , les chrétiens y butent autant les uns que les autres  et il est de taille.

C’est ce qu’on appelle parfois le problème  du déjà, et du pas encore.Paul nous dit :

Par notre union avec Jésus-Christ, Dieu nous a ressuscités ensemble et nous a fait siéger ensemble dans le monde céleste. Il l’a fait afin de démontrer pour tous les âges à venir, l’extraordinaire richesse de sa grâce qu’il a manifestée en Jésus-Christ par sa bonté envers nous. Ephésiens 2.6-7

Voilà pourquoi vous n’êtes plus des étrangers ou des résidents temporaires, vous êtes concitoyens des membres du peuple de Dieu, vous faites partie de la famille de Dieu. Dieu vous a intégrés à l’édifice qu’il construit sur le fondement que sont les apôtres, ses prophètes, et dont Jésus-Christ lui-même est la pierre principale.

En lui toute la construction s’élève, bien coordonnée, afin d’être un temple saint dans le Seigneur, et, unis au Christ, vous avez été intégrés ensemble à cette construction pour former une demeure où Dieu habite par l’Esprit. Éphésiens  2.19-21

Quant à nous, nous sommes citoyens du royaume des cieux : de là, nous attendons ardemment la venue du Seigneur Jésus-Christ pour nous sauver. Car il transformera notre corps misérable pour le rendre conforme à son corps glorieux par la puissance qui lui permet de tout soumettre à son autorité. Philippiens  3.20-21

Entre le « déjà » et le « pas encore »

Voilà des réalités fantastiques, quelques aspects de notre nouveau statut obtenu par le Crucifié. Et il ne faut pas les lire comme un rêve inaccessible, comme tous les rêves, Paul emploie le présent et même le passé, à côté de quelques  futurs. Voilà un aperçu du déjà réalisé par le Seigneur, de ce qui sera un jour notre seule réalité formidablement vraie, aussi certaine que notre salut aujourd’hui .

Mais si nous avons déjà réellement notre place dans ce monde (Jésus lui-même a dit qu’il allait nous la préparer en Jean 14.3 et viendra ensuite nous prendre avec lui), il est vrai aussi que nous sommes encore dans l’ancien monde. Et celui-là fonctionne comme s’il était impensable qu’il puisse un jour disparaître pour laisser place au nouveau.

Ce nouveau, ce « pas encore » est encore caché, il n’est présent que dans notre cœur et un peu visible que dans le rassemblement de ses citoyens. Mais si vous luttez contre l’influence que l’ancien monde veut exercer sur vous, ce combat démontre que le nouveau est déjà un peu là. Et si dans ce combat nous nous plaçons sur le terrain de la victoire remportée par le Seigneur, comme il nous y invite, nous croyons ainsi et nous annonçons qu’un jour seul le royaume de Dieu existera sur cette terre.

Déjà spirituel mais encore charnel

Une autre difficulté plus douloureuse, c’est que même si nous sommes d’accord avec Paul quand il dit« Nous qui sommes morts au péché, comment pourrions-nous encore vivre dans le péché ? » (Romains 6.2), nous nous retrouvons aussi dans cet autre constat de Paul :

Nous savons, en effet, que la loi est spirituelle ; mais moi, je suis charnel, vendu au péché. Car je ne sais pas ce que je fais : je ne fais point ce que je veux, et je fais ce que je hais. Or, si je fais ce que je ne veux pas, je reconnais par là que la loi est bonne. Et maintenant ce n’est plus moi qui le fais, mais c’est le péché qui habite en moi. Ce qui est bon, je le sais, n’habite pas en moi, c’est-à-dire dans ma chair : j’ai la volonté, mais non le pouvoir de faire le bien. Car je ne fais pas le bien que je veux, et je fais le mal que je ne veux pas. Romains 7.15-19

Dieu notre Père nous éduque avec amour et patience

Là il est précieux de savoir que notre Dieu est aussi notre Père. Un père qui apprend à son enfant à marcher ne le rejette pas, parce qu’il ne l’a pas écouté et est tombé. Il le relève, lui donne d’autres indications et reprend son instruction. Et Dieu a une patience dont nous sommes bien incapables, parce que le but qu’il s’est fixé il veut et va l’atteindre avec nous, si nous lui gardons notre confiance.

Voyez, c’est encore par la foi seule, du commencement à la fin ! Et heureusement il a promis : Mes petits enfants, je vous écris ces choses afin que vous ne péchiez point. Et si quelqu’un a péché, nous avons un avocat auprès du Père, Jésus-Christ le juste.  1 Jean 2.1

a. Imaginez ce tableau :

un enfant vient de naître, faible et démuni de tout, comme tous les nouveau-nés.

«Ouf, enfin la longue claustration de neuf mois est terminée, le but est atteint, vite, mettez moi dehors dans la rue, je n’ai plus besoin de vous, ni de votre nourriture invariable, ni de vos soins envahissants, vous parents et frères et sœurs, ni même de votre toit ».

C’est d’une absurdité rare. Mais ce qui est beaucoup moins rare, ce sont les gens qui se comportent ainsi : moi, je me suis converti, j’ai mis ma vie en règle avec Dieu, mon avenir est assuré, je n’irai pas en enfer. Qu’est-ce que j’ai à faire d’une Église, d’ailleurs il y a là des gens que je préfère ne pas rencontrer. Pourquoi voulez-vous que je lise ce gros livre dont vous me parlez toujours ? Déjà je n’aime pas lire et n’en ai pas le temps, mais, bon, donnez-moi votre calendrier, je vais faire un effort pour vous faire plaisir.

b. Une autre absurdité qui n’est pas rare non plus ?

Je m’appelle Baptiste, vous savez, c’est cette grande famille qui habite dans la ville voisine, pas loin d’une autre famille assez vaste, appelée Pentecôte. C’est dans cette famille que je suis né, mais je n’y vais plus qu’une fois par semaine, le dimanche matin, quand je n’ai rien d’autre. Comment, y prendre ma place pour que ma vie serve à quelque chose  ? D’abord soyez poli. Moi, je fais mon travail correctement à l’entreprise, cela prend déjà l’essentiel de mon temps. Et puis les services dont on m’a parlé là-bas, je n’ai pas de don pour ça et il y a là des gens plus capables que moi et formés pour ça. Ensuite, ça risque de me prendre les quelques loisirs que j’ai.

Salut gratuit mais pas grâce à bon marché

Les deux cas sont un peu brutaux et excessifs, mais je crois que vous en avez saisi la leçon. Le remède pour chacune de ces dérives pourrait être d’essayer de mesurer une bonne fois et vraiment ce que c’est que ce salut gratuit qui n’est surtout pas une grâce bon marché.

Réfléchir à ce que cela veut dire tant aimer le monde pour lui donner, non pas le coup de grâce qui met fin une bonne fois à tous ces scandales, mais son Fils unique, et cela pour sauver, non pas les quelques uns qui en valent encore la peine, mais quiconque, non pas quiconque s’en montre digne, mais simplement quiconque croit, met sa confiance en ce Dieu qu’il connaît pourtant si peu.

La vraie motivation de la sanctification

La vraie motivation de l’aventure de toute une existence qu’est la sanctification, c’est la reconnaissance pour l’amour dispensé sans limite, pour l’incroyable libération reçue, pour la paix qui vous est alors tombée dessus et qui a transformé votre vie.

Pas de légalisme mais une relation personnelle avec le Sauveur

Quand j’ai fait mes premiers pas de chrétien, soucieux de bien faire, j’ai demandé à un de mes aînés spirituels ce que désormais je devrai éviter et ce que j’aurai encore le droit de faire. Et je n’ai pas été peu décontenancé quand il a souri en secouant la tête : « Non, ce n’est pas de ce côté, du côté d’un code de conduite qu’il te faut chercher. Approfondis plutôt ta relation personnelle avec ton Sauveur et c’est lui qui te guidera. Si tu l’aimes et veux lui faire plaisir, tu trouveras par toi-même le comportement qui l’honorera ! »

Cela m’est d’abord apparu comme une difficulté supplémentaire. C’est tellement plus rassurant d’avancer en territoire inconnu avec un itinéraire détaillé où tout est précisé. Mais j’ai quand même suivi ce conseil. J’y ai trouvé non seulement la direction fidèle du Seigneur, mais aussi la magnifique liberté de tout chrétien par rapport à tous les « il faut », « ne fais pas », « c’est pas normal »…

Votre conjoint ne vous a sans doute jamais remis une liste de tout ce que vous devez faire et ce que vous devez éviter. Il vous a simplement dit : « Je t’aime et je t’aimerai toujours ». C’est étonnant ce qu’une telle certitude peut donner comme idées pratiques !
Et, par dessus tout, revêtez-vous de l’amour qui est le lien par excellence ! 
Colossiens 3.14

J.J.Streng